Cameroun: Interview du Ministre de la Communication Issa Tchiroma Bakary

«Pour le recrutement des 25 000 jeunes, j’ai demandé 1000 postes à la communication pour combler les déficits»

Après avoir assisté à l’installation du chef de la station CRTV Adamaoua en compagnie du Directeur Général Hamadou Vamoulké le mardi 15 mars 2011, Issa Tchiroma a procédé à la visite des services déconcentrés de son département ministériel dans la région ainsi que tous les organes de presse : Agence régionale SOPECAM, CRTV Adamaoua, Radio Sawtu Linjiila, Radio Bonne nouvelle, Radio Annour et Radio Campus.

Quel est le bilan que vous faites de votre visite de travail de 48 heures dans l’Adamaoua?
Nous avons eu l’opportunité de visiter tous nos services. Avec beaucoup de bonheur, j’ai constaté que la CRTV ici à Ngaoundéré est équipée up to date. J’ai visité également tous nos autres services. Naturellement par ci par là, il y a des problèmes, les préoccupations des uns et des autres ont été portées à notre connaissance, mes collaborateurs et moi nous en avons pris bonne note. S’il faut dispenser des équipements, nous verrons dans quelle mesure nous le ferons. Il y a un besoin immense en personnels, même au niveau de la délégation régionale de la communication. A la faveur du recrutement de 25 000 jeunes fonctionnaires, je pense que, étant donné que je suis membre de la commission de supervision, je ferai en sorte qu’un bon quota soit alloué à la communication pour que les déficits qu’il y a dans les différents services soient comblés. Je voudrais également dire merci au lamido de Ngaoundéré qui nous accueilli, le gouverneur, moi-même et ma délégation. J’en étais très heureux, très flatté, le lamido a organisé une fantasia, vraiment, j’étais comblé. Vraiment merci à Sa Majesté le lamido de Ngaoundéré.

S’agissant du recrutement des 25 000 jeunes, quelles sont les mesures qui ont été prises pour éviter le parrainage des candidats ?
Le chef de l’Etat a donné des instructions précises, des instructions claires pour qu’il y ait équité dans le recrutement des 25 000 jeunes camerounais. Vous devez d’abord savoir deux choses. D’un, nous sommes un pays bilingue. De deux, nous avons dix régions. Dans chacune des dix régions, il y a une multiplicité de composantes ethniques et autres. Ce recrutement sera transparent, équitable, où les intérêts des uns et des autres seront pris en compte et préservés. Vous savez, il y a toujours des appréhensions et même des procès d’intention, mais au niveau de la commission de supervision comme du comité technique, le Premier Ministre, chef du gouvernement, a la responsabilité de faire en sorte qu’il y ait transparence, qu’il y ait équité dans le recrutement de ces 25 000 fonctionnaires. Donc, n’ayez pas de doute, tout se passera bien.

Combien votre département ministériel compte-t-il accueillir?
J’en ai demandé 1000 car le déficit est énorme. Nous avons formulé nos préoccupations au niveau de cette commission. Bien sûr, nous n’en n’aurons pas autant, parce qu’il y a l’éducation de base, les enseignements secondaires, l’université, la santé qui ont des besoins immenses et urgents. Vous savez, pendant vingt ans, l’Etat n’a pas été en mesure de recruter du simple fait de la crise économique terrible dans laquelle nous nous sommes retrouvés et pendant ce temps, il y a eu des fonctionnaires qui sont partis à la retraite et qui n’ont pas été remplacés. Mais il faut opérer une péréquation entre les besoins de l’Etat et la capacité du budget à absorber.

Monsieur le ministre de la communication, on constate que le chef de l’Etat multiplie les gestes vers la jeunesse, notamment avec la majoration de la prime à l’excellente telle qu’annoncée récemment par le Président de la République. En même temps, certains pensent que ce n’est qu’un coup de pied dans l’eau. Quel est votre avis?
Vous faites un procès d’intention au gouvernement et au chef de l’Etat. Il y a quelque temps, cela n’était pas possible en raison des difficultés économiques. S’il est une chose à laquelle le Président de la République tient le plus aujourd’hui, c’est la valorisation du savoir. Parce que comme vous le savez, il n’y a pas de développement sans le savoir et tout développement qui ne repose pas sur le savoir est un développement précaire. Le chef de l’Etat en prenant toutes ces mesures aujourd’hui, en mettant à la disposition des universités des primes pour encourager l’excellence, je vous assure que c’est en toute connaissance de cause et en toute bonne foi. Vous dites que c’est un coup de pied dans l’eau, loin s’en faut ! Il faut plutôt accepter cela, peut-être en demandant un peu plus et au prorata de la capacité du budget, je suis persuadé que le chef de l’Etat ira crescendo dans l’augmentation de cette prime d’excellence.

