Cameroun : Michel Biem Tong déballe tout sur la guerre des clans au Palais de l’Unité

Dans une publication faite sur les médias sociaux, Michel Biem fait une analyse de la crise de succession qui oppose deux clans au sommet de l’Etat du Cameroun.

« Franck Biya Vs Ngoh Ngoh Ferdinand : une lutte de clans qui débouche sur une crise institutionnelle puis une éventuelle crise politique.

Affaire ligne 94/65. Affaire Fonds Covid-19. Affaire Jean Pierre Amougou BELINGA/Direction des Impôts. A mesure qu’approche le moment d’une éventuelle transition politique, des affaires judiciaires sur fonds de bataille de succession au sommet de l’Etat se multiplient. La curiosité dans ces luttes de clan est que ces dernières ont lieu à l’intérieur du lobby politique beti-bulu, le fameux « Essingan » que le tristement célèbre patron de services secrets camerounais Jean Fochive, de regrettée mémoire, appelait « le clan ».

D’un côté, le clan des « Bulu » qui ne jure que par Franck Biya et de l’autre le clan des « Nanga » qui a pour porte-flamme Ferdinand Ngoh Ngoh, tout puissant secrétaire général à la présidence et proche de la Première Dame, Chantal Biya.

Franck Biya et le clan dit « bulu » favori

Dans cette guerre désormais ouverte entre les deux clans, celui dit des « bulus » semble avoir le dessus. Car ce clan contrôle la justice (utilisé pour neutraliser de potentiels adversaires), les finances publiques, l’armée, la police, la sécurité du palais de l’Unité et du président ainsi que les services secrets tant intérieur qu’extérieur.

Dans ce groupe, on retrouve des hommes-clés tels que le ministre de la Justice, Laurent Esso, le ministre des Finances, Louis Paul Motaze, le directeur du Cabinet civil, Samuel Mvondo Ayolo, le directeur de la sécurité présidentielle, Ivo Desancio Yenwo, le commandant de la Garde Présidentielle, colonel Beko’o Abondo, le contre-amiral Fouda Joseph, conseiller spécial de Paul Biya, le Délégué général à la sûreté nationale (patron de la police et du renseignement intérieur), Martin Mbarga Nguele, le ministre de la Défense, Joseph Beti Assomo, le directeur de la Direction Générale de la Recherche Extérieure (DGRE), Eko Eko Maxime. Sans oublier le tout puissant homme d’affaires et trésorier de fait du clan Jean Pierre Amougou Belinga, président du groupe de presse l’Anecdote (dont la chaîne de TV Vision 4 a eu la primeur de l’information sur le mandat d’amener contre Ngoh Ngoh).

Autre atout important de ce groupe, le soutien de la France (dont le Cameroun demeure une chasse gardée malgré les discours souverainistes des dirigeants camerounais) à Franck Biya. La France en veut à Ngoh Ngoh pour avoir entre autres confié le port de Douala (construit par la France au début des années 1920) à ses hommes et la sécurité de cette infrastructure stratégique (tout comme celle de l’aéroport) à Israël.

Ngoh Ngoh Ferdinand, Bientôt la chute ?

Quoiqu’on dise, les lendemains déchantent pour l’homme à la punk de Minta qui ne cache plus ses ambitions présidentielles. Son réseau d’influence ne pourra inverser le cours des événements à sa faveur. Côté sécurité, Ferdinand Ngoh Ngoh contrôle le Bataillon d’intervention rapide, une unité spéciale de l’armée dont le Commandant, l’israélien Eran Moas, est l’ami personnel. Mais en face du BIR (dont un important détachement assure la sécurité du Palais présidentiel) se trouve la Garde et la sécurité présidentielles, dernières ceintures autour chef de l’Etat.

Ngoh Ngoh Ferdinand ne peut également compter sur le soutien du sulfureux ministre de l’Administration territoriale et non moins patron du conseil national de la sécurité (en charge de centraliser le renseignement), Paul Atanga Nji. Ce dernier a maille à partir avec le Tribunal criminel spécial devant lequel il répond de sa responsabilité dans la gestion des fonds COVID-19.

Pour sauver sa face, il sera obligé de livrer puis de lâcher son parrain. Pareil pour Galax Etoga, le patron de la gendarmerie nationale, qui ne peut lui être d’une quelconque utilité. Du point de vue du renseignement, son chouchou, le colonel Bamkoui Émile, commandant de la Division de la sécurité militaire, est au bord de la retraite. Pour espérer rebondir, il se sentira obligé de se mettre au service du clan ayant la faveur des pronostics.

