Hawaou Adamou, un combat pour l’éducation des petites filles

Mariée de force à l’âge 16 ans, et mise dehors à l’âge de 30 ans, après 12 grossesses, Hawaou Adamou s’est relevée, et a trouvé la force non seulement de rebondir, mais d’aider les autres femmes

A l’occasion de la Journée Internationale des femmes 2016, neuf Fondations, Air France, Chanel, Elle, Kering, Orange, Raja-Danièle Marcovici, Sanofi Espoir, Sisley-D’Ornano, Fonds Solidarity AccorHotels, se sont réunies pour la première fois afin d’évoquer la condition des femmes dans le monde, autour d’un grand événement audiovisuel intitulé «ELLES ont toutes une histoire». Une collection de onze programmes courts (1,30 minute) signés Nils Tavernier, est diffusée sur toutes les chaînes et les écrans du groupe France Télévisions dans le cadre de sa semaine spéciale «En avant toutes!» du 5 au 13 mars (à retrouver en replay).

De nationalité brésilienne, sénégalaise, cambodgienne, chinoise, éthiopienne, américaine ou encore française, ces femmes ont chacune leur histoire, ponctuée de violences ou juste de pauvreté. Mais leur caractère, leur courage et pour finir leur engagement en faveur des droits des femmes en ont fait de véritables héroïnes. Quel que soit leur domaine -la santé, l’éducation, la lutte contre les mutilations.- elles uvrent pour un monde plus juste pour les femmes.

Mariée de force à 16 ans, 12 grossesses.

La Camerounaise Hawaou Adamou, qui dirige l’Association des Femmes Haoussas pour le Développement (AFHADEV) lutte depuis 10 ans pour l’émancipation des femmes à travers leur indépendance financière et leur éducation. Née en 1974, et élevée dans le quartier défavorisé de la Briqueterie, à Yaoundé, la capitale du Cameroun, Hawaou Adamou n’a pas eu la chance d’aller à l’école. Dans ce quartier, l’un des plus pauvres et les plus peuplés du pays, 33% des filles ne fréquentent pas l’école pour des raisons culturelles et économiques, et 35% des filles n’achèvent pas le cycle d’éducation primaire, d’après les chiffres de Plan International, datant de 2014.

Mariée de force à l’âge 16 ans, après 12 grossesses à l’âge de 30 ans, elle se retrouve dans la rue avec ses quatre enfants après le décès de son mari -sa belle-famille l’a mise dehors. Mais malgré ces épreuves, Hawaou Adamou s’est relevée, et a trouvé la force non seulement de rebondir, mais d’aider les autres femmes à avoir une vie meilleure. En 2006, elle a fondé l’AFHADEV, qui militait à l’origine pour l’autonomie financière des femmes (via l’implantation d’une micro-finance pour renforcer le petit commerce notamment). Mais alors qu’ «elle était invitée à un colloque, elle s’est rendue compte qu’elle était la seule à ne pas savoir lire ni écrire», a raconté à Paris Match la journaliste Nadine Ayoub, qui a participé au tournage et ainsi passé cinq jours à Yaoundé en janvier dernier avec l’équipe de Nils Tavernier. Elle s’est dit : «c’est ça notre problème». Et en a fait son cheval de bataille.

Elle a appris à lire et à écrire en même temps que ses enfants.

La Camerounaise a acquis son certificat d’études primaires à l’âge de 41 ans. «Ça a comblé un vide en moi», confie-t-elle. Elle vit aujourd’hui chez sa mère et ses quatre enfants sont scolarisés. Au quotidien, elle fait du porte à porte, va dans les familles pour tenter de convaincre les parents d’envoyer leurs filles à l’école, discute avec les chefs de village dans l’espoir de faire évoluer les mentalités. Elle fait tout son possible pour améliorer le quotidien des enfants -elle a notamment trouvé un endroit pour qu’ils jouent au foot, comme nous a rapporté Nadine Ayoub- et qu’ainsi, les petites filles de demain ne vivent pas la même chose qu’elle.

C’est la Fondation Orange (via sa filiale Orange Cameroun) qui a intégré Hawaou Adamou à «Elles ont toutes une histoire». «Elle travaillait avec Plan Cameroun, et a été sélectionnée en 2014 parmi les cinq candidates au prix de la fondation Orange, Woman For Change», nous a expliqué Mary Lisa Durban, directrice mécénat Europe, Moyen-Orient et consolidation Groupe chez Orange. Si elle n’avait finalement pas gagné cette récompense, «Orange lui a remis une subvention de 5.000 euros pour un projet de développement numérique (son association a reçu des ordinateurs, tablettes, une imprimante, et des bénévoles sont allés l’aider à prendre en main ce matériel afin qu’elle puisse à son tour apprendre aux femmes l’usage de ces outils)», a-t-elle précisé.

Une dame qui force l’admiration, comme les dix autres qui forment cet événement insolite. «Cela faisait des années que Karine (Guldemann, déléguée générale de la Fondation ELLE) voulait utiliser le média télé pour démocratiser la cause des femmes», nous a relaté Chloé Freoa, déléguée générale adjointe de la fondation du groupe Lagardère Active. Le choix de Nils Tavernier, que Karine Guldemann connaît bien, était une évidence: «c’est un réalisateur qui a une grande sensibilité et est un passionné des femmes». Le but n’était pas «de faire la promotion de la fondation Elle, mais vraiment de ces femmes», qui sur le terrain «dépassent les objectifs, font bouger les lignes, et travaillent en respect et complémentarité des hommes.» C’est pourquoi elle est allée chercher d’autres fondations, elles aussi complémentaires en la matière. Puis un jour, «elle a rencontré Elodie Polo Ackermann, d’ Imagissime (Une société de Lagardère Studios)», qui a été séduite par ce projet, et l’a finalement produit. Une aventure extraordinaire, et qui ne s’arrêtera pas là, puisque «de toutes ces histoires va naître un film de 52 minutes prévu pour France 5, a priori pour septembre prochain».

Hawaou Adamou, promotrice de l’Association des Femmes Haoussa pour le Développement (AFHADEV)
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