Un migrant camerounais coincé en plein désert malien

Pour Paul, l’interminable route vers l’Europe s’est arrêtée à Kidal, dans le nord du Mali. Le Camerounais de 23 ans se retrouve coincé au carrefour des trafics transsahéliens

Réunis à Malte, une cinquantaine de pays européens et africains ont tenté, hier, de trouver une solution à la crise migratoire. Pour Paul, l’interminable route vers l’Europe s’est arrêtée à Kidal, dans le nord du Mali. Le Camerounais de 23 ans se retrouve coincé au carrefour des trafics transsahéliens.

Kidal. De notre correspondant
La voix est éraillée, le souffle court. Ses yeux sont rougis par la fatigue. Il est 23 h, Paul vient de terminer son service dans la gargote qui l’emploie sept jours sur sept, à Kidal, dans le nord du Mali. « Mon «grand frère», qui est le gérant ici, garde l’argent de mon salaire. Quand la somme sera réunie, il m’a promis un «visa payé» pour l’Europe », explique-t-il, convaincu.

« Un voyage qui ne se raconte pas… »
« En transit » depuis bientôt sept mois dans cette ville en plein désert, le jeune migrant clandestin dit avoir vécu « un voyage qui ne se raconte pas », depuis Douala, au Cameroun, son pays natal. 2 500 km de calvaire, sur les 5 000 km qui le séparait de l’Europe au départ.

Il évoque, dans la douleur, les conditions de son périple. « Nous sommes partis en janvier. J’avais réuni environ 1 000 € pour le voyage. Nous avons traversé, avec d’autres migrants, le Nigeria, puis le Niger, en car, jusqu’à Tamanrasset, en Algérie. À chaque frontière, à chaque barrage, nous avons dû laisser nos téléphones portables, nos habits, tous nos biens et notre argent à des policiers corrompus. »

Les voyages, souvent nocturnes, passent par les plaques tournantes du trafic d’êtres humains aux frontières. Manfé, au Cameroun. Kano, au Nigeria. Arlit, au Niger.

Confiés à des passeurs peu scrupuleux, Paul et ses compagnons de route découvrent alors l’enfer de la traversée du désert. « J’ai vu de nombreux cadavres, des hommes et des femmes morts de soif après avoir été abandonnés par leurs passeurs. Nous avons été systématiquement battus et brimés. Un ami a été tué à coups de poignard sous mes yeux. »

Ceux qui parviennent à échapper à la mort atterrissent dans le Sud algérien. Souvent, sans un sou. « Quand vous arrivez à Tamanrasset, vous intégrez le ghetto du pays dont vous êtes originaire. On vous confisque votre sac. Les chefs de ghetto proposent de travailler comme man uvre sur des chantiers pour gagner un peu d’argent et pouvoir repartir. On peut empocher jusqu’à 5 € par jour. »

Sur le conseil d’un autre migrant camerounais, Paul traverse la frontière et passe au Mali. Il échoue dans le bastion des rébellions touarègues, en plein conflit entre groupes armés et gouvernement malien. Le détenteur d’un « bac +2 en gestion à l’Essec de Douala » commence alors un travail de commis de cuisine et serveur.
[b « Systématiquement battus »

« Je pense qu’il me faut environ 2 300 € pour pouvoir rejoindre la côte méditerranéenne via l’Algérie, le Maroc ou la Libye, puis payer ma place sur un bateau pour faire la traversée », calcule le voyageur, qui admet ne pas savoir combien de temps il lui faudra pour réunir cette somme.

Malgré les risques de naufrage et de noyade qui planent sur les embarcations de fortune des migrants en Méditerranée, Paul veut poursuivre son chemin coûte que coûte. « Quand on est parti, on ne peut plus reculer. Même si on voit les gens mourir à la télévision. » Selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés, près de 3 500 migrants ont péri en tentant la traversée de la Méditerranée au cours de l’année 2014. Un record qui n’effraie pas le clandestin. « De toute manière, je suis piégé par ma propre vie. Si je reste au Cameroun, je suis piégé. Si je pars, je suis piégé. Je préfère échouer à l’extérieur que d’échouer dans mon pays. »

« Je suis piégé par ma propre vie »
Réussir en Europe n’est pas garanti. Paul le sait, il l’entend au téléphone avec des amis qui vivent déjà sur place. « Il y en a qui osent nous dire que ce n’est pas la peine d’essayer de venir. D’autres nous disent que chacun a sa chance. Certains gagnent de l’argent, certains vivent dans des conditions de vie misérables. Les plus chanceux font vivre leur famille restée au pays. »

L’un de ses grands frères a réussi à obtenir un visa en France, où il s’est marié et travaille comme informaticien. Il envoie de l’argent au Cameroun quand il y parvient. « Même si c’est 300 € par an, c’est déjà beaucoup. » Ceux qui n’ont pas eu cette chance ont fini « en prison ou dans des camps où la vie est terrible », lui dit-on.