Pour finir, Monsieur le ministre, quel message portez-vous à l’endroit de la jeunesse en général et de nos lecteurs en particulier?
D’abord à l’endroit des étudiants, je dis une chose. C’est vous qui gouvernez virtuellement déjà le Cameroun, mais demain, vous serez les gouverneurs du Cameroun. C’est vous qui allez prendre la relève de l’administration et de la gestion de ce pays à tous les niveaux. Ce que je demande à l’étudiant aujourd’hui, c’est de focaliser son attention sur l’acquisition du savoir. Ce sera votre contribution dans la construction de cette nation. N’acceptez pas des divertissements qui viennent d’ailleurs. Vous savez, il y a des prophètes du malheur, les oiseaux de mauvais augure qui viennent vers vous pour vous distraire. Mais nos compatriotes de la diaspora, ils évoluent dans un environnement un peu au-dessus de ce que nous avons ici. Alors si vous écoutez leurs messages au lieu de concentrer votre attention dans l’acquisition du savoir pendant qu’ils sont en train de capitaliser, un moment viendra où il y aura des emplois pour lesquels vous n’êtes pas préparés, simplement parce qu’au lieu d’étudier, vous aurez écouté les divertissements, les déviances qui viennent de l’extérieur. Donc, ce que je demande à notre jeunesse, à vous qui êtes restés ici, par la magie d’Internet, vous avez la capacité d’être au même niveau que les autres. Vous qui allez gouverner le Cameroun, on a besoin de vous et le chef de l’Etat est en train de vous préparer votre héritage. Alors, ce que je vous demande aussi, c’est d’être les bâtisseurs de l’héritage que vous allez recevoir demain. Voilà donc ce que je peux aux étudiants. Maintenant quant à vos lecteurs, que tout ce que vous dites soit le reflet de ce que vous êtes, à savoir, le savoir, et qu’ils le lisent avec beaucoup d’attention.

Issa Tchiroma Bakary, ministre de la communication ici à Ngaoundéré
Journalducameroun.com)/n

Hervé Lado: Ancien fonctionnaire de la mission économique de l’ambassade de France au Cameroun, il est retourné sur les bancs

Chercheur et doctorant, il a accepté d’évoquer son parcours professionnel, ses ambitions et sa vision du Cameroun de demain

Pour ceux qui ne vous connaissent pas, qui est Monsieur Hervé Lado?
Hervé Lado est un Camerounais qui vit en France depuis deux ans et qui vient de terminer un Master en Finance et Stratégie, option financement des projets dans les pays émergents à Science Po Paris et qui y était Président de l’association des étudiants pour l’Afrique. Je travaille depuis peu au sein du Programme de Recherche « Multinationales et Développement des Pays Emergents » a l’Essec Business School (Chaire IRENE, Institut pour la recherche et l’enseignement de la Négociation en Europe), et prépare en parallèle un doctorat en économie a Paris1 Panthéon-La Sorbonne sur la Responsabilité sociétale des multinationales extractives dans le Delta du Niger (Nigeria). Je suis également titulaire depuis 2000 d’une Maîtrise en Economie et Gestion de l’Université Catholique d’Afrique Centrale (UCAC) à Yaoundé que j’ai intégrée après mon Baccalauréat scientifique (C). Juste après l’UCAC, j’ai été embauché à l’Ambassade de France au Cameroun, service économique, pour fournir conseils et prestations diverses aux entreprises françaises dans leur implantation ou dans leur recherche de partenaires d’affaires au Cameroun et dans sept autres pays d’Afrique centrale.

