C’est l’assassinat d’un autochtone Gbaya qui a déclenché les affrontements entre Gbayas et Bororos
C’est aux environs de 21 heures dans la nuit du 19 juillet 2011, après avoir bu dans un bar en compagnie de sa copine, que la victime Tchamako Bigond, âgé de 42ans, décide de rentrer chez lui à Kano, village situé à environ 3kilomètres. Au niveau de l’école publique, il heurte un jeune Bororo auprès duquel il s’empresse de s’excuser. Le présumé assassin, non identifié jusqu’ici parce qu’en cavale, ne l’entend pas de cette oreille surtout que lui aussi a passé son temps à boire au bar voisin après l’assemblée générale du Boscuda, une association nationale Bororo. La suite, selon des témoignages concordants confirmés par Dagobert Avom, le sous-préfet de Manjou et Marcel Wamgbe, le responsable local du service cuménique «Justice et Paix», le présumé assassin sort son couteau, tranche la gorge du malheureux Tchamako et prend la fuite le laissant gisant dans son sang devant les pleurs de sa copine. Le responsable de «Justice et Paix» raconte que «la victime respirait encore à mon arrivée et a succombé au moment de la transporter à l’hôpital régional de Bertoua». La police, appelée sur les lieux a transporté le corps pour la morgue de cette formation hospitalière. La communauté Gbaya mise au courant aurait décidé de se venger en posant des barricades afin d’«empêcher les musulmans de faire la prière de 05 heures».
Dans la matinée du mercredi 20 juillet 2011 aux environs de 09 h et 30 minutes, des éléments des équipes mixtes police et gendarmerie, casques vissés sur le crâne et boucliers anti-émeutes à la main, auxquels se sont joignent plus tard ceux du bataillon d’intervention rapide (Bir) ont bloqué les sorties nord et sud de la ville de Manjou, située à une dizaine de kilomètres au nord de Bertoua. Face à eux, des jeunes gens en colère armés de gourdins, de lattes, de chevrons, de lances, d’arcs et de flèches. Quelques minutes après, une alerte au sud de la ville a amené les hommes en tenue à foncer vers des jeunes dont le langage et les invectives dénotaient de leur appartenance à la communauté Gbaya. Devant la résistance des émeutiers, la gendarmerie est venue en renfort pour constater que le marché a été saccagé et les autres boutiques du quartier éventrées. Bilan, 18 blessés admis aux urgences de l’hôpital régional de Bertoua.
Aux environs de 11 heures ce mercredi là, Adolphe Lélé Lafrique, le gouverneur de l’Est, est arrivé sur les lieux après que Mme Nko’o Ella, le 2ème adjoint au préfet du Lom-et-Djerem, ait tenté en vain de calmer la foule en colère. La réunion de crise présidée par le gouverneur a débouché sur une série de mesures dont «l’identification de tous et de chacun pour nous permettre de retrouver le présumé assassin». Selon Lélé Lafrique, «l’interpellation de ce suspect permettra l’arrêt des hostilités d’une part et de l’action musclée des autorités qui voudront restaurer l’autorité de l’Etat». Un tour dans cette formation hospitalière a permis de constater que jusqu’à 13 heures et 30 minutes, 18 personnes avaient été admises depuis le matin la plupart pour «commotion cérébrale, traumatismes crâniens et blessures profondes».