Sur son téléphone, Paul montre les photos que son frère poste régulièrement sur Facebook. Il y pose sur les Champs-Élysées, dans un canapé confortable, en compagnie de ses enfants. Paul a les yeux qui brillent, « même si cette bonne situation est loin d’être à portée de main ».

Le retour au Cameroun, sans argent pour nourrir sa famille, serait synonyme de honte. « Je suis issu d’une famille nombreuse. On y vit avec moins d’un dollar par jour. Les jeunes comme moi doivent souvent arrêter leurs études pour trouver du travail. Mais du travail, il n’y en a pas. Il arrive souvent qu’on ne mange rien du tout. »

S’il parvient à surmonter les nombreuses épreuves qui l’attendent avant de toucher le sol européen, Paul espère « poursuivre des études de gestion. Ou trouver un boulot. N’importe lequel. Bref, essayer de construire ma vie. »

Paul dit avoir vécu «un voyage qui ne se raconte pas».
Droits réservés)/n

Carnet de voyage d’un camerounais aux Etats-unis: Arizona, ô soleil après la morosité présidentielle…

La vie est un long fleuve tranquille dans le désert de l’Arizona

L’Etat le plus chaud des Etats-Unis d’Amérique s’est totalement remis de la défaite de Mc Cain, fils du pays et non moins candidat républicain à la dernière élection présidentielle.

Beaux joueurs. Fair play. Mc Cain et l’Arizona le sont. Pour eux, la défaite à la dernière présidentielle américaine ne saurait être la fin du monde. De fait, l’acceptation du verdict des urnes ne se limite pas aux simples convenances de circonstance. Mc Cain a décidé de soutenir le président Barack Obama. L’Arizona en fait autant. Madame le Gouverneur de l’Etat a souvent été critiquée pour cela ; mais on estime qu’il faut se mettre avec le président Obama, explique Paul Senseman, directeur de la communication du Bureau du Gouverneur d’Arizona. Décision courageuse qui n’exempte pas pour autant la critique objective et constructive. Cas d’école avec le Nobel de la paix attribué en début du mois d’octobre au président Obama. Nous sommes surpris par l’attribution du prix Nobel de la paix à notre président car les candidatures sont enregistrées au mois de février. L’année dernière à cette période-là, le président Obama venait juste de prêter serment, entend on dans l’Arizona. Chacun y va de son argumentaire pour comprendre la décision du jury décernant le Nobel de la paix : Ils ont voulu récompenser la vie de famille inspirée par le président Obama. Ils ont voulu distinguer le changement de mentalités que le président Obama inspire, le nouveau regard et le changement d’attitude qu’il apporte. Le président Obama a aussi redoré l’image des Etats-Unis à l’étranger.

A l’observation, l’Arizona est un exemple de démocratie à découvrir. Bien que très républicain sur les bords (à 70%), l’Etat fédéré donne sa chance aux autres convictions politiques. En effet, la candidature à quelque élection locale n’a pas de couleur politique. L’élu se présente « intuitu personae » et bat campagne sur la base d’un programme propre. Linda Abbott est membre du conseil municipal de la banlieue de Phoenix baptisée Gilbert. L’enseignante de profession a décidé de revenir au conseil municipal après un break de plusieurs années. Au terme de mon deuxième mandat comme membre du conseil municipal, j’avais décidé de marquer un temps d’arrêt, afin de m’occuper de l’éducation de mes enfants. Maintenant qu’ils sont grands, je peux à nouveau me consacrer à la gestion de la cité. J’ai fait acte de candidature et les électeurs ont décidé de me renouveler leur confiance pour un mandat de deux ans, explique-t-elle.

Gouvernance municipale
Et Linda Abbott mérite bien la confiance des 220.000 habitants de Gilbert. En effet, la transparence et la participation citoyenne sont la règle dans la gestion de Gilbert Town. Les sessions du conseil municipal de Gilbert Town sont retransmises en direct sur les écrans de télévision. Le vote au sein du conseil municipal n’est pas secret. Par ailleurs, les journalistes sont autorisés à consulter les e-mails de chaque membre du conseil municipal. Ils sont également autorisés à prendre part à tout regroupement réunissant plus de deux membres dudit conseil. Gilbert informe en outre ses citoyens à travers tous les nouveaux moyens disponibles : site Internet, blogs, short message service (Sms), etc. Dans l’Arizona, la mairie recrute son manager de la ville et son président du tribunal. Le manager de la ville met en uvre les orientations du conseil municipal.


Journalducameroun.com)/n

Les décisions importantes et sensibles engageant la mairie sont prises au terme d’une large consultation populaire. La gestion de la crise financière dans les municipalités d’Arizona en est l’illustration parlante. Comment la ville de Phoenix a rééquilibré son budget suite à la chute (de l’ordre de 20%) de ses recettes? En organisant un débat public budgétaire impliquant près de 1500 personnes. Ce débat aura abouti à une réduction budgétaire de l’ordre de 30%, avec un recentrage des orientations édictées par le conseil municipal, en l’occurrence la diminution de 1100 emplois et la priorité accordée aux quartiers à faibles revenus. A Gilbert, la crise financière a entraîné un déficit budgétaire de 1,5 milliard de dollars. Le conseil municipal a proposé une augmentation des taxes. Mais, les populations n’y ont pas été favorables. Le conseil municipal a finalement opté pour une baisse de ses charges, avec à la clé des décisions douloureuses telles que la réduction des effectifs.