Parlez nous de votre enfance
Je suis né à Baleveng dans la Menoua (Région Ouest-Cameroun) mais je suis originaire du département des Bamboutos. J’ai grandi à l’Ouest pendant toute mon enfance et ensuite je me suis établi à Yaoundé, justement après mon admission au concours l’UCAC. J’ai débuté mes études à Bafou où je suis resté jusqu’au cours préparatoire. Après, ma famille a migré vers Bansoa, ensuite Banganté où j’ai fait l’Ecole catholique Notre Dame du CE2 au CM2, puis le Lycée de Banganté jusqu’en 5e. Par la suite, j’ai suivi mes parents à Baham dans les Hauts-Plateaux où j’ai fréquenté le Lycée de Baham de la 4e jusqu’en Première. La Terminale, je l’ai faite au Lycée de Foumban et c’est de Foumban que je suis allé à Yaoundé.

Quel souvenir gardez-vous de tout cela?
Le souvenir d’un parcours satisfaisant parce que j’ai progressé tout naturellement sans heurts avec quelques succès marquants. Notamment je me rappelle que j’ai eu une bourse lorsque j’allais en 6e mais que je n’ai pas pu percevoir par manque de liquidités, nous avait-on dit. Ensuite, en classe de 4e, j’ai été le premier du Lycée de Baham, et cette fois quand même, j’ai eu beaucoup de cadeaux des anciens et des élites du coin. C’était très encourageant. Jusqu’aujourd’hui, je dispose encore d’un des dictionnaires reçus cette année là.

Vous avez travaillé à l’ambassade de France au Cameroun pendant sept ans et demi, quelles étaient vos responsabilités ?
Le rôle du service économique est de conseiller les entreprises françaises en leur fournissant des informations de nature économique, commerciale, sectorielle pour éclairer leur choix d’implantation ou de recherche des débouchées. Moi j’avais cette responsabilité sur un certain nombre de secteurs comme les bâtiments et travaux publics, les transports, l’industrie, les mines, l’eau, l’environnement. Ce sont des secteurs où il y avait une grande concentration d’opportunités et dans lesquels j’étais charge d’informer et de conseiller les entreprises françaises en répondant à leurs demandes d’informations ou de contacts, en réalisant des prestations facturées (organisation de missions de prospection notamment), et en rédigeant des notes d’information et monographies, à l’attention de ces entreprises mais aussi des autorités françaises. Ça c’était au titre de ma fonction principale d’Attaché Commercial. A côté, j’étais Responsable Qualité ISO puisque le réseau des services économiques français est certifié ISO 9001 pour l’activité de conseil aux entreprises. J’étais donc chargé de rédiger les procédures qui permettent de rendre ce service là avec la meilleure qualité qui soit, faire appliquer ces procédures, former les agents, etc. Donc j’étais chargé d’auditer les autres services économiques dans les ambassades françaises en Afrique.

Après avoir travaillé autant d’années au sein de la mission économique de l’ambassade de France, on imagine que vous avez un regard qui est différent de celui du commun des camerounais. Comment est-ce que vous analysez l’évolution des rapports entre la France et le Cameroun économiquement parlant ?
Il y a une vingtaine d’années, les économies des 14 pays de la zone franc étaient relativement dépendantes de la France pour ce qui est des échanges commerciaux. Ces pays là importaient au moins à 30% de leurs marchandises de France. En termes d’investissement c’était la même dépendance. Aujourd’hui, ça s’est dégradé en défaveur de la France de manière significative car elle a perdu du terrain au profit de nouvelles puissances.

Selon vous c’est quoi les raisons ?
Il y’a d’abord la cherté de ce qui vient de France. Comparativement évidemment à ce qu’on trouve en Asie ou au Brésil. Les gens ne se limitent plus dans des voyages France-Cameroun, ils vont au-delà. Ensuite il y a la question des tracasseries en termes de visas. Ça c’était très marquant. Un homme d’affaires qui va faire la queue au consulat de France pour prendre un visa qu’il n’est même pas sûr d’avoir, y va avec toute l’appréhension du monde. Même la politique de visas de circulation n’a pas encore pu changer la donne, puisque l’attribution demeure discrétionnaire et de toute façon très limitée en nombre. En plus, les conditions d’accueil sont loin d’être systématiquement cordiales. Ce qui contraste nettement avec la politique d’ouverture des nouvelles puissances. Nos interlocuteurs dans les communautés d’affaires ne manquaient pas l’occasion d’attirer notre attention.

