Une campagne contre la stigmatisation des malades du Sida lancée au Cameroun

Elle a été lancée mardi à Yaoundé, à l’initiative de l’Association camerounaise pour le marketing social (ACMS)

A l’initiative de l’Association camerounaise pour le marketing social (ACMS), une Ong locale, le ministre de la Santé publique, André Mama Fouda, a lancé mardi à Yaoundé une campagne nationale de communication pendant l’année en cours sur la lutte contre la stigmatisation et la discrimination vis-à-vis des personnes vivant avec le VIH au Cameroun.

Pour les promoteurs, cette opération consiste à sensibiliser,informer et attirer l’attention à travers des ateliers et des séances de causeries éducatives sur ces deux phénomènes que le président du RECAP+, Michel Iriko, décrit comme « des problèmes cruciaux (qui) progressent plus vite qu’on ne le pense » et « fragilisent la personne infectée ou affectée par le VIH, car, elle se retrouve en position d’accusé ».

Au travers de la diffusion de spots radiotélévisés y compris des affiches, toute la population camerounaise est ciblée, mais la contribution des milieux religieux, du corps judiciaire, des parlementaires et des médias est particulièrement sollicitée afin de susciter une meilleure inclusion socioprofessionnelle des personnes vivant avec le VIH, selon l’ACMS.

Une étude publiée mardi à Yaoundé estime à 12% pour les femmes et 18% chez les hommes la frange de la population camerounaise qui manifeste un comportement tolérant envers les personnes vivant avec le VIH, une tendance fâcheuse que les autorités sanitaires se proposent d’infléchir à travers une campagne nationale contre la stigmatisation et la discrimination.

D’une prévalence rapportée à 4,3% aujourd’hui contre 5,5% dix ans auparavant, sur une population d’environ 22 millions d’ habitants, le Cameroun dénombre plus de 570.000 malades de SIDA parmi lesquels 134.770 sous traitements antirétroviraux (ARV) dont 23.179 femmes enceintes, selon les statistiques officielles.

Selon le ministre de la Santé publique, André Mama Fouda, la lutte contre cette pandémie enregistre peu de progrès à cause de la « stigmatisation et la discrimination (qui) sont réelles dans notre société et constituent des obstacles majeurs à la prévention du VIH, au traitement et au soutien social en ce sens qu’elles favorisent le déni de la maladie par les personnes atteintes et restreignent leur recours aux soins, notamment au dépistage ».

C’est un constat confirmé par les résultats de l’étude sur l’index de stigma réalisée par le Réseau camerounais des associations des personnes vivant avec le VIH (RECAP+) avec l’appui du Projet de prévention du SIDA en Afrique centrale (PPSAC) de l’Organisation de coordination pour la lutte contre les endémies en Afrique centrale(OCEAC), financé par la coopération technique allemande.

D’après cette enquête citée par le ministre de la Santé publique, « la stigmatisation et la discrimination touchent plus sévèrement les femmes comparées aux hommes. 78% de femmes vivant avec le VIH sont exclues des activités ou des manifestations sociales ; 72% de femmes sont exclues des activités religieuses et des lieux de cultes, 81%sont exclues des regroupements familiaux ».

Un taux de 61% est aussi établi pour celles ayant été victimes d’insultes, de harcèlement ou de menaces verbales. « Dans nos communautés, déplore par conséquent le ministre, l’acceptation de la personne vivant avec le VIH est donc encore difficile ».

La campagne lancée mardi à Yaoundé a pour objectif de mettre un terme aux pratiques discriminatoires et stigmatisantes à cause desquelles 23% de ces Camerounais ont perdu leur emploi ou revenu, tandis que 3% d’entre eux ont par ailleurs été interdits d’accès à une institution d’ enseignement et 5% se sont vu refuser des services de santé sexuelle et reproductive, d’après l’étude sur l’index de stigmatisation.


amiens.fr)/n

Carole Keyanfe: «Les cancéreux ont besoin de soutien, afin de redonner un sens à leur vie»

La Franco-camerounaise, qui préside l’association «Second-Life» annonce une remise de dons dans des hôpitaux camerounais en juin 2014

Vous êtes peu connue du grand public camerounais. Pouvez-vous vous présenter à notre public ?
Je suis une Franco-camerounaise, fondatrice et présidente de l’association «Second Life». Je suis également responsable à Paris d’un institut capillaire et mammaire pour personnes en chimiothérapie et maladies des cheveux, depuis 10 ans.

