SNJC: « la Commission de délivrance de la Carte de presse est illégitime »

Par SNJC, Syndicat national des journalistes du Cameroun

Par arrêté signé le 3 juillet 2015 par Monsieur Philémon Yang, Premier ministre, chef du gouvernement, la Commission de Délivrance de la Carte de Presse (CDCP) a été sortie de dix années d’hibernation.

Monsieur Sévérin Tchounkeu, patron du groupe La Nouvelle Expression Sarl (Propriétaire du quotidien La Nouvelle Expression, Radio et Télévision Equinoxe) a été, contre toute attente, nommé à la présidence de cet important organe qui devait avoir, entre autres, pour mission l’assainissement de la profession du journalisme.

Le Syndicat National des Journalistes du Cameroun, SNJC, partage avec toute la grande famille de la presse camerounaise l’intérêt qu’il y a à assainir la profession. En effet depuis 2012 et lors de la célébration de la Journée Internationale de la Presse, tous les 3 mai, le SNJC n’a cessé de déclarer avec insistance que les organes de régulation et d’assainissement de la presse que sont le Conseil national de la communication et la Commission de délivrance de la carte de presse sont nécessaires.

Toutefois, il réitère l’illégitimité de ces deux organes parce que dans leur création et leur composition, par le gouvernement, ils ne sont pas conformes aux prescriptions de la Déclaration des devoirs et droits des journalistes contenues dans la Charte du journaliste de Munich adoptée en 1971 qui dispose que «(.) le journaliste n’accepte, en matière d’honneur professionnel, que la juridiction de ses pairs, à l’exclusion de toute ingérence gouvernementale ou autre».

La régulation et l’assainissement ne peuvent se faire que dans des organisations de pairs, constituées de manière paritaire des représentants élus des syndicats du secteur de la presse. C’est dire que le décret du Premier Ministre n°2002/2170 du 9 décembre 2002, portant création de la Commission de la délivrance de la carte de presse et le décret présidentiel n°2012/038 du 23 janvier 2012 portant réorganisation du CNC et qui en fait, désormais, un organe de régulation et de consultation doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, placé auprès du Premier ministre, chef du gouvernement, sont à plusieurs égards en violation des règles qui encadrent les missions qui sont les siennes. Les dérives du Conseil National de la Communication (CNC) que nous ne cessons de dénoncer en sont des illustrations.

Par conséquence, le SNJC n’a pas attendu la nomination du troisième président de la CDCP pour tirer la sonnette d’alarme pour la mise sur pied de manière consensuelle des organes de régulation et d’assainissement de la profession du journalisme au Cameroun. Malgré ces interpellations, le constat est clair que le gouvernement est déterminé à reprendre au forceps le pan de liberté de la presse et d’expression chèrement acquis. En témoigne, la déclaration faite par le Ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary lors de l’installation des membres de la CDCP le 6 juillet 2015. «.Vous devez à contrario, en exclure ceux qui, à un moment ou à un autre poseraient des actes ou afficheraient des comportements contraires à un tel mérite.» Et d’ajouter : «même s’il faut le faire sans anesthésier». Preuve que l’objectif du gouvernement n’est pas sain, mais liberticide.

La presse, dans son ensemble doit, comme un seul homme s’opposer à cette mission commandée. Car sa survie et sa crédibilité en dépendent.

A cet effet,
Le nouveau président du CDPC nommé unilatéralement par le gouvernement, revient d’un séjour en Europe et aux Etats-Unis. Nous osons croire qu’il a profité de ce voyage pour s’imprégner dans les différents pays qu’il a visité pour témoigner que la composition des pendants de l’organe dont il a désormais la charge au Cameroun est paritaire avec pour membres uniquement des représentants des syndicats du patronat et des employés des médias. Et au final, qu’il prenne la décision sage de démissionner de ce poste pour demander une recomposition qui respecte les normes déontologiques et éthiques en la matière.

Par ailleurs,
Le SNJC n’a cessé d’appeler à la vigilance des journalistes dans le processus de musellement à grande échelle qui est enclenché comme le prouve à suffisance la répression qui s’abat aujourd’hui sur certains médias à capitaux privés. Et pour la sale besogne, le gouvernement n’a trouvé mieux que de recruter dans la presse à capitaux privés.

Et pour cause,
Les indicateurs confirment les soupçons qu’a le SNJC sur le CNC et le CDCP. A savoir que ces organismes ne sont que des bras armés, au service de lobbies proches du pouvoir, qui préparent une éventuelle alternance au moment où on s’achemine allégrement vers la fin du septennat du président de la République.


Droits réservés)/n