Côté finance, Ngoh Ngoh ne peut compter sur son homme de main Modeste Mopa à la tête de la direction des Impôts car les impôts recouvrés sont reversés au compte Trésor de l’Etat logé à la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC). Rappelons que le président de la Banque de développement des Etats de l’Afrique Centrale (dont la BEAC est l’un des actionnaires) n’est autre qu’Evou Mekou, neveu de Paul Biya, c’est-à-dire « frère » de Franck Biya (tous deux, tout, comme MOTAZE, sont impliqués dans l’affaire du détournement de plusieurs milliards de FCFA liés à des obligations de trésor à coupons zéro qui a éclaté en 2012, voyez-vous le lien?).

Sur le plan de la justice, Ngoh Ngoh ne contrôle que le Contrôle Supérieur de l’Etat, point de départ par excellence des affaires de l’Opération Épervier. C’est cet organe qui, sur ordres du SG/PR, a ouvert les enquêtes sur la gestion des lignes budgétaires 94 et 65, histoire de s’attaquer au clan BULU. Mais cette enquête n’aura aucune suite judiciaire, le Tribunal criminel spécial (TCS, créé en 2011 par feu Jean Foumane Akame, un membre du clan Bulu) étant contrôlé par les hommes de Franck Biya.

Il ne reste plus à « tonton Ferdinand » que la Première Dame comme soutien de poids. Mais jusqu’où ira ce tandem qui a le don d’avoir paralysé le pays tout entier ?

« Neutraliser » Chantal Biya et Ngoh Ngoh à tout prix, un impératif

Il est clair que le refus pour Ngoh Ngoh de déférer à la convocation des magistrats du TCS et le recours aux éléments du BIR pour se protéger de toute arrestation musclée, en exécution du mandat d’amener émis par les juges du TCS, sont des indicateurs de sa toute puissance.

De sources bien informées, Paul Biya aurait reçu Ferdinand Ngoh Ngoh en audience au Palais de l’Unité lundi dernier en soirée pour le rassurer de son soutien. D’où la levée du mandat d’amener contre lui. Ce qui ne signifie aucunement annulation des poursuites judiciaires à son encontre. L’homme à la punk demeure en sursis. Chantal Biya quant à elle jure : Ngoh Ngoh ou rien. En effet, il nous revient de sources dignes de foi que Chantal Biya s’oppose à tout remaniement ministériel qui emporterait son filleul Ngoh Ngoh.

Or Paul Biya, sous la pression des français et du clan BULU, veut s’en débarrasser. Que faire? Naguère larvée, la lutte de clan au sein des institutions républicaines est désormais ouverte. Pour en sortir et mettre Franck Biya sur la sellette, il faut faire sauter les verrous Chantal Biya et Ngoh Ngoh. Mais comment ?

Le scenario possible, s’agissant d’abord de la Première Dame, est de l’éloigner du palais présidentiel et même du pays. Cette tâche pourrait être confiée aux agents du commissaire EKO EKO de la DGRE, en connexion avec les éléments de la DGSE (contre-espionnage français) en service à l’ambassade de France à Yaoundé. Il pourrait lui être proposé par exemple par un membre de son cercle d’amis, un voyage touristique à l’étranger, en France, en Suisse ou aux USA. Et pendant qu’elle y séjourne, Paul Biya remanie le gouvernement. Pour son pouvoir et ses relations avec les Français, Paul Biya peut bien se passer de son épouse (remember Jeanne Irene Biya !).

Pour ce qui est de Ngoh Ngoh Ferdinand, la stratégie de sa neutralisation pourrait avoir pour but de l’isoler des affaires de l’Etat. L’article 4 du décret No2011/412 du 9 décembre réorganisant la présidence de la République a prévu une délégation de signature pour les adjoints du SG/PR pour des tâches spécifiques. Ce mécanisme juridique pourrait être enclenché de telle sorte que Paul Elung Che ou Mohamadou Moustapha soit dorénavant la courroie de transmission entre le gouvernement, les services rattachés à la présidence et Paul Biya.

Pour ce qui est du BIR, il suffit simplement de faire des promesses d’argent et de promotion aux chefs de différentes composantes de ce corps et Ngoh Ngoh est acculé. Ainsi, un nouveau gouvernement peut être mis en place et le clan Bulu pourra ainsi repositionner ses pions en vue de la bataille pour la conquête du pouvoir par Franck Biya. Même si rien n’est totalement acquis pour ce dernier.

Le clan des nordistes à l’affût, les américains au secours de Marafa ?

