Michel Thierry Atangana s’invite dans l’affaire Lydienne Eyoum

Le Franco-camerounais, libéré récemment sur une grâce présidentielle, a mis en place un comité de soutien pour l’avocate camerounaise incarcérée à Kondengui

Michel Thierry Atangana, libéré le 24 février 2014 suite à un décret présidentiel du 18 du même mois portant commutation et remise de peine d’une certaine catégorie de prisonniers, a lancé hier à Paris le comité de soutien à Me Lydienne Eyoum. Le comité de soutien est d’ores et déjà composé de Maîtres Christian Charrière-Bournazel et Caroline Wasserman, avocats de Lydienne Yen Eyoum en France ; Michel Thierry Atangana lui-même, libéré après avoir passé 17 ans d’emprisonnement au Cameroun ; Dominique Sopo, ancien président de Sos Racisme, celui-là même qui avait aidé à la création du comité de soutien de Michel Thierry Atangana. Le comité de soutien compte à brève échéance déposer une requête à l’Organisation des Nations Unies au moment où l’accusée le voudra.

L’avocate Lydienne Eyoum fait l’objet de poursuites judiciaires depuis 2010. Suite à une affaire conduite pour l’Etat du Cameroun, elle est accusée d’avoir gardé par devers elle plus d’un milliard de F CFA d’une somme totale de 2,155 milliards de F CFA reçue de la Banque des Etats de l’Afrique centrale et destinée au Trésor public. Elle se dit « non coupable ». Poursuivie en coaction avec cinq autres accusés dont Polycarpe Abah Abah, ex-ministre de l’Economie et des Finances, Lydienne Eyoum sollicite, depuis décembre 2013, l’arrêt des poursuites à son encontre afin de négocier avec l’accusation.

Dans une interview accordée à Radio France internationale (Rfi), le 5 mars 2014, Michel Thierry Atangana présentait Lydienne Yen Eyoum comme une avocate « franco-camerounaise » (comme lui, ndlr). Il eut à mettre une emphase particulière sur la situation de l’avocate : « Les otages, il faut en parler. Les prisonniers, il faut en parler. Lydienne Eyoum, il faut en parler. Cette femme souffre énormément, il faut en parler tout le temps », s’était-il- exprimé.

Contrairement à Michel Thierry Atangana qui a passé sa réclusion dans une cellule du Secrétariat d’Etat à la défense (Sed) qu’il a décrit comme une cave où il n’y avait pas de lumière à son arrivée, Lydienne Yen Eyoum est détenue à la prison centrale de Yaoundé à Kondengui. L’avocate de Lydienne Eyoum en France, Caroline Wassermann, décrit quant à elle Kondengui, « avec 800 places pour 4 000 détenus [comme] une prison très surpeuplée. Les détenus sont sous-alimentés. J’espère qu’elle va pouvoir sortir de cet enfer le plus vite possible ».

Michel Thierry Atangana libéré, on se rend compte que la grâce présidentielle du 18 février 2014 semble avoir ouvert la boite de pandore pour de nombreux autres détenus dont les soutiens comptent sur la pression extérieure. Kofale Kale, l’un des avocats de l’ancien Secrétaire général de la présidence de la République Marafa Hamidou Yaya, s’est récemment félicité du rapport 2013 du département d’Etat des Etats-Unis sur les droits de l’homme au Cameroun. Ce rapport considère Marafa Hamidou Yaya comme un prisonnier politique. Michel Thierry Atangana a reconnu lui-même avoir bénéficié de pressions de la France sur le Cameroun pour sa mise en liberté.

Lydienne Yen Eyoum Loyse
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Un minimum de décence pour la liberté retrouvée par Atangana et les autres!

