IST/VIH/SIDA: « Les camionneurs des axes routiers sont une population où le taux de prévalence reste élevé au Cameroun »

Les résultats de l’étude sur les connaissances, les attitudes et les pratiques des camionneurs(CAP) de l’axe Douala-Garoua-Boulai en matière de sexualité ont été rendus publics

La salle de conférence du Centre Pasteur de Yaoundé a servi de cadre à l’atelier de restitution de l’étude des « Connaissances, Attitudes et Pratiques(CAP) en matière de sexualité, de prévention et prise en charge des IST et du VIH/Sida des camionneurs de l’axe Douala-Garoua Boulaï au Cameroun. » Le contexte de cette étude est justifié car l’épidémie de VIH-SIDA reste généralisée au Cameroun. La prévalence moyenne nationale de l’infection à VIH/SIDA est de 4,3%, avec de fortes disparités régionales(6,3% à l’Est, 7,2% au Sud par exemple) et urbaines, spécifiques à certaines villes comme Douala(4,6%) et Yaoundé (6,2%). Même à l’heure de l’utilisation des antirétroviraux à large échelle, y compris pour la prévention, les moyens classiques de prévention de l’infection à VIH restent pertinents. Au Cameroun, le « Plan Stratégique National de Lutte contre le VIH/SIDA et les IST pour la période 2011-2015» élaboré par la Comité National de Lutte contre le Sida accorde une place importante à la prévention, en particulier pour les stratégies pouvant aider les groupes vulnérables ou à haut risque(camionneurs, travailleurs du sexe, homme ayant des relations sexuelles avec les hommes et population du milieu carcéral. Au Cameroun, la mise en uvre et le pilotage de ce programme en direction des routiers de l’axe national n°1 Douala-Garoua Boulaï a été confié à l’ONG Moto-Action avec l’appui du Centre Pasteur du Cameroun. Il a bénéficié de l’appui financier de la Fondation Total et de la GIZ.

Les résultats
Au total 660 sujets ont été enquêtés dont la majorité était constituée des chauffeurs (72,7%), des convoyeurs (22,3%) et des mécaniciens (5,0%). La tranche d’âge a été de 26 à 35 ans. Près de 13% des enquêtés n’avaient jamais été scolarisés. Toutefois, la majorité des participants de l’étude avainet un niveau d’éducation primaire ou secondaire (58,3%) selon l’étude. 57,5% des participants étaient officiellement mariés,23,8% vivaient en concubinage et 18,6% étaient célibataires ou veufs. Ces routiers passaient en moyenne 13 jours par mois hors de leur domicile et ils dormaient en général soit dans leur camion, soit dans un hôtel. Une proportion non négligeable (33,0%) de ces routiers ainsi que leurs aides consommaient régulièrement des drogues (tabac, chanvre indien, caféine) et d’autres substances telles que les boissons énergisantes et bien d’autres. Il en ressort de façon générale que les connaissances sur les IST sont très partielles parmi les routiers. Si d’aucuns parviennent clairement à les définir en citant les plus populaires comme la syphilis, la gonococcie, d’autres par contre ont une idée précise de la transmission sexuelle de ces infections ; et un troisième groupe les range parmi les maladies mystiques. Pour ces camionneurs, les connaissances sur les vecteurs et les voies de transmission sont relativement incertaines. Concernant la prévention, lé connaissance des moyens de prévention du VIH était faible. Si l’abstinence et la fidélité sont perçues comme moyens de prévention certains, des doutes demeurent à la protection conférée par le préservatif. Pour ce qui est des possibilités de traitement, les IST sont des infections facilement guérissables. Par contre, l’issue du SIDA semble être liée au type de traitement administré. Pour ces enquêtés, on ne guérit pas du SIDA, on utilise des calmants ou « antirétroviraux » pour atténuer l’évolution du virus. Et seuls les riches parviennent avec les antirétroviraux à survivre longtemps avec la maladie. Pour eux, le Sida fait partie des maladies dangereuses, mais il ne constitue pas une fatalité en soi.

Analyse des données
Les camionneurs sont des personnes mal encadrées, pas assez sensibilisées sur les dangers de la route, les normes de prévention routière et les IST/SIDA, enclins à prendre des risques (drogues, antalgique puissant, antiasthénique) pour un meilleur rendement (primes). Le préservatif est davantage perçu par ce groupe à risque comme une méthode contraceptive plutôt qu’une méthode préventive de VIH/IST. Ces résultats obtenus devraient permettre de disposer des données pertinentes pour décrire les camionneurs, leurs comportements sexuels, identifier les interventions de prévention les plus pertinentes ainsi que les stratégies les mieux adaptées pour toucher cette population spécifique.

Image d’illustration
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