Cameroun : les chrétiens entrent dans le triduum pascal

Ces trois jours qui précèdent la célébration du dimanche de Pâques le 09 avril 2023 sont riches en activités et en symbolique.

Dans trois jours, les chrétiens du Cameroun et du monde seront dans la joie de célébrer Pâques, la solennité de la résurrection de Jésus-Christ, fondement de leur foi. Ce 06 avril 2023, ils entrent dans le triduum pascal, pour observer les activités spirituelles prévues pour le jeudi saint, le vendredi saint le samedi saint.

 Ce jeudi est saint selon les chrétiens. Il renvoie au dernier repas que Jésus-Christ a pris avec ses apôtres avant son arrestation, son jugement, sa crucifixion, sa mort et sa mise au tombeau. L’église catholique célèbre ce jeudi la fête des prêtres en souvenir de l’institution de l’eucharistie faite par Jésus lors de son dernier repas avec les siens. Cette messe sera aussi marquée par le rituel du lavement des pieds.

Les fidèles catholiques vont ainsi célébrer la Cène du Seigneur, une messe au cours de laquelle le célébrant va dans la liturgie eucharistique, bénir les hosties et le vin, en les transformant en corps et en sang de Jésus. Cette communion sera partagée jeudi, vendredi et samedi matin où aucune consécration ne sera faite.

Vendredi saint renvoie à la passion du Christ, sa souffrance endurée sur le chemin du calvaire pour ceux qu’il aime jusqu’à sa mort sur la croix. Les fidèles habillés en rouge dominant, vont ainsi suivre cet itinéraire à travers le dernier chemin de croix et participer à la célébration de cette passion à travers les rites culturels, la lecture des saintes écritures et la vénération de la croix. Puis, le silence va s’emparer de l’église en signe de deuil.

Samedi Saint cette morosité se poursuit jusqu’en soirée, ponctuée dans certaines paroisses, par de petites activités comme la représentation scénique de la passion. Puis l’église va célébrer la vigile pascale ou veillée pascale. Cette messe qui se célèbre en blanc et or couleurs de gloire, comporte au moins quatre phases :

  • la liturgie de la lumière à travers la bénédiction du feu et du cierge pascal,
  • la liturgie de la parole à travers la proclamation de sept lectures tirées de l’ancien testament,  l’épître et l’évangile extraits du nouveau testament ; Ces textes relatent l’histoire du salut de l’humanité, avec en prime la sortie du peuple Israël de l’esclave en Egypte.
  • la liturgie baptismale avec la bénédiction des eaux du baptême, l’administration des sacrements de baptême et de la confirmation ;
  • la liturgie eucharistique avec la bénédiction des hosties et du vin et leur transformation en corps et sang du Christ.

Par ailleurs, dès vendredi saint, l’autel est dénudé, les croix sont recouvertes du linge de couleur violette, les tabernacles sont aussi vides. Tout revient à la normale samedi saint dans la nuit après la liturgie de la parole.

Cameroun-Carême et Ramadan : Maurice Kamto fait les yeux doux aux chrétiens et aux musulmans

Le  président national du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun formule des vœux à l’endroit des fidèles musulmans qui entament le jeûne et des chrétiens qui sont en carême.

A l’occasion du jeûne du Ramadan qui débute ce jeudi 23 mars 2023 et de la fin du Carême chrétien annoncé pour bientôt, Maurice Kamto s’exprime.

« Alors que nos compatriotes chrétiens abordent dans la prière et l’abstinence les deux dernières semaines de la période de carême, nos compatriotes musulmans entament, avec le reste du monde islamique, le jeûne de Ramadan dès demain, jeudi 23 mars 2023. C’est un rendez-vous de privation et de pénitence qui symbolise un rapprochement à Dieu et une revivification de la spiritualité que les musulmans se donnent à eux-mêmes chaque année », déclare l’homme politique.

