Cemac: la chute du prix de pétrole en débat à Brazzaville

Les ministres des Finances du Cameroun, Tchad, Gabon, Congo, de la Guinée équatoriale et de la Centrafrique évaluent, depuis lundi, la situation financière critique de leurs Etats

Une rencontre des ministres des Finances des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) se tient depuis lundi, 16 janvier 2017, à Brazzaville, dans le cadre de la Session inaugurale du Comité de pilotage du programme des réformes économiques et financières (PREF-Cemac).

Les travaux de ce Comité de pilotage du PREF-Cemac visent notamment à finaliser l’architecture institutionnelle du programme PREF-Cemac à travers l’adoption de ses actes juridiques résiduels.

Ils ambitionnent aussi de définir, et son armature technique basée sur cinq piliers dont les objectifs sont entre autres : le refus d’une nouvelle dévaluation du Franc CFA de la zone Cemac. Lequel passe par la mise en place d’un comité de reformes, composé de ministres experts des pays de zone.

« Le 23 décembre 2016, en présence du directeur général du Fond monétaire international(FMI) et du ministre français de l’économie et des finances, les chefs d’Etat ont clairement affirmé , leur volonté de renforcer la stabilité macroéconomique dans la zone CEMAC et leur refus d’un réajustement de la parité monétaire actuelle en définissant le cadre d’action qu’est le PREF-Cemac.» ,a rappelé Gilbert Ondongo, ministre congolais de l’Economie, président du Comité de pilotage du PREF-Cemac.

Il a aussi exhorté les membres de Copil, à travailler de façon à «donner suite aux attentes des peuples des pays de la Cemac qui ont besoin d’une bonne monnaie, sûre, viable, stable et librement convertible pour leur échanges et leur épargne.»

Les chefs d’Etat de la zone Cemac ont mis en place le programme PREF-Cemac le 30 juillet 2016 à Malabo en Guinée Equatoriale lors de leur session extraordinaire dont le but était de trouver les solutions appropriées à la conjoncture économique et financière en zone Cemac.

Les économies des six pays de la zone Cemac ne sont pas diversifiées et sont affectées par la chute du baril de pétrole, principale source de financement de leurs économies.

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Cémac: les leçons d’un sommet extraordinaire de chefs d’Etat

La reconnaissance d’Ali Bongo comme président du Gabon, l’influence de la France sur les décisions des pays et le prestige du Cameroun dans la zone sont quelques-unes des leçons dudit Sommet

Votre journal avait donc été bien informé, lui qui annonçait, une semaine avant l’évènement, la tenue d’un sommet des chefs d’Etat du Cameroun, du Congo, du Gabon, de la Guinée Equatoriale, de la République Centrafricaine et du Tchad, et l’objet de ce sommet. Cette rencontre de concertation de très haut niveau a donc eu lieu à Yaoundé. Que faut-il en retenir? Faut-il en rire ou en pleurer? Pour ceux qui, comme nous, ont la comprenette difficile, tirons quelques leçons essentielles.

1.- La leçon politique
Les chefs d’Etat de sous- région Afrique centrale ont donc fait le choix d’Ali Bongo Ondimba. En effet, s’il y avait encore un doute sur ce point, depuis ce sommet de Yaoundé, les choses sont claires: Jean Ping aura du mal à convaincre qu’il est le président de la République du Gabon. Celui qu’on connait, c’est Ali Bongo Ondimba qui a signé, pour le Gabon, les 21 résolutions du sommet extraordinaire.

2.- La leçon d’influence de la France et du Fmi
C’est confirmé, rien ne se fait de décisif en Afrique centrale sans la France et le Fmi qui, fait du hasard, est dirigé par Mme Christine Lagarde, une française, ancienne ministre de l’Economie et des finances. C’est dans les livres de la comptabilité de ce ministère que les comptes d’opérations des Etats d’une part, et de dépôt de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Béac) d’autre part, sont suivis. Le poids et l’influence de la France sont des contraintes réelles. Quant au Fonds monétaire international (Fmi), il est garant des droits de tirage spéciaux (DTS) qui constituent une partie des réserves de change des Etats. Son avis sur le niveau de ces DTS est déterminant. Les moyens d’action de la France et du Fmi leur donnent un vrai droit de véto dans le processus décisionnel de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale.