Et vous n’avez pas pris conscience du problème pour chercher à le résoudre au consulat notamment ?
Malheureusement ça ne se joue pas à ce niveau là. Les marges de man uvre locales sont relativement circonscrites. Ça se joue au niveau de la politique étrangère de la France. C’est-à-dire que depuis quelques années, il y a des problématiques de maîtrise des flux migratoires qui s’imposent aux politiques en France et en Europe, et ils prennent des mesures parfois un peu trop générales tout en adaptant parfois en fonction des régions, mais il est clair que les flux migratoires qui « dérangent » le plus sont ceux qui viennent des pays en développement, notamment des pays africains.

On a parlé tout à l’heure d’Ubifrance, vous voulez bien nous présenter cette institution ?
Ubifrance c’est une agence publique qui a un statut spécial sous tutelle de Bercy, donc du ministère de l’économie et des finances, qui a pris la responsabilité de piloter le réseau commercial d’appui au commerce extérieur français. Il faut dire que ce réseau a énormément évolué au cours de ces dernières années puisque Ubifrance était d’abord le CFCE (Centre français du commerce extérieur). Toutes ces transformations ont dénoté de la volonté des pouvoirs publics français de rendre cette agence plus efficace, plus performante en termes de nombre d’entreprises clientes, de nombre de prestations facturées, de chiffre d’affaires réalisé, etc. D’ailleurs il a été défini au cours de ces dernières années une carte plus restreinte d’un réseau qui apparaîtrait pour la France le plus performant possible, et dans lequel figure très peu de pays africains.

Quels sont vos projets aujourd’hui?
Mes projets c’est, après la soutenance de mon doctorat en Economie d’ici quelques années à La Sorbonne, de travailler pour le renforcement de la gouvernance et de la responsabilité sociétale des multinationales en Afrique. J’apporterai ma contribution à l’élaboration des politiques économiques dans nos pays et à l’amélioration de nos environnements politiques et des affaires. Je viens d’être déclaré vainqueur, avec quatre autres jeunes dans le monde, du concours des Idées pour l’Action lancé en août 2010 par la Banque Mondiale en partenariat avec la Banque Africaine de Développement et d’autres partenaires pour collecter des idées originales visant à renforcer la gouvernance et l’environnement des affaires dans les pays africains. Très encourageant.

Hervé lado, doctorant à la Sorbonne et ancien fonctionnaire de l’ambassade de France au Cameroun
Hervé Lado)/n

Est-ce que ce n’est pas finalement l’un des problèmes du Cameroun et de nombreux autres pays ? Puisqu’on a l’impression qu’on fait des choses sans pouvoir définir les contours ?
Oui à un moment il faut qu’on se dise qu’on ne peut plus aller à tâtons. Il faut bâtir un plan, on peut dire qu’il y a au Cameroun un ministère qui a cette responsabilité là. Il ya ce qu’on appelle les documents de stratégie pays aujourd’hui qui donnent une vision, un document vision 2025 ou 2035.

Encore faudrait-il qu’il soit appliqué à la lettre ?
Là on retrouve la problématique de la gouvernance et du leadership dans notre pays. Oui il faut planifier, savoir où on va et surtout limiter la dépendance vis-à-vis de l’extérieur en matière d’expertise. On peut demander à des consultants étrangers de faire un travail à un moment donné, mais que ce ne soit pas systématique. J’ai observé que c’était systématique dans notre pays d’appeler la Banque Mondiale, le FMI, des consultants étrangers, des assistants techniques français notamment pour venir faire ce que nous Camerounais pouvons faire, pour peu que nous soyons comptables de nous-mêmes. On est dans un pays avec 70% de jeunes mais regardez le profil du gouvernement camerounais. On croule sous des talents nouveaux et dynamiques, pendant que le gouvernement croule sous le poids de l’âge. ça c’est un défi majeur. Celui qui comprendra ça et qui pourra proposer une offre cohérente dans les prochaines années, va faire renaître très riche ce pays, et on verra un nouveau Cameroun.

Donc en réalité on va vous croiser en économie mais aussi en politique?
Absolument!