Saisissant l’opportunité pour marquer sa présence et se rapprocher des églises et mosquées, l’opposant formule des souhaits à l’endroit des fidèles chrétiens et musulmans. « Je souhaite aux pénitents chrétiens de sortir de cette période plus riches d’amour, de fraternité et de miséricorde. J’adresse aux musulmans qui entrent dans le jeûne mes vœux d’un Ramadan paisible dans la foi et la protection du Tout-Puissant. Que Dieu bénisse notre pays ! », Conclut le président du MRC.

Tandis que les musulmans observent 30 jours de jeûnes à compter de ce jeudi, les chrétiens observent 40 jours de privation depuis le 22 février dernier. Ces derniers vont entrer dans la semaine sainte le 02 avril, jour qui marque le dimanche des Rameaux et de la passion. Puis suivront le tridum pascal et le dimanche de Pâques qui aura  lieu le 09 avril 2023.

Cameroun-christianisme : que représente le triduum pascal ?

Dès ce jeudi matin, les chrétiens du Cameroun sont dans le triduum pascal. Ce sont les trois jours qui précèdent la fête de Pâques. Ils sont chargés d’activités et de symbolique.

Dans trois jours, les chrétiens du Cameroun et du monde seront dans la joie de célébrer Pâques, la solennité de la résurrection de Jésus-Christ, fondement de leur foi. Ce 15 avril 2022, ils entrent dans le triduum pascal, pour observer les activités spirituelles prévues pour le jeudi saint, le vendredi saint le samedi saint.

 Ce jeudi est saint selon les chrétiens. Il renvoie au dernier repas que Jésus-Christ a pris avec ses apôtres avant son arrestation, son jugement, sa crucifixion, sa mort et sa mise au tombeau. L’église catholique célèbre ce jeudi la fête des prêtres en souvenir de l’institution de l’eucharistie faite par Jésus lors de son dernier repas avec les siens. Cette messe sera aussi marquée par le rituel du lavement des pieds.

Les catholiques vont ainsi célébrer la Cène du Seigneur, une messe au cours de laquelle le célébrant va dans la liturgie eucharistique, bénir les hosties et le vin, en les transformant en corps et en sang de Jésus.

Vendredi saint renvoie à la passion du Christ, sa souffrance endurée sur le chemin du calvaire pour ceux qu’il aime jusqu’à sa mort sur la croix. Les fidèles habillés en rouge dominant, vont ainsi suivre cet itinéraire à travers le dernier chemin de croix et participer à la célébration de cette passion à travers la lecture des saintes écritures et la vénération de la croix. Puis, le silence va s’emparer de l’église en signe de deuil.

Samedi Saint cette morosité se poursuit jusqu’en soirée, ponctuée dans certaines paroisses, par de petites activités comme la représentation scénique de la passion. Puis l’église va célébrer la vigile pascale ou veillée pascale. Cette messe qui se célèbre en blanc et or couleurs de gloire, comporte au moins quatre phases :

  • la liturgie de la lumière à travers la bénédiction du feu et du cierge pascal,
  • la liturgie de la parole à travers la proclamation de sept lectures tirées de l’ancien testament,  l’épître et l’évangile extraits du nouveau testament ; Ces textes relatent l’histoire du salut de l’humanité, avec en prime la sortie du peuple Israël de l’esclave en Egypte.
  • la liturgie baptismale avec la bénédiction des eaux du baptême, l’administration des sacrements de baptême et de la confirmation ;
  • la liturgie eucharistique avec la bénédiction des hosties et du vin et leur transformation en corps et sang du Christ.

Dès vendredi saint, l’autel est dénudé, les croix sont recouvertes du linge de couleur violette, les tabernacles sont aussi vides. Tout revient à la normale samedi saint dans la nuit après la liturgie de la parole.