Joël Didier Engo

Souvent des connaissances et interlocuteurs Camerounais ont pris l’habitude de me demander, je cite: « »Dis moi un peu, pourquoi tu soutiens tant Atangana? Penses-tu vraiment qu’il est innocent. Nous ne pouvons accepter qu’on est innocent simplement parce qu’on est Français..». Ainsi de suite…

Hormis celles et ceux qui m’affublent d’injures à répétition dans les sites et forums camerounais, ou qui tiennent absolument à faire de moi « un fils de » (que je n’ai en réalité jamais été, ni revendiqué, au regard ma trajectoire personnelle), je refuse simplement d’être un défenseur des droits humains à géométrie variable dont l’indice serait la proximité familiale, l’appartenance à un sérail politique, ou le lien avec la citoyenneté des personnes concernées.

Là réside probablement ce qui nous différencie tant, les Camerounais qui se prétendent d’ authentique patriotes et moi, dans le respect mutuel et la parfaite liberté des opinions bien-sûr.

J’ai soutenu Thierry Michel Atangana au sein de son comité de soutien dès lors que ses proches me l’ont expressément demandé, et que j’ai pu rentrer en possession de l’ensemble des éléments constituant son dossier d’accusation au Cameroun. Il n’est plus besoin d’insister sur l’étonnante vacuité de celui-ci après toutes les calomnies et rumeurs qui ont pu être répandues sur sa personne par la propagande locale.

Et s’il est précisément un drame dans ce pays, c’est que nombre des ses ressortissants ne lisent plus et se contentent de véhiculer des ragots sur les personnes, dès lors que ces dernières leur ont été soigneusement désignées à la vindicte.

J’ai soutenu la libération d’Atangana, comme je continuerai de m’enquérir des cas d’injustices flagrantes dont sont victimes d’autres compatriotes Camerounais, à l’instar de Dieudonné Enoh Meyomesse, Paul Eric Kingue, les femmes, les enfants, les homosexuels et tant d’autres encore…en collaboration notamment avec le Comité Citoyen pour la Libération des Prisonniers Politiques au Cameroun (CCL-LIBERATION) déjà très investi sur ces causes bien avant celui que j’ai rejoint en mars 2013 en France – parce que quand on s’insurge et combat l’arbitraire on ne trie pas parmi ses victimes.

Peut-être que certains auront encore et toujours des difficultés à l’entendre, surtout à le comprendre – du fait notamment d’un indéniable formatage tribal et totalitaire des esprits au Cameroun- mais l’homme libre que je suis n’a sur ce plan le moindre état d’âme. J’ai soutenu Thierry Michel Atangana jusqu’à sa libération effective, je n’en tire (contrairement à d’autres) aucune gloire personnelle, parce qu’il serait indécent de « triompher » contre un pays, mon pays (le Cameroun), dont je suis aussi un ressortissant, et pour lequel je ne peux me réjouir quand il végète dans les profondeurs de l’obscurantisme politique.

L’homme Thierry Michel Atangana est enfin libre de ses mouvements auprès des siens en France, après 17 années de séquestration au Cameroun. Ayons la décence de le laisser se reconstruire, sans indéfiniment ternir sa réputation, ou accuser une puissance amie (la France) qui ne pouvait se résoudre à l’idée qu’un des siens croupisse dans un trou à rats du Secrétariat d’État à la Défense (SED) du Cameroun, au nom d’un simulacre de campagne nationale de lutte contre la corruption à tête chercheuse, communément appelé «Opération Épervier».

Dieu seul sait si le Cameroun a bien d’autres défis à relever aujourd’hui que cette obsession malsaine sur la modeste personne de Thierry Michel Atangana. Relevons-les ensemble avec la France et d’autres, sans en permanence rechercher des boucs émissaires (Atangana, France, ONU, Occident…), qui nous aident surtout à occulter tous ces fléaux d’ordre économique et social (corruption endémique, mauvaise gouvernance, sous-scolarisation, manque d’infrastructures, mauvaise répartition des richesses, verrouillage institutionnel, faiblesse des investissements directs étrangers…) précisément ceux-là mêmes – investissements directs étrangers – que Thierry Michel Atangana a eu la faiblesse ou la naïveté de penser qu’il pouvait nous aider à attirer comme administrateur financier après son retour au Cameroun en 1992. Il choisira désormais seul et en homme libre le nouveau sens à donner à sa vie, puis à sa carrière.

Michel Thierry Atangana, à Paris, le 28 février 2014
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