Le désert a un pays
L’Etat d’Arizona est réputé pour son soleil, qui attire généralement de nombreux touristes et surtout des personnes du troisième âge en quête d’une retraite tranquille. Les sites touristiques bâtissent également la réputation de cette partie des Etat-Unis d’Amérique, où le désert a un pays. Environ sept millions de touristes visitent l’Arizona chaque année. Le Grand Canyon compte certainement parmi les attractions incontournables de cet Etat. Lieu culte du tourisme, souvent décrit comme l’exposition géologique la plus grande de la terre, avec des dimensions stupéfiantes: le mélange de profondeur, largeur, et longueur qui rend le Grand Canyon unique. Nulle part ailleurs ne trouve-t-on une telle variété éblouissantes de couches rocheuses si colorées, de buttes si impressionnantes et de parois ombrées, révélées dans un tel remarquable abîme. Le Grand Canyon se trouve être la référence de comparaison de tous les autres canyons, peut-on lire dans The Guide, journal spécialisée sur le Grand Canyon.
La ville de Phoenix, à l’image de l’Etat d’Arizona, se singularise par son caractère cosmopolite. La capitale de l’Arizona, construite sur le site historique de la tribu amérindienne Hohokam, accueille presque toutes les régions du monde : européens (55%) ; amérindienne (14%) ; hispanique (26%) ; afro- américains (3%) ; last boys ou africains des pays pauvres. Cette diversité culturelle officielle dicte les politiques et l’organisation sociale dans l’Arizona. Les médias, par exemple, proposent des contenus adaptés à la demande des consommateurs. Il n’en saurait être autrement dans un système médiatique financé de moitié par les contributions de la population. KGZZ et KBAQ, deux radios publiques nationales du réseau Rio Salado College, diffusent -en plus des actualités – respectivement du jazz et de la musique classique. Sun Sounds est une station de radio publique appartenant au même réseau ; elle fait la lecture à l’antenne pour les malvoyants. « Ces différents programmes répondent à une forte demande exprimée par nos auditeurs », justifie-t-on à la division des affaires publiques du réseau Rio Salado College. Ce souci de proximité est en outre visible dans la presse écrite. Gilbert Republic est un encart hebdomadaire édité en dix – neuf versions. Chaque communauté de la localité de Gilbert a son encart. En addition, 7000 foyers reçoivent une gazette Your Town, éditée par la municipalité de Gilbert. Les offres télévisuelles, organisées en trois pools (capitale, Sud Est et Nord), ne sont pas en reste dans l’Arizona.

Thierry Ndong devant le Grand Canyon
Journalducameroun.com)/n

Défis
L’immigration clandestine est l’un des soucis de l’Arizona. La proximité du pays avec le Mexique provoque un afflux de « sans papiers latinos ». L’Etat fédéral et l’Etat d’Arizona mettent en uvre une politique des frontières évaluée annuellement à la somme de 500 millions de dollars. Ces efforts conjoints en matière de protection de la frontière produisent malheureusement des résultats mitigés. La population active en chômage n’arrête pas de pointer un doigt accusateur sur la « main d’ uvre latino » généralement bon marché. Les gestionnaires des cités d’Arizona, quant à eux, doivent faire face à des problèmes sociaux liés à l’immigration clandestine. A l’occasion, ils sponsorisent des organisations non gouvernementales spécialisées dans le développement communautaire. Chicanos por la Causa, Inc uvre en faveur des latinos, notamment dans quatre domaines : accès au logement social décent ; soutien à l’éducation ; développement économique ; soutien aux personnes âgées.

L’Etat d’Arizona est relativement jeune. Son centenaire en 2012 mettra en valeur les défis de son âge : urbanisation grandissante ; montée vertigineuse de la population jeune avec son corollaire. La problématique réside sur la mobilisation des financements dans un contexte de baisse drastique des recettes. Aujourd’hui, très peu pourvu en ressources naturelles, Arizona est frappé de plein fouet par la crise financière. L’Etat fédéré, dont la plus grande richesse est le cuivre, a perdu 20% de ses recettes en 2009. Entre autres conséquences, l’Etat fédéré a du mal à parachever son système de transport en commun. Il en sera de même pour l’assurance médicale, le logement social et l’éducation. Chiffre saisissant : 1,5 million de personnes bénéficient d’une assurance médicale sponsorisée par l’Etat fédéré sur une population estimée à six (6) millions. C’est dire . s’il faudra bronzer en travaillant ; d’aucuns diraient : joindre l’utile à l’agréable.

Le grand Canyon dans le desert de l’Arizona
Journalducameroun.com)/n