L’évêque de Maroua-Mokolo parle de la situation des chrétiens à l’Extrême-Nord

Le diocèse, qui se trouve près de la frontière avec le Nigeria, est devenu le théâtre de terribles violences perpétrées par Boko Haram

«Merci d’avoir montré au monde le martyre chrétien sous toutes ses formes, même les moins connus comme le nôtre», déclare Mgr Bruno Ateba qui regrette le silence entourant le martyre des chrétiens de son pays.

L’évêque de Maroua-Mokolo, au Cameroun, a remercié l’Aide à l’Église en détresse-Italie (ACS) pour la manifestation organisée le 29 avril à la fontaine de Trevi à Rome, rapporte l’ACS. La fontaine de Trevi était éclairée en rouge en mémoire du sang versé par les chrétiens persécutés.

«Pour nous, l’attention de nos frères dans la foi occidentaux est essentielle, ainsi que leurs prières, a souligné Mgr Ateba. Je vous demande de prier pour nous, afin que, par la miséricorde de Dieu, la paix revienne enfin.»

L’évêque camerounais a décrit la situation difficile des chrétiens dans son diocèse qui se trouve près de la frontière avec le Nigeria et qui est devenu le théâtre de terribles violences perpétrées par la secte islamiste Boko Haram.

«Les djihadistes ont détruit et brûlé des villages entiers, a-t-il raconté. L’armée camerounaise a commencé à y faire face, mais les attaques des kamikazes sont une réalité quotidienne.»

Pourtant, ces événements violents sont souvent peu connus en Occident. «Lorsque se produisent des événements tragiques comme ceux de Paris ou de Bruxelles, le monde entier en parle, a dit l’évêque. Ici, des attaques similaires se produisent tous les jours, mais personne ne le sait.»

L’une des dernières attaques a touché une église à Nguetchewe où, en janvier dernier, les kamikazes se sont fait exploser pendant la messe, tuant trente fidèles. Dans la même paroisse, en novembre 2013, Boko Haram avait enlevé un prêtre français, le père Georges Vandenbeusch.

À ces attaques s’ajoutent des milliers de chrétiens déplacés qui ont fui leur maison par crainte de la violence. Seulement dans le diocèse de Maroua-Mokolo, cela représente plus de 55 000 personnes, selon Mgr Ateba.

«Et pourtant, le monde ne connaît pas notre souffrance, estime l’évêque, et nous nous sentons oubliés.»

Mgr Bruno Ateba, évêque de Maroua-Mokolo (Extrême-Nord Cameroun)
acn-aed-ca.org)/n

Cameroun: chrétiens et musulmans unis dans la lutte contre Boko Haram

Les deux communautés ont décidé de se relayer dans la garde pour se prémunir des attaques de la secte islamique. Cette initiative est soutenue par les autorités camerounaises

Des chrétiens et des musulmans expérimentent de nouvelles formes de prévention de lutte contre la secte terroriste nigériane Boko Haram dont les attaques se multiplient depuis quelque temps dans l’Extrême-nord du Cameroun.

Ces nouvelles formes de prévention de lutte délibérément mises en place par les chrétiens et les musulmans avec la bénédiction des autorités, consistent pour les uns et les autres, de monter la garde pendant la prière.

Plus concrètement, il s’agit pour les musulmans de monter la garde lorsque les musulmans sont dans la mosquée pendant la prière, et inversement pour les chrétiens lorsque les chrétiens sont dans les églises.

Une méthode déjà opérationnelle dans trois des six départements de l’Extrême-nord, en l’occurrence, le Logone et Chari, le Mayo Sava et le Mayo Tsanaga, où des fidèles des deux communautés se relaient dans la garde pour se prémunir des attaques terroristes.

« Nous avons constaté que ces mesures font des résultats », a déclaré le gouverneur de la région de l’Extrême-nord Midjiyawa Bakary, « puisqu’à plusieurs reprises, les groupes assurant la garde ont pu déjouer des attaques suicides ».

Raison pour laquelle « nous avons demandé que ces mesures soient étendus dans l’ensemble de la région, cela permettra sans doute de déjouer des attaques suicides qui constituent le nouveau mode opératoire de Boko Haram », a expliqué l’autorité administrative.