3.- La leçon de souveraineté
Elle est donnée par les six Chefs d’Etat qui ont décidé, souverainement croit-on, de suivre la majorité des experts qui ont déconseillé une dévaluation du franc Cfa. C’eût été la pire des choses à faire dans le contexte actuel. Mais, cela sera-t-il suffisant pour rassurer tout le monde? N’est-il pas temps de faire de la monnaie la variable essentielle de l’ajustement tant clamé? Le gouvernement de la Beac aura donc un rôle essentiel à jouer dans les prochains jours. Souhaitons qu’il décide, lui aussi, souverainement.

4.- la leçon de courage
Elle a été administrée par M. Pierre Moussa, Président de la Commission de la Cemac, à qui il revient désormais la lourde responsabilité de mettre en musique les 21 résolutions du sommet. Connaissant les réalités bureaucratiques de nos Etats et l’insuffisance des ressources dont la Cemac souffre, M. Moussa aura besoin de beaucoup de courage pour y arriver. Dieu merci, il semble en avoir, lui qui n’a pas hésité à dire que les mesures d’ajustements seront dures.

5- La leçon de prestige
Qui peut oser dire que le président Biya et le Cameroun n’ont pas tiré avantage du sommet, en terme de prestige? Au demeurant, c’est une retombée méritée. Il reste maintenant à faire le suivi des résolutions pour que le sommet extraordinaire de Yaoundé soit la base d’un nouveau départ de la sous région. La base d’une nouvelle forme de leadership camerounais. En effet, le Cameroun concentre tous les leaderships sous – régionaux: le leadership démographique, le leadership humain, le leadership économique et celui géostratégique. Pourra-t-il en faire des atouts ? Just wait and see.


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Cemac: la dévaluation du CFA, une solution à la crise économique

Selon l’économiste Dieudonné Essomba, les ajustements budgétaires décidés lors du sommet des chefs d’Etat, vendredi, ne saurait apporter des solutions aux problèmes économiques de la zone

La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) «ne peut pas échapper à la dévaluation» du Franc CFA, selon Dieudonné Essomba, économiste camerounais, qui estime que cela pourrait intervenir en 2017, à Alerte Info samedi.

«Si on ne dévalue pas, on sera obligé de diviser les salaires par deux, réduire les effectifs (fonction publique) ou se surendetter», a dit M. Essomba, ex-ingénieur principal de la statistique au ministère de l’Economie, au lendemain d’un sommet extraordinaire des Chefs d’Etats de la Cemac. Lequel s’est tenu au Palais de l’Unité de Yaoundé sur invitation du président Paul Biya.

«Quelque soit le cas, ce sera toujours la misère. La Cemac n’a pas la possibilité de réduire ses dépenses intérieures. Le Cameroun a déjà utilisé cette marge de man uvre depuis 1987», a-t-il déploré.

L’économiste affirme qu’à partir de 2017, la Cemac sera «dans l’incapacité de générer des devises pour supporter son développement», et que la zone communautaire «n’aura plus la capacité d’acheter à l’extérieur».

Le statisticien dénonce de «mauvaises politiques économiques, avec des systèmes qui ne produisent rien, trop vulnérables et qui dépendent du pétrole».

Sur les six pays de la Cemac, à l’exception de la Centrafrique, cinq, à savoir le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et Tchad sont des producteurs de pétrole.

Le pétrole contribue pour 9% au PIB du Cameroun, ce taux s’élève à 85% pour la Guinée équatoriale, 50% pour le Congo-Brazzaville, à près de 45% pour le Gabon et à environ 18% pour le Tchad. L’or noir représente a environ 70% des exportations de la Cemac et plus d’un tiers de ses recettes budgétaires, selon les chiffres officiels.

En 2015, la baisse persistante des prix du baril a plombé les économies en accentuant le déficit budgétaire régional estimé à environ 6,5% du produit intérieur brut (PIB). La zone a enregistré une réduction de 37,6% de ses ventes, à 9.125,6 milliards FCFA.

Une crise qui a favorisé un effritement rapide des réserves de change du Franc CFA au trésor français. Dans ces conditions, une dévaluation de la monnaie était de plus en plus évoquée pour faire face à ce marasme économique.

Vendredi, les Chefs d’Etat de la Cemac ont décidé de ne pas dévaluer le Franc CFA et s’engagent à poursuivre des «ajustements budgétaires nécessaires à un rééquilibrage maitrisé».

