Cameroun : l’ex-Mindef Alain Mebe Ngo’o accuse le parquet de «criminalité judiciaire»

Alors que les juges lui posaient des questions au terme de son interrogatoire devant le Tribunal criminel spécial, le célèbre accusé a profité de l’occasion pour réitérer que son procès ne vise qu’à l’éliminer à travers «l’instrumentalisation» du ministère public.

Les faits sont rapportés par Kalara. Le grand oral de Edgar Alain Mebe Ngo’o s’est enfin achevé devant le Tribunal criminel spécial (TCS) avec les questions des juges mercredi dernier, 26 janvier. Jusqu’au bout, l’ex-ministre délégué à la Défense (Mindef) a profité de son dernier temps de parole pour mitrailler davantage l’accusation, comme depuis huit mois, au sujet des incriminations mises à sa charge.

Il soutient mordicus qu’il est victime de ce qu’il qualifie de «procès kafkaïen», de «criminalité judiciaire» menée par le parquet et le juge d’instruction, qu’il dit «instrumentalisés». Dans ses questions, le tribunal a d’abord demandé à l’ex-ministre de faire «quelques clarifications» à propos de «l’exclusivité» qu’il avait accordée à Limousine Prestige Service.

Une entreprise dont son épouse Bernadette est promotrice, dans l’attribution de certains marchés durant ses six ans passés à la tête du Mindef entre 2009 et 2015. Les marchés en question portaient sur la location des tentes, des chapiteaux, du matériel de cuisine. En fait, ce volet du procès concerne la supposée infraction de «prise d’intérêt dans un acte», dont la peine maximale encourue est de cinq ans de prison ferme.

En effet, lors de son audition par les différentes parties au procès, M. Mebe Ngo’o avait justifié l’exclusivité évoquée en parlant de « raisons sécuritaires » à cause des « menées terroristes »  de Boko Haram. «  Au regard de toutes les expertises que vous aviez à votre disposition, de tout ce qui se passait avant vous, fait observer le tribunal, était-il possible de procéder autrement. Est-ce que vous n’avez pas pensé à un conflit d’intérêt en votre qualité d’ordonnateur ? »

Conflits d’intérêts

« Je voudrais dire, a réagi M. Mebe Ngo’o que le climat sécuritaire qui avait prévalu de 2009 à 2015, pendant que j’étais aux responsabilités, était pratiquement sans précédent par rapport à cette menace. Boko Haram, qui est né au Nigeria,  a fini par gagner le Cameroun. Ça  a coïncidé avec ma nomination au Mindef. Est-ce que je pouvais procéder autrement, on peut toujours procéder autrement, mais c’est difficile. Les mesures qui sont prises participent d’un problème de responsabilité personnelle du Mindef ».

Avant d’ajouter : « S’agissant du conflit d’intérêts, je l’ai dit au moment de mon (témoignage), je n’appréhende pas les choses sur cet angle, mon souci était de faire en sorte qu’aucun risque ne soit encouru dans l’organisation des cérémonies de services militaires. Vous avez parlé tantôt  de ma qualité d’ordonnateur, ce n’est pas en cette qualité que je me suis investi, je voyais plutôt ma responsabilité dans l’organisation du service militaire. Je voudrais enfin dire que dans les opérations de sécurité, comme c’était le cas, moins il y a d’interventions, mieux ça vaut. »

Le tribunal a relancé l’accusé en insistant sur le point de l’expertise à sa disposition, mais l’ex-ministre a réitéré ses précédentes explications. Le tribunal s’est ensuite penché sur le matériel militaire au centre du procès. Dans ce dossier, tout part d’une ligne de crédit d’un montant d’environ 196 milliards de F accordée par la banque publique chinoise Eximbank au Cameroun.

Le 11 janvier 2011, M. Mebe Ngo’o avait signé un mémorandum d’entente avec la société d’État chinois Polytechnology Inc, dans lequel le Cameroun exprimait ses besoins en matériel militaire (7 hélicoptères de combat, 6 patrouilleurs marins, chars etc). Trois mois plus tard, le 7 avril, il paraphera un contrat commercial d’une durée de 10 ans (jusqu’en 2022) avec la même société portant sur l’acquisition d’effets militaires.

196 milliards de F cfa ont été détournés

Lorsque les matériels sollicités sont livrés au Cameroun, Eximbank reverse directement les fonds à hauteur du montant de la commande dans le compte de Polytechnology ouvert dans ses livres à Pékin, et la Caisse Autonome d’Amortissement (CAA) assure le remboursement de la dette sur présentation préalable des procès-verbaux de réception du matériel par el Mindef.

Le problème, l’accusation considère que les 196 milliards de Franc ont été détournés, motif près de ce qu’il y a eu «diminution de quantité de matériel » entre celle exprimée dans le mémorandum d’entente et celle du contrat commercial déjà mentionné. « Comment se fait-il que malgré la diminution des qualités de matériels on ait quand même dépensé tout le crédit?», interroge le tribunal.