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Extrême-Nord: musulmans et chrétiens solidaires les uns des autres

Dimanche, les églises sont sécurisées par les musulmans, et vendredi les mosquées par les chrétiens pour prévenir les attaques des islamistes de Boko Haram

La multiplicité des attaques kamikazes dans les lieux de culte de l’Extrême-Nord, région du Cameroun frontalière avec le Nigéria, pousse autorités et populations à diversifier les formes de lutte.

« Nous avons une nouvelle technique qui consiste pour les chrétiens à sécuriser les mosquées quand les musulmans prient. Les dimanches, quand les chrétiens sont dans les lieux de culte, les musulmans à leur tour se relaient autour des églises pour détecter tout mouvement suspect », a déclaré le gouverneur de la région de l’Extrême-Nord, Midjiyawa Bakary.

L’objectif de ce nouveau plan d’action est de faire face au nombre croissant d’attaques kamikazes dans les mosquées et les églises ces derniers temps. Cette stratégie élaboré pour permettre aux fidèles de continuer leur prière normalement, est actuellement « en expérimentation dans quelques villages et sera étendue à toute la région », a ajouté Midjiyawa Bakary.

Cette nouvelle formule vient ainsi s’ajouter aux méthodes de sécurisation déjà existantes, à l’exemple des comités de vigilance dans les villages frontaliers avec le Nigeria. Les membres des comités de vigilance, surveillent les villages et collaborent avec les forces de sécurité camerounaises pour arrêter les islamistes nigérians de Boko Haram.

Munis de flèches et de machettes, hommes et femmes effectuent tous les jours des patrouilles pédestres dans les villages et arrêtent toute personne suspecte. Grâce à leur travail, ces membres des comités de vigilance ont déjà réussi à déjouer plusieurs tentatives d’attaques kamikazes. Depuis un an, des comités de vigilance avaient également été créés dans les mosquées de Yaoundé, la capitale politique du Cameroun.

« Etant donné que les habitués de chaque mosquée se connaissent, ils parviennent facilement à reconnaître les nouveaux visages, nos agents de renseignement les identifient aussitôt. On essaye de savoir qui sont ces nouveaux et d’où ils viennent. Si on a des doutes, on les dénonce à la police. De même pour tous ceux qui prêchent un islam radical », révélait il y a quelques mois à Cheick Ibrahim Moussa, le grand Imam de Yaoundé.

Un lieu de culte à l’Extrême-Nord du Cameroun.
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Centrafrique: La réconciliation par les médias?

Une radio intercommunautaire, radio Bê-Oko (« Un seul coeur », en sango) cherche à apaiser les tensions entre chrétiens et musulmans

Les locaux de la radio Bê-Oko (« Un seul coeur », en sango) sont misérables mais sa mission est immense: à Bambari, la station intercommunautaire cherche à apaiser les tensions entre chrétiens et musulmans, qui ont embrasé la Centrafrique. Le container hébergeant la structure est dévasté : murs déshabillés, troués d’un côté, néon diffusant une lumière trop crue, à la joie de dizaines d’insectes, deux grosses pierres pour caler un ventilateur. Un ordinateur, en panne, est recouvert d’un bout de tissu. « Il n’y a plus rien ici », remarque Philémon Tchang Peuty Palou, l’un des cinq journalistes présents dès les débuts de Bê-Oko en 2004, juste après avoir lancé à l’antenne un magazine sur la protection des enfants produit en langue nationale sango par une ONG.

En décembre 2012, la Séléka, ex-rébellion venue du nord-est du pays, part conquérir Bangui, où elle se maintiendra au pouvoir de mars 2013 à janvier 2014. Les villes que traversent ses hommes sont méthodiquement dévalisées. La radio ne fait pas exception. « La Séléka a tout emporté », juge Philémon, 33 ans. Et d’énumérer les lecteurs CD, DVD, les ordinateurs et divers systèmes nécessaires au bon fonctionnement de la station, aujourd’hui disparus.