Qu’est-ce qui vous a poussée à créer l’association «Second Life» ?
Mon côté humanitaire et social y est pour beaucoup. Pendant des années, j’ai vu des patients de toutes nationalités pour des conseils sur les prothèses, leur bien-être, et parler de tous les problèmes autour de la maladie ainsi que du comportement de leur entourage, un travail psychologique. Et je me suis rendu compte un jour, après le passage d’une patiente camerounaise, que les personnes d’origine africaine en général n’écoutaient pas et posaient difficilement les questions soit par tabou, ou par honte. Malgré le fait que j’y pensais depuis un moment déjà, j’ai fini par prendre le taureau par les cornes afin d’informer, de sensibiliser dans le but de prévenir et de briser tous ces tabous. Le cancer est une maladie qui brise la vie des malades, les pousse vers le fond. Les cancéreux ont besoins de soutien, afin de redonner un sens à leur vie. Car, après la maladie, une nouvelle vie recommence d’où Second Life qui signifie seconde vie.

Est-ce que vous ciblez une couche particulière dans votre campagne de sensibilisation ?
Nous ciblons tout le monde, car la maladie nous concerne tous, de près ou de loin. Néanmoins les pays en voie de développent sont notre cible particulière notamment l’Afrique car, comme je l’ai dit plus haut, les tabous et le déni font partie des m urs de ce continent et il est important de les briser afin que les personnes soient plus ouverts à l’information de sensibilisation. Au Cameroun, où nous nous rendrons au mois de juin prochain, nous souhaitons travailler en synergie avec les grands hôpitaux du pays. La remise de dons pour cancéreux se fera à Yaoundé, mais il concernera les nécessiteux des 10 régions du Cameroun. Après le Cameroun, nous nous rendrons au Gabon, puis au Benin.

En quoi consistent vos campagnes?
Pendant nos ateliers, nous informons, écoutons, orientons les personnes désireuses. Nous utilisons les supports de la Ligue contre le cancer de France et bien d’autres. Nous parlons aussi de la prothèse mammaire externe, échantillons à l’appui, afin de faire comprendre les raisons du port de celle-ci.

Avez-vous des partenaires qui vous accompagnent dans vos différentes actions ?
Pour l’instant non ! Mais nous sommes, bien sûr, à la recherche de partenaires. En attendant, certains accords sont en cours de négociations. Néanmoins nous travaillons déjà avec la Ligue contre le cancer qui fournit toute la documentation. Nous souhaiterions que nos futurs partenaires soient des donateurs (en documentation, prothèses mammaires, poches, cathéters, médicaments etc.). Grâce à tout ce matériel, nous espérons que le public sera plus à l’écoute et plus réceptif. Une fois l’étape de la sensibilisation franchie, selon les cas, nous leur conseillerons de sensibiliser également les uns et les autres à leur tour. Pour ceux dont le dépistage est découvert, nous conseillons de ne pas s’abandonner et, si possible, de suivre les traitements dans la mesure du possible, d’où l’importance des dons que l’association recevra.

Comment vous-y prenez-vous pour attirer le maximum de personnes vers votre association?
En France, nous organisons des soirées, des barbecues, des conférences-débats, participons à des tournois de football. Nous essayons d’être présents lors de manifestations organisées par la diaspora camerounaise et les consulats. Pour ceux des Camerounais du terroir, nous prendrons contact avec les responsables des plus grands hôpitaux du pays et des centres spécialisés, pour qu’ils nous viennent en aide dans le recensement des cancéreux. Nous comptons également sur les médias pour nous accompagner dans ce travail de sensibilisation.

Comment fonctionne votre association ?
Second Life est une association de bénévoles qui fonctionne grâce à vos dons et aux bénéfices de manifestations qu’elle organise, c’est pourquoi nous appelons toutes les âmes bienfaitrices à faire le geste qui sauve.

Quels sont vos objectifs?
Nos objectifs sont vastes. La plus importante est de faire des dons de poches, de prothèses, de médicaments, de cathéters aux malades, faciliter l’accès aux soins avec la création d’une maison médicale à Yaoundé, la ville qui m’a vu naitre. Nous pourrons, en fonction de nos moyens, construire aussi des maisons médicales dans d’autres villes africaines. Prévention, sensibilisation, dépistage encore et toujours. D’où notre devise : « Second Life ensemble pour la lutte contre le cancer. »

Carole Keyanfe, la promotrice de l’association « Second life »
Journalducameroun.com)/n