Une décision que dénonce Dieudonné Essomba, qui estime que ces «atermoiements» vont accentuer la crise économique dans l’espace communautaire.

«Plus on dévalue vite, plus on rétablit vite la situation», a-t-il conclu.


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Le Franc CFA célèbre les seize années de dévaluation

Aucune manifestation n’est prévue, de nombreux experts dénoncent la grosse supercherie des partenaires internationaux

Un chantage de la France?
Le 11 janvier 1994 à Dakar au Sénégal, les 14 pays de la zone franc ont accepté de dévaluer le CFA. Une mesure historique. Qui a touché huit pays d’Afrique de l’Ouest et six pays d’Afrique centrale rattachés depuis 1948 au Franc français par une parité fixe. La dévaluation, décidée sous la pression du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale et annoncée par la France, avait été présentée aux pays concernés, comme une solution parfaite pour sortir d’une situation économique jugée catastrophique. Le contexte du moment est en effet difficile. Les taux de croissance et le niveau de vie sont faibles, il y a une fuite massive des capitaux (les opérateurs économiques nationaux déposent leurs fonds en CFA dans les banques françaises au détriment des banques nationales), les termes de l’échange se sont détériorés. Le 2 août 1993, Paris a suspendu le change de billets de francs CFA. Un mois plus tard, les transferts bancaires ont été soumis à un contrôle préalable. Les pays africains se sont résignés. La dévaluation qu’ils se refusaient à effectuer depuis 1988 était devenue inévitable.

Une mesure pourtant présentée comme salutaire
C’est le Camerounais Antoine Ntsimi, alors ministre des finances à cette période, qui lira la déclaration. Les partisans de la dévaluation, la France en tête, disaient qu’elle aiderait à relancer la compétitivité des produits africains sur le marché international, réduire les déficits budgétaires, et permettre à la croissance de reprendre. Un début d’amélioration de la situation économique s’est fait ressentir. Il est certain que plusieurs filières d’exportation (café, cacao, coton) ont bénéficié en 1994 à la fois de la hausse conjoncturelle des cours mondiaux de ces produits et de la dévaluation du franc CFA. Ces filières ont aussi pendant un certain temps dégagé des excédents financiers qui ont davantage profité aux Etats plus qu’aux producteurs. Quant aux productions céréalières locales, elles ont vu leurs prix rester stables, leur progression en volume s’expliquant principalement par les conditions pluviométriques particulièrement favorables dont ont bénéficié la majeure partie des pays de la zone franc au cours de cette période-là.

Un bilan très mitigé
Mais aujourd’hui, personne n’est fier du bilan actuel de la dévaluation. Les dirigeants et hommes politiques des pays de la zone Franc habitués à utiliser toute situation favorable à des fin de propagande propre semblent tous vouloir oublier cette page de leur histoire et de leurs bilans politiques. Du jour au lendemain, les prix à la consommation sont passés du simple au double. L’inflation n’a plus jamais été maitrisée. La plupart des pays concernés sont devenus des pays très pauvres et très endettés. Le revenu par habitant a chuté. Pour le cas du Cameroun, 30% de la population vivent avec 1 dollars par jour, et jusqu’à 58% vivent avec un peu plus de Dollars par jour. Aujourd’hui, les experts s’interrogent sur le genre de partenariat que la France offre à ses «amis» africains.

Absence des mesures d’accompagnement
Les avantages de la dévaluation ne pourront provenir que de mesures d’accompagnement qui sont prises, tant par les Etats africains que par les bailleurs de fonds. Ces mesures doivent garantir la stabilisation de l’environnement économique et créer les conditions par une reprise de l’investissement intérieur. Dans ce nouveau contexte économique, existe-t-il des politiques de coopération originales? Des mesures d’annulation de dettes et de soutien aux budgets des Etats ont effectivement été prises, avec une intensité différente selon les pays africains. Des mesures sociales ont aussi été prises, mais d’une ampleur nettement moindre ; quant aux mesures d’accompagnement permettant de relancer l’investissement, de mettre en place des projets réellement novateurs, ils ne sont que très récents et portent sur des domaines qui ne profitent pas directement aux populations. Les besoins des populations sont énormes ; ne peuvent-ils être satisfaits par des productions locales qui sont maintenant protégées du fait de la dévaluation? A-t-on réellement cherché, dans les différents secteurs, toutes les opportunités d’activité? Autant de questions demeurées sans réponses.