On imagine que la formation à sciences Po vous a apporté beaucoup. Est-ce votre avis ?
Tout à fait ! J’y ai passé deux années pleines et riches. Sciences Po est le carrefour d’énormes enjeux politiques, mais bien entendu académiques. Maintenant, une fois qu’on y est, ça n’a que peu d’intérêt si on ne s’investit pas personnellement dans le fonctionnement de Sciences Po. Investissement dans le cadre des associations, rencontrer du monde et faire bouger aussi des choses. J’ai eu l’occasion de le faire, j’étais le Président de l’association des étudiants de Sciences Po pour l’Afrique. L’enjeu c’était de regrouper la centaine d’étudiants africains qui fréquentent cette institution. Le Cameroun est le pays d’Afrique subsaharienne qui y est le plus représenté, ensuite, le Sénégal. Nous avons institué la Semaine Africaine des étudiants de Sciences Po, rendez-vous annuel destiné à découvrir le continent dans toutes ses dimensions. Pour aller plus loin, nous allons construire le réseau africain des anciens étudiants de Sciences Po pour échanger entre nous et accompagner le projet de campus Afrique en projet à Sciences Po qui permettra d’accueillir plus d’étudiants africains dans cette prestigieuse institution.

On va terminer l’interview en demandant votre avis sur deux questions d’actualité. Aujourd’hui le Cameroun diversifie ses offres de partenariats bilatéraux, notamment en les rendant plus économiques avec des pays comme le Brésil, la Turquie, est-ce que vous pensez qu’on a une chance de rendre productif ce type de relation ?
C’est une opportunité car cette dépendance économique unilatérale des pays de la zone Franc vis-à-vis de la France observée depuis les indépendances, devient inacceptable au moment ou nos pays peuvent présenter les mêmes compétences et aptitudes. On doit de plus en plus viser plutôt des interdépendances. Il faut donc qu’à un moment donné les échanges se rééquilibrent. C’est ce à quoi on assiste en ce moment, au profit de ces nouveaux pays. Il faut savoir que lorsqu’on a une dépendance économique, il ya forcément quelque part une influence, voire une dépendance sur le plan politique. Economie et Politique sont ainsi liées. Si cette évolution peut libérer les énergies au Cameroun sur le plan économique, et je pense que ce sera le cas avec des hommes d’affaires qui vont dans ces pays là dénicher des partenaires, trouver des produits innovants, notamment en matière d’énergies renouvelables, ça c’est une très bonne nouvelle. Après, on est en droit d’attendre que ça se transforme en une sorte de libération sur le plan politique aussi. A condition qu’on sache bien discerner la nature et le contenu des offres de ces pays là, offres commerciales, offres de coopération économique et de coopération financière. Il y’a des pays qui proposent des packages alléchants, mais il ne faut pas qu’on renoue avec les travers des précédentes coopérations, et qu’on accepte tout sans critiquer.

2e sujet d’actualité, celle des terrains qui sont de plus en plus acquis par des chinois au Cameroun, notamment pour la culture du riz, mais pas du riz à consommation locale, mais du riz à exporter en Chine. Votre avis sur ce phénomène ?
Cette situation fait partie des limites que je relevais tout à l’heure. La question est simple. Quelle est la vision pour le pays ? Lorsqu’on attribue des parcelles à cultiver à des promoteurs étrangers, est-ce qu’on a pour objectif de résoudre la crise alimentaire locale qui frappe et qui va encore frapper avec une rare violence ? On ne peut pas être insensible à cela. Alors qu’on importe massivement du riz, on ne peut pas se permettre de cultiver du riz localement pour exporter, ça n’a aucun sens. Des politiques iraient dans ce sens seraient largement inadaptées. Et dire qu’il y’a des Camerounais qui ont de l’argent, des compétences, de l’énergie, de l’enthousiasme, mais ne demandent qu’à être écoutés.

Pour quelqu’un qui a travaillé, qui a été fonctionnaire français pendant de nombreuses années ? On est quand même étonné par votre discours, notamment concernant la France.
Si vous êtes étonnée, alors vous avez compris ma démarche. Lorsqu’on travaille dans ce contexte là, les premières années on apprend, on découvre les dossiers, on apprend beaucoup des enjeux des échanges bilatéraux et de la coopération bilatérale. On voit quelle est la nature des relations entre institutions de deux pays, entre les officiels camerounais et les officiels français. On réalise a quel point il peut y avoir une sorte de perversion, volontaire ou non, de ces rapports là, remettant en cause cette notion d’indépendance que j’évoque depuis le début de cet entretien. Lorsqu’on en est témoin, on ne peut pas rester indifférent quand on aime son pays. Vous avez peut-être déjà regardé « un flic dans la mafia », vous voyez, il participe même parfois à des opérations, mais à un moment, il faut un sursaut, et ça été le mien de dire j’ai travaillé pour la France, maintenant je travaillerai pour le Cameroun et pour notre continent.