L’une de ses collègues, coupable d’avoir dénoncé les pillards à leur chef, est sévèrement battue. « Elle a été évacuée à Bangui, elle souffre à présent de troubles mentaux », relate-t-il. Les voleurs se désintéressent toutefois de l’émetteur. Ce qui permet à Bê-Oko de sortir du silence en décembre dernier, grâce à l’aide d’ONG, alors qu’à Bambari le général Ali Darassa, respecté, a succédé à un responsable très craint, surnommé « Ben Laden », à la tête de la Séléka. La situation est alors catastrophique à Bangui. Les anti-balaka, milices à majorité chrétienne, tuent, blessent, volent la population, surtout musulmane, disant venger les chrétiens des sévices que leur a infligés l’ex-rébellion pro-musulmane.

Unique radio
« Un seul coeur », qui est à l’origine une radio catholique, devient multiconfessionnelle. « L’évêque a demandé à chaque leader religieux de prendre le micro. Pour éviter que ce qui se passait à Bangui ne se déroule ici », raconte l’abbé Firmin, qui en a la charge. Les trois communautés (catholiques, protestants et musulmans) achètent des bidons d’essence pour nourrir le groupe électrogène de Bê-Oko, dont le rôle est d’autant plus primordial qu’elle a le monopole des ondes dans la ville et ses environs.

La station publique Linga (« tam-tam ») a aussi été pillée. Aujourd’hui, « les Séléka vivent dedans », confie un journaliste. Et l’émetteur d’une autre station, Ndélé-Luka (« l’oiseau de la bonne nouvelle ») ne fonctionne plus. De 17H30 à 19H30, seule période de diffusion, tout le monde, à 70 km à la ronde, écoute donc Bê-Oko. « La radio est un facteur vraiment important (de pacification), estime le pasteur Ephrem, de l’Eglise évangélique locale. Ce qu’on a dit est rentré dans les crânes. Les musulmans en témoignent. Les jeunes chrétiens aussi. Et d’ajouter : « Des gens s’apprêtaient à se venger. Certains nous ont dit : +C’est grâce à vos conseils à la radio que je me suis retenu+. »

Après deux mois de légère amélioration à Bambari, la situation se dégrade à nouveau. Anti-balaka et Séléka se combattent à Grimari, à 80 km de la ville, où vivent 45.000 habitants, en majorité chrétiens. Les musulmans de la zone sont paniqués. Les rumeurs les plus folles se propagent. « Nous sommes privés de toute liberté. On ne se déplace plus, même au marché. C’est la panique à cause des anti-balaka », s’alarme l’imam de Bambari, Aboubacar Souleymane. A ses côtés, le président du comité islamique de la ville, pourtant pacifiste, prévient que les siens « se défendront par tous les moyens ». « Il y a des balaka (machettes) dans tous les magasins. On ira aussi en acheter », avertit-il. Les discours pacificateurs vont reprendre de plus belle sur Bê-Oko. Pour éviter le bain de sang que tous redoutent.

Philémon Tchang Peuty Palou, journaliste à la radio « Be-Oko » à Bambari le 19 avril 2014.
AFP/ Miguel Medina)/n

Lettre ouverte aux chrétiens du Cameroun

Par le père Ludovic Lado

Chers condisciples de Jésus Christ,
Depuis mon pays de mission qui renaît des cendres d’une sale crise politique, je n’ai pas pu résister à un appel intérieur à partager avec vous quelques unes de mes préoccupations sur la responsabilité sociale et politique du chrétien au Cameroun aujourd’hui. Je vous écris à vous spécifiquement parce que nous avons en commun un même modèle existentiel, un certain Jésus Christ, ce Juif dissident du 1er siècle de notre ère, dont la vie continue d’inspirer des millions de personnes dans le monde. Peu importent nos multiples dénominations ! Après tout Dieu ou Jésus n’est ni catholique, ni protestant, ni évangélique, ni pentecôtiste et je ne sais quoi. L’essentiel est notre référence commune à Jésus Christ qui nous propose un chemin de salut, c’est-à-dire de vie humaine accomplie.