Pour M. Mebe Ngo’o le « détournement astronomique «  qu’on lui impute « relève de l’impossibilité, car le mémorandum d’entente n’était qu’un document indicatif », scellant la coopération entre la Chine et le Cameroun. Par contre, le «document de référence » est le contrat commercial et les quatre avenants, car, il englobe effectivement les « besoins réels » des différents corps de l’armée étudiés par un Comité d’experts camerounais composés d’agents publics émanant de diverses administrations.

De plus, ajoute-t-il, c’est le matériel querellé qui constitue aujourd’hui « le cœur névralgique » de notre dispositif de défense. « La CAA ne s’est plaint d’aucun braquage, indique le Mindef, il n’y a pas eu de braquage à Pékin. Le remboursement s’achève en 2022, mais moi je suis déjà accusé d’avoir détourné l’intégralité des fonds. Je le dirai en tant que besoin, c’est pour cela qu’on me maintient en prison ».

Les juges ont enfin voulu savoir pourquoi le budget du Mindef de 2015 n’a été consommé qu’à hauteur de 82%. M. Mebe Ngo’o a expliqué, documents à l’appui, que cette situation est due à la non attribution d’un marché de plus de 5 milliards de Francs. L’affaire est renvoyée les 14 et 15 février prochain pour l’interrogatoire de M. Maxime Mbangue, l’un des coaccusés de l’ancien Mindef.

Cameroun : il assassine son voisin à l’aide du couteau de cuisine

Après une bagarre où il venait d’être copieusement tabassé et humilié, le meurtrier a décidé d’en finir avec son adversaire en le poignardant. Devant la barre, il clame son innocence et soutient qu’il s’agissait de la légitime défense.

Le compte rendu d’audience est rapporté par le journal Kalara. Le 4 juin  2021, le Tribunal de grande instance (TGI) du Mfoundi a ouvert les débats, dans l’affaire qui oppose les ayants-droits d’Henri Kamdem à Laurent Jojo Menguele. Ce dernier, qui est en  détention provisoire à la prison de Yaoundé Kondengui depuis trois ans, est poursuivi pour avoir poignardé son voisin à l’aide d’un couteau de cuisine. Il était âgé de 19 ans, et élève en classe de 1ère à l’époque des faits. Au cours de l’enquête préliminaire, l’accusé avait reconnu les faits qui lui sont reprochés, mais est revenu sur ses aveux en cours de jugement.

En l’absence des parents d’Henri Kamdem à l’audience, le représentant du ministère public a déroulé l’accusation. Il ressort de l’ordonnance de renvoi dont le parquet a donné lecture de quelques extraits que le 21 juillet 2018, une altercation a opposé le défunt Kamdem à Menguele. Après une légère trêve, l’accusé est retourné à son domicile et est revenu avec un couteau de cuisine avec lequel il a poignardé à mort son adversaire avant de prendre la fuite.

C’est sa maman qui l’a conduit à la brigade de recherche le lendemain, où il a reconnu les faits tout en prétendant qu’il se vengeait contre la victime avec laquelle il avait livré une bagarre plutôt. Le certificat de genre de mort produit par le représentant               du ministère public indique que Kamdem Henri est décédé de suite d’une blessure provoquée par une arme blanche.

Pour sa défense, Laurent Jojo Menguele a déclaré que le samedi 21 juillet 2018, était le jour du premier anniversaire de son fils. C’est ainsi qu’il a organisé la fête des enfants en journée, et a prévu de recevoir ses amis dans la soirée dans une buvette. Il s’est rendu dans un supermarché et a acheté un gâteau, un petit couteau et quelques liqueurs. Vers 21 heures, alors qu’il se rendait au lieu de la fête, il a été interpellé par la victime.

«Il m’a dit mon petit, je t’appelle tu ne t’arrêtes pas ? Tu as grandi hein§ Puis il m’a donné un coup de poing au visage. En voulant me défendre, trois de ses amis se sont mêlés à la bagarre. L’un d’eux m’a latté au visage et j’ai perdu une dent. Par légitime défense, j’ai pris le couteau dont je devais me servir pour couper le gâteau d’anniversaire pour lancer à un de mes agresseurs, que je ne connaissais pas », a-t-il déclaré.

Préméditation de crime

 Poursuivant son témoignage, l’accusé à préciser d’une part, qu’il n’est pas retourné à son domicile pour aller chercher le couteau, comme veut le faire croire l’accusation et que le couteau   dont il est question était prévue pour couper le gâteau d’anniversaire, et non tuer. Il a ajouté que c’est le lendemain que sa maman l’a informé de la mort de Kamdem.

