Mali: Cheick Modibo Diarra, de la NASA à la Primature

Le monde entier le connait comme celui qui a envoyé la sonde Pathfinder sur Mars en 1997. Ce mathématicien devra faire preuve d’ingéniosité pour résoudre l’équation qui sortira son pays de l’ornière

De Nioro du Sahel où il vit le jour en 1952, aux Etats Unis où il s’est distingué par ses travaux, Cheick Modibo Diarra a eu un parcours exceptionnel. Son baccalauréat en poche en 1972, il part étudier les mathématiques et la physique à l’Université Pierre et Marie Curie à Paris, puis l’Ingénierie Aérospatiale aux États-Unis à Washington, où il obtiendra la nationalité américaine. C’est à la Howard University qu’il atterrit, grâce à une bourse d’études. En 1989, l’année où le monde basculait avec la chute du mur de Berlin, une rencontre bouleverse le destin de Cheick Modibo Diarra. Alors qu’il se destinait à une carrière d’enseignant, il rencontre deux chercheurs de la NASA qui lui proposent d’intégrer le laboratoire de propulsion des fusées, le fameux Jet Propulsion Laboratory. Quelques années plus tard, l’enfant de Ségou deviendra navigateur interplanétaire. Il travaille d’abord sur le projet d’envoi de la sonde Magellan dans l’espace, un univers qui l’a toujours fasciné. En juillet 1997, son heure de gloire est arrivée. Il conçoit et envoie une sonde qui atterrit sur Mars avec à son bord un robot capable de se mouvoir, de réaliser des analyses scientifiques et de prendre des photographies de la planète rouge. La mission Pathfinder est un succès, et c’est désormais une notoriété interplanétaire qu’acquiert Cheikh Modibo Diarra, devenu l’icône de tout un continent. Ses compatriotes maliens, notamment les jeunes, en sont fiers, même s’ils ne comprennent pas très bien ce qu’est un navigateur interplanétaire.

Engagement social.et politique
Après ses années au service de la NASA et des Etats-Unis, Cheikh Modibo Diarra se retourne vers son continent. Il y crée, en 1999, l’association Pathfinder Foundation pour l’Education et le développement, afin de susciter l’intérêt des jeunes, en particulier les filles, pour la science. A Bamako, il initie un laboratoire de recherche solaire. Cheikh Modibo s’envolera en 2006 vers Johannesburg pour y présider le département Afrique de Microsoft. Même s’il n’a qu’un rôle protocolaire et de représentation, il continue son combat pour réduire la fracture numérique et faire profiter le continent de toutes les avancées technologiques en promouvant de nombreuses initiatives sur le continent. Il est également Ambassadeur de bonne volonté de l’Organisation des Nations Unies pour la Science, l’Education et la Culture (UNESCO) depuis 1998. En 2011, ce père de trois enfants, marié à la fille de l’ex-président Moussa Traoré se lance en politique. Le 6 mars, avec la bénédiction de son beau-père, il porte sur les fonds baptismaux un nouveau parti, le Rassemblement pour le développement du Mali, (RPDM), dont il devient le président. Le RPDM ambitionne alors de construire un projet de société basé sur l’égalité des chances pour tous les citoyens. Ses dirigeants présentent leur nouvelle formation comme « un parti qui défend les intérêts du peuple, l’égalité des chances, l’ équité, la souveraineté de l’Etat et respectueux des droits de l’Homme ». Cheick Modibo Diarra annonce dans la foulée qu’il sera très probablement candidat à la présidentielle de 2012. «J’ai toujours fait de la politique. Au sens étymologique du mot, politique veut dire résoudre les problèmes de la Cité. Elle ne signifie pas aller faire des discours, courir de gauche à droite. Je pense que j’ai toujours participé à la résolution des problèmes de la Cité et continuerai à résoudre autant de problèmes que je peux », déclarait-il ce jour là.

La revanche du Général Moussa Traoré ?
Comme le stipule l’Accord Cadre du 6 Avril signé entre la junte et CEDEAO, CMD devra pourtant renoncer à son ambition présidentielle. Si l’on en croit les intentions de vote en sa faveur, il a sans doute fait le bon choix. Mais sera t’il à la hauteur de l’enjeu ?
La tâche ne sera sans doute pas facile pour ce Premier ministre « de consensus », pourtant nommé par le CNRDRE et le médiateur, sans que la classe politique et la société civile n’aient été consultées. Saura t’il s’imposer ? Aura t’il les coudées franches face aux militaires et au vieux renard politique qu’est Dioncounda Traoré ? Originaire de Ségou comme le capitaine Sanogo, chef de la junte, Cheick Modibo Diarra pourra aussi jouer de son lien de parenté avec Moussa Traoré, respecté par tous les militaires. Vingt ans après le coup d’état contre le Général dictateur, le capitaine Sanogo aura fait fuir son tombeur ATT, pour ensuite installer son gendre à la Primature. Certains appellent cela la revanche de l’histoire. Quant à l’attitude du peuple malien, elle dépendra sûrement de la capacité de l’homme de la Nasa, surtout connu dans les milieux informés, à poser des actes justes dès les premiers jours. Selon ses proches, il a toutes les qualités pour être « l’homme de la situation ». Son charisme, sa stature internationale et surtout sa connaissance des réseaux financiers internationaux, ainsi que « l’estime » dont il jouit auprès des Partenaires techniques et financiers devraient lui servir pour l’immense tâche qui l’attend. A commencer par celle de former un gouvernement d’union nationale.

Cheikh Modibo Diarra, nouveau Premier Ministre du Mali
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