Qu’avez-vous réalisé ? Que vous participiez à la perversion de l’Afrique ?
On réalise surtout qu’on n’est pas Français et qu’on a encore moins de légitimité à rester indifférent. Déjà en interne, il ya des avantages auxquels on n’a pas droit, ce qui est dans une certaine mesure normal puisqu’on n’est pas Français. Mais au-delà, il s’agit davantage d’un sursaut citoyen, il arrive une sorte de révolte pour dire il y a de l’injustice quelque part dans les relations internationales, et c’est à chaque pays de défendre son bifteck, c’est aux citoyens chacun selon son talent et son originalité, de se mettre en ordre de bataille pour trouver des solutions durables aux problèmes communs d’emplois et de nutrition, et plus largement conquérir la place de leur pays dans le concert des Nations.

Hervé Lado, ancien président de l’association des étudiants de Sciences Po pour l’Afrique
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Cameroun: Les temporaires toujours dans l’attente des contractualisations

Le sujet a été abordé au cours du conseil de cabinet le 30 avril dernier

L’échéance établie pour clore avec l’opération de contractualisation des personnels temporaires de l’Etat ne sera pas respecté. Prévue pour s’achever au mois de mai 2009, cette opération sera certainement repoussée pour cause de retard dans le traitement des dossiers. Au cours de l’exposé du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, Emmanuel Bonde, le 30 avril 2009, lors du conseil de cabinet à l’immeuble Etoile à Yaoundé, il ressort que, sur plus de 10 000 dossiers à traiter, seuls 4000 ont déjà été bouclés. Des chiffres qui montrent à suffisance que sauf cas de miracle, tous les dossiers ne pourront pas être bouclés à la date prévue. Pourtant, au début des opérations de contractualisation, le Minfopra se donnait trois mois au plus pour signer tous les contrats aux temporaires retenus par le comité ad hoc. Il faut qu’on tienne les délais. Ces enfants ont déjà trop attendu, soutenait-il.

Emmanuel Bonde, pendant son discours, a justifié cette lenteur dans le traitement des dossiers par le retard dans le processus d’authentification des diplômes. Sur ce, le premier ministre Ephraim Inoni a appelé le ministre de l’Education de base, Haman Adama, et celui des Enseignements secondaires, Louis Bapes Bapes, à tout mettre en uvre pour faciliter l’opération d’authentification des diplômes aux membres du comité interministériel chargé de la contractualisation des temporaires.
D’après les dire du Minfopra, sur les 4981 actes produits, 2132 personnels perçoivent déjà leur solde dans leur nouvelle situation administrative. Un chiffre jugé insignifiant par rapport au nombre de dossiers en attente. Le Minfopra a aussi mentionné au cours de son exposé que 971 personnes, initialement reconnues éligibles à la contractualisation, ont été déclarées inéligibles suites aux nombreux cas de fraude mis en lumière par le processus d’authentification de diplôme. Ces dossiers qui font partie des 4000 dossiers qui ont déjà été bouclés, mais ils seront simplement radiés.

Dans son propos, Emmanuel Bonde a également mentionné que sur les 17 558 agents temporaires recensés en 2007, 6129 ont été déclarés inéligibles à la contractualisation pour divers motifs. Ces derniers ont donc été libérés depuis le 31 décembre comme convenu. Et percevront leur droit très prochainement. Le premier ministre, chef du gouvernement a appelé le ministre des Finances, accélérer le processus de mobilisation des ressources nécessaires au paiement de leur droit.

Les opérations de contractualisation des personnels temporaires des services publics ont débuté l’année dernière. Il était question de libérer au plus tard le 31 décembre 2008, les temporaires qui n’ont pas été éligibles à la contractualisation, et d’arrêter ce type de recrutement. Le Minfopra souhaitait qu’après le premier trimestre 2009, l’appellation temporaire au sein de la Fonction publique camerounaise épouse véritablement sa signification dans le droit du travail. C’est-à-dire quelqu’un qui est recruté pour un travail précis, pour un délai bien précis, et pour remplacer une personne bien identifiée, explique-t-il. Mais l’on devra encore attendre quelques temps pour que cela arrive. Le temps que tous les dossiers soient définitivement bouclés.

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