Mais que signifie être chrétien, voire croyant, dans la société camerounaise d’aujourd’hui? A quoi nous servent les religions au Cameroun?
Les recoupements statistiques donnent à penser qu’au moins 60 % de Camerounais s’identifient comme chrétiens. Et si on y ajoute les musulmans et les adeptes de nos dignes religions ancestrales, on atteint au moins 95% de croyants dans la population camerounaise. Mais, et c’est là le paradoxe qui m’intrigue, comment peut-il y avoir tant de mal-vivre, de pauvreté, d’injustices et d’incivismes dans un pays que la nature a comblé de tant de richesses et où presque la totalité de la population est croyante? Croyez-moi, je connais assez bien les lumières et les ombres de la nature humaine pour ne pas rêver du paradis sur terre.

Mais à quoi nous servent toutes ces religions si elles ne nous rendent pas plus humains, si elles ne nous aident pas à bâtir un pays plus juste, plus fraternel et plus solidaire ? J’ai toujours pensé qu’une religion était un chemin d’humanisation divinisante. Les églises, les temples et les mosquées sont remplis les jours de culte mais dans la société c’est la jungle, c’est le règne du « chacun pour soi ». Plus l’offre religieuse croît plus la fraternité et la prospérité semblent foutre le camp. Comment concilions-nous tout cela avec le nom de Dieu? Comment expliquer l’ampleur de la paupérisation dans un pays où presque tout le monde a le nom de Dieu sur les lèvres ? En quel Dieu croyons-nous au juste ?

Où sont et que font les chrétiens au Cameroun?
Que de nouvelles églises ! Que de veillées de prières ! Que de campagnes d’évangélisation ! Quelle effervescence religieuse ! Mais la foi chez nous semble se réduire à une mécanique de formules et à une boulimie rituelle sans véritable incidence sur le vivre-ensemble, sur la relation à autrui. Pourtant, « Le jeûne qui me plaît, dit le Seigneur, n’est-ce pas ceci : faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs ? N’est-ce pas partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton semblable ? Alors ta lumière jaillira comme l’aurore. » (Is 58, 6-8). Dans ce pays qu’est le Cameroun, où faisons-nous tomber les chaînes injustes ? Où délions-nous le joug ? Où rendons-nous la liberté aux opprimés ? La pauvreté qui déshumanise les Camerounais n’épargne pas les Chrétiens.

Elle est décidément l’une des pires formes de violence, le premier ennemi des valeurs et de la dignité humaine. Si nous avons reçu l’Esprit Saint, comme nous le prétendons, où sont donc nos saintes uvres dans la cité? Jésus a demandé à ses disciples d’être la « lumière du monde » (Mt 4,14) mais nous sommes les ténèbres du Cameroun. Il a béatifié les « persécutés pour la justice » (Mt 5, 10) mais c’est nous qui persécutons par l’injustice. Il nous a demandé d’aimer et de servir sans discrimination (Mt 20, 28), non seulement nous nous servons mais nous asservissons notre prochain. En quel Dieu croyons-nous en réalité ? En ce Dieu défini par la Bible comme Amour et Vie ? A qui ressemblons-nous au juste ? A Jésus Christ qui a dit : « Je suis venu pour que les hommes aient la vie et l’aient en abondance » (Jn 10, 10) ? Quiconque sert un système injuste ne peut être disciple de Jésus Christ, parce qu’il sert les forces de la mort. Dieu est la Vie ! La foi en Dieu n’est rien d’autre que la foi en la Vie qu’on s’engage ici bas à promouvoir en soi et en l’autre.