La dévaluation, nouveau remède miracle du FMI pour l’Afrique

Face à la crise économique mondiale, le FMI a sorti sa nouvelle carte pour l’Afrique; il prescrit une autre dévaluation.

Alors que pendant longtemps les autorités africaines se sentaient à l’abri de ses effets, il est aujourd’hui de plus en plus admis que les perspectives de l’Afrique se sont fortement dégradées à cause de la crise financière mondiale. Selon les prévisions, la croissance économique de l’Afrique subsaharienne sera de 1,5 % en 2009 avant de remonter à un peu moins de 4 % en 2010, taux qui reste inférieur au niveau enregistré avant la crise. Ces prévisions impliquent une décélération prononcée de la croissance par rapport à 2008 et une forte révision à la baisse des prévisions publiées en octobre dernier. Il faudrait désormais s’attendre à une nette détérioration des positions budgétaires et extérieures jusqu’en 2010. Les pays exportateurs de pétrole et d’autres produits de base seront particulièrement touchés. Tant que les perspectives mondiales seront incertaines, la balance des risques restera orientée essentiellement à la baisse. Le FMI est donc monté au créneau pour faire le marketing des ses produits préfabriqués dont les résultats sont restés mitigés pour ce qui est par exemple du Cameroun.

Entre autre solutions proposées pour gérer la crise économique mondiale, le fond tout en invitant les pays donateurs à faire des efforts en vue de fournir une  »aide soutenue » à l’Afrique, recommande aux pays de cette région d’assouplir autant que possible leur politiques monétaires et laisser le taux de change s’adapter à la conjoncture externe. Il argumente du fait que la chute des prix des produits de base devrait donner une impulsion déflationniste qui pourrait permettre à certains pays d’assouplir leur politique monétaire. Dans les pays où les termes de l’échange se sont détériorés et où les flux de capitaux se tarissent, la monnaie devra se déprécier en termes réels. Pour le FMI, dans la conjoncture défavorable actuelle caractérisée par les effets d’engrenage de la dépression économique mondiale et l’aversion croissante des investisseurs au risque, l’assombrissement des perspectives de croissance économique dans toute la région consécutif à chute de la demande et des cours des produits de base et au tarissement des ressources extérieures, « tous les pays (de la région d’Afrique au Sud du Sahara) devront s’adapter au nouveau contexte extérieur ». Même s’il faut passer par une dévaluation de leur monnaie.

Les observateurs de la situation économique en Afrique y voient au mieux une campagne de marketing de la part du fonds dont les produits miracles n’intéressent presque plus personne, et au pire une volonté suspecte de l’institution de toujours vouloir maintenir les économies des pays Africains toujours enfoncés. Après plusieurs décennies d’ajustement structurelle, la plupart des pays bénéficiaires dont le Cameroun ont vu leurs économies en faillite au point de devoir se placer sous le couvert du régime de faillite international qu’on a techniquement appelé l’initiative Pays Pauvre Très Endetté( PPTE). Initiative que l’on a par ailleurs brandit comme un nouveau souffle pour l’Afrique et dont les effets pour ce qui est du Cameroun se font apparemment encore attendre, puisque le pays est incapable de lancer de vastes programmes sans le recours à l’aide extérieure. La première dévaluation du FCFA par exemple qu’on avait toujours présenté comme salvatrice n’a eu pour effet que de créer une inflation au plan interne, inflation que les rentrés de devises liées aux exportations n’ont pas su compenser.

Des experts économiques tels le camerounais Babissakana vont plus loin. Dans une lettre écrite à l’ancien patron du fonds Rodrigo de Rato, il relevait déjà le fait que si le FMI était un conseiller créateur de valeur pour le Cameroun, il aurait déjà recommandé à ses dirigeants économiques de ne plus solliciter le déblocage des tranches restantes d’un crédit qui est le générateur des conditionnalités sans fondement réel. Autrement dit le partenariat avec le FMI place les pays africains dans un état de perpétuel endettement. Ainsi pour ces techniciens financiers, si le bénéfice de l’aide du FMI est conditionné par une nouvelle dévaluation de la monnaie, les dirigeants des pays africains devraient se méfier d’un partenariat qui pourrait entrainer des troubles sociaux qu’aucun plan de réajustement de la communauté internationale ne pourrait contenir.


chriscarlaw.com)/n