Le représentant du ministère public ne partage pas l’avis de l’accusé. Selon lui, Laurent Jojo Manguelé, qui était un adolescent à l’époque des faits, a voulu s’affirmer parce qu’il s’est senti frustré et humilié par le fait qu’on l’appelle « mon petit ». Ne pouvant pas faire le poids avec Henri Kamdem au cours de la bagarre qui les a opposés, « il lui fallait un outil pour équilibrer les forces. Il est retourné chez lui et est revenu avec un couteau. Tous l’ayant vu arriver, ils ont pris la fuite. L’accusé s’est mis à la poursuite de Kamdem et l’a poignardé à mort ».

Pour lui, la gravité de cette affaire repose sur l’intention et la préméditation de crime. Le fait que l’accusé soit retourné chez lui chercher le couteau de cuisine qui  a ôté la vie à un individu est le fondement de cette affaire.  L’avocat de Menguele a, quant à lui, essayé de convaincre le Tribunal de requalifier les faits d’assassinat en ceux de coup mortel. Il a ensuite plaidé les circonstances atténuantes de son client, qui est aujourd’hui âgé de 22 ans. Le verdict est attendu le 2 juillet 2021.

Criminalité à Bertoua: le gouverneur restreint la circulation des motos taxis

Après minuit, ils ne sont plus autorisés à circuler. En l’espace d’une semaine, plusieurs conducteurs de motos taxis auraient été assassinées dans la ville.

L’alerte est au rouge dans la région de l’Est Cameroun. «Suite à la montée en puissance de la criminalité dans les villes de Bertoua et de Mandjou, […], la circulation des motos taxis est interdite sur toute l’étendue de ces agglomérations de minuit à 6h», précise une décision du gouverneur de la région de l’Est et datée du 30 juillet.

La criminalité tisse sa toile dans cette zone du pays. Le président régional du Syndicat des motos taxis de l’Est le déclare sans ambages aux confrères de Cameroon Tribune «en l’espace d’une semaine, au moins cinq professionnels de notre corps de métier ont été tués par des malfrats».

Des meurtres sur des populations d’autres corporations sont également enregistrés régulièrement à Bertoua et à Mandjou dans la région de l’Est Cameroun.

Un univers d’insécurité qui a poussé des motos taximen a manifesté leur ras-le-bol le 19 juillet dernier. Ceci, en protestation de l’assassinat de l’un des leurs, la veille. Ils ont barricadé des voies d’accès, empêchant ainsi aux usagers de circuler.

Pour endiguer ce phénomène, le gouverneur de la région de l’Est, Grégoire Mvongo a convoqué des autorités administratives à une réunion afin de trouver des solutions à la criminalité montante. Assises qui auront accouché de la restriction de circulation des motos taxis.

Criminalité transnationale: l’Afrique Centrale en ordre de bataille

Les accords inter-régionaux entre l’Afrique Centrale et Orientale pour la lutte contre la criminalité étaient au centre du 25e sous-comité technique tenu mardi et mercredi à Yaoundé au Cameroun

Les travaux du 25e sous-comité des chefs de police d’Afrique Centrale (Ccpac) se sont tenus mardi 01 et mercredi 02 mars 2016 à Yaoundé, la capitale camerounaise. La cérémonie d’ouverture était présidée par le délégué général à la Sureté nationale (Dgsn), Martin Mbarga Nguélé, président du Ccpac.

Deux jours durant, des experts venus des pays membres de la Ccpac à savoir le Congo, le Gabon, le Tchad, la République démocratique du Congo, la République centrafricaine, la Guinnée équatoriale, et le Cameroun, ont débattu sur « des questions de coopération policière entre les pays d’Afrique Centrale et les pays d’Afrique de l’Ouest, afin de déboucher sur les accords de police à police entre ces deux sous-régions ». De ce sous-comité, il est attendu des solutions aux problèmes juridiques qui se posent dans la lutte contre la criminalité transfrontalière. Comme l’a souligné le Dgsn, les experts doivent émettre des propositions concrètes en vue de la planification et de l’organisation des opérations conjointes de police en Afrique Centrale.

Selon le secrétaire permanent du Ccpac, par ailleurs commissaire de police principal, Lawrence Tang Enow, « Cette assise statutaire du sous-comité technique établira une évaluation sécuritaire de la région ». Une des fortes préoccupations de cette 25e édition est la nécessité d’intensifier les échanges d’informations entre les pays membres en matière criminelle.

En outre, elle donnera les clés de mise en uvre des résolutions de la 16e session du Ccpac, dont les plus saillantes étaient l’accélération du processus de la libre circulation des citoyens de la zone Cemac et la création des cellules aéroportuaires anti-trafic, pour ce qui est de la lutte contre la criminalité.

Ces exigences et défis devraient pouvoir ralentir voire mettre fin à la recrudescence des maux comme le trafic de drogue, le trafic humain et des médicaments contrefaits et illicites, la cybercriminalité ou l’immigration clandestine.

Réunion des chefs de police d’Afrique Centrale.
Droits reservés)/n