Pensez-vous qu’il est sensé de demander à Dieu, comme nous le faisons dans nos multiples prières, d’arranger notre vie à nous alors qu’on écrase celle des autres par l’injustice? Je ne le pense pas ! La vie éternelle à laquelle nous aspirons n’a de sens que si elle est le couronnement d’une vie passée sur terre au service de la vie en soi et en l’autre. Encore une fois, je ne rêve pas du paradis sur terre, mais la réalité est que les fils de ténèbres semblent avoir étouffé les fils de lumière dans notre pays. C’est pour cela que le fruit de notre vivre-ensemble n’est pas la justice ou encore l’épanouissement de la vie humaine.

Jésus n’était pas un politicien mais n’oublions pas que c’est à cause de son opposition aux servitudes religieuses et sociales de son temps, de sa défense inconditionnelle de la dignité de tout être humain qu’il a été rejeté et crucifié par les fonctionnaires du sacré et les politiciens de son temps. Cela ne vous étonne-t-il pas qu’avec un tel maître nous soyons si tranquilles dans un pays comme le nôtre rongé par le mal-être? Nous baignons dans un christianisme individualiste tellement centré sur la consommation rituelle pour des besoins personnels qu’il ne constitue plus aucun danger pour les structures qui secrètent l’injustice et la mort. On en vient même à commercialiser le « sacré » aux chercheurs d’emploi, de conjoint, d’enfant, de richesses, etc., tout cela au nom de Jésus Christ. Ce christianisme fétichiste que la pauvreté et son lot de misères sociales font fleurir chez nous n’est pas celui de Jésus Christ ! D’ailleurs nous dit-il : « Ce n’est pas en me disant : « Seigneur, Seigneur ! » qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux. Ce jour-là, beaucoup me diront : « Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en ton nom que nous avons prophétisé, en ton nom que nous avons expulsé les démons, en ton nom que nous avons fait beaucoup de miracles ? » Alors je leur déclarerai : « Je ne vous ai jamais connus. Écartez-vous de moi, vous qui commettez le mal ! » » (Mt 7, 21-23). En réalité, la foi chrétienne est un chemin d’élévation mystique qui libère progressivement en l’homme les forces de l’amour, mais que malheureusement le fonctionnariat du sacré a progressivement émasculée, condamnant ainsi la plupart des chrétiens au « kwashiorkor » spirituel. Le peuple de Dieu se meurt dans les poubelles spirituelles faute de mystagogues, c’est-à-dire de vrais guides initiatiques formés à l’école de Jésus Christ.

Les chrétiens doivent se réveiller au Cameroun et reprendre le flambeau du Maître, celui de la dissidence ! Le christianisme tranquille et sans risques n’est pas celui de Jésus Christ. Un vrai chrétien est un rebelle par essence, parce qu’il ne supporte pas qu’un être humain soit piétiné. La plupart de nos problèmes sociaux sont engendrés par la mauvaise gouvernance qui relève des injustices structurelles. Dieu n’y est pour rien ! Laissons Dieu tranquille et assumons nos responsabilités. Il nous en a donnés les moyens. Où sont et que font les chrétiens sur le champ politique au Cameroun?
Au lieu de courir après les miracles, les chrétiens doivent prendre le risque de subvertir les forces de la mort de leur temps par un engagement responsable au service de la justice et de la paix dans tous les domaines de la vie sociale, y compris la vie politique. Jésus l’a fait et en a payé le prix. Un christianisme conformiste n’est pas celui de Jésus Christ et seuls les hommes libres peuvent être vraiment ses disciples. Beaucoup sont baptisés mais très peu sont chrétiens parce que très peu sont libres. « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés. » (Lc 4, 18). Voilà l’Esprit qui habitait et guidait Jésus, ce maître ambulant qui n’avait même pas où reposer sa tête (Mt8, 20). Est-ce le même esprit qui nous habite, nous qui prétendons être ses disciples aujourd’hui au Cameroun? Que Dieu bénisse le Cameroun !

Père Ludovic Lado
Journalducameroun.com)/n