Au moment où les membres de  « Essingan » s’étripent, le clan des nordistes, en embuscade, n’a pas dit son dernier mot. Depuis la démission du premier président Amadou Ahidjo et la liquidation de centaines de hauts cadres de l’armée et de la gendarmerie originaires du Nord, après le coup d’Etat manqué du 6 avril 1984, le lobby politique nordiste a perdu tout influence que ce soit sur la sécurité, l’armée, le renseignement et le trésor public au Cameroun. L’incarcération de Marafa Hamidou Yaya en 2012 est venue doucher tous les espoirs des Nordistes de revenir au pouvoir suivant l’axe nord-sud voulu par les colonisateurs français.

Mais la partie septentrionale du pays peut encore compter sur un nombre très important d’hommes d’affaires qui peuvent être utile au cas où. Depuis décembre 2020, un mouvement rebelle dénommé le Mouvement pour la libération du Cameroun est en attente dans le Grand Nord. Le 16 septembre dernier, le président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguié Djibril, informait les autorités tchadiennes de transition des activités de trafic d’armes conduites par le député Kamsouloum ABBA Kabir.

Par ailleurs, dans une tribune libre publiée récemment par une revue diplomatique américaine, l’ancien ambassadeur des USA au Cameroun, Niels Marquardt, a plaidé pour la libération de l’ancien ministre Marafa Hamidou Yaya qui, selon le diplomate, est victime de ses ambitions politiques. S’agit-il de la manifestation du soutien possible des USA au clan du Nord?

Toujours est-il que le Grand Nord n’entend pas rester sur le bas-côté, en ce moment où on parle de guerre de succession. Quoi qu’il en soit, l’avenir politique du Cameroun est sombre, le spectre de la guerre civile plane. Chaud devant. »

Michel Biem Tong, uavhengig journalist

Cameroun : Elle veut écarter ses frères dans la succession de leur mère

Une femme a saisi la justice pour obtenir le jugement d’hérédité de sa mère. Elle se réclame  unique héritière et administratrice des biens, au détriment de ses frères décédés, mais qui ont laissé une progéniture. Le Tribunal s’oppose à son action.

L’information est du journal Kalara. Visiblement, Lydia est décidée à faire exercer son droit à tout prix. Issue d’une fratrie de cinq enfants dont elle est la benjamine, cette dame a saisi le Tribunal de premier degré (TPD) de Yaoundé pour l’ouverture de la succession de Marguerite, sa mère. Cette dernière a trouvé la mort en septembre 2008 suite à une maladie qui l’a affaiblie pendant plusieurs années. Seule Lyndia était au chevet. La benjamine de la famille a fait appel à certains membres de la famille pour témoigner en sa faveur au cours de cette procédure.

Cette dame de 32 ans a déclaré au Tribunal qu’elle est l’unique enfant de la défunte et dit avoir été désignée par les membres du Conseil de famille comme la seule bénéficiaire du patrimoine de Marguerite et administratrice des biens successoraux. Seulement, au cours de l’audience, le tribunal a découvert l’existence d’autres enfants de la disparue. Hermine, sa belle-sœur et épouse de son frère ainé citée parmi les témoins qui a dénoncé les manigances de Lydia et a éclairé le tribunal sur l’arbre généalogique de Ma’a Marguet, comme l’appelaient affectueusement ses proches. Le juge s’est opposé à la requête de Lydia et a voulu comprendre pourquoi les autres enfants de la défunte ne sont pas présents à l’audience.

Veuve rejetée

Lydia a raconté au Tribunal qu’elle est issue du deuxième mariage de la défunte mère. Marguerite a vécu pendant cinq ans avec Georges son premier époux, parti également plutôt au pays des morts. De cette union, sont nés quatre enfants, qui sont déjà tous décédés. Elle explique qu’après le décès du premier mari de sa mère, cette dernière, qui n’avait jamais été acceptée par sa belle-famille à cause de tribu, a été abandonnée à elle-même.

C’est ainsi que Marguerite, qui n’avait plus aucune source de revenu, a été répudiée du domicile conjugal par ses beaux-frères. Elle est retournée dans son village natal, laissant les enfants, encore mineurs, à la charge de sa belle-famille. Plusieurs années après, elle fait la rencontre d’un autre homme, Félix, qui ne tarde pas à officialiser leur union et Marguerite quitte son village pour rejoindre son nouveau mari à Yaoundé. Lydia déclare que sa mère a trouvé le bonheur entre les bras de cet homme et c’est le deuxième mariage qu’elle est née. Félix meurt aussi après treize ans de vie commune avec Marguerite.

Dans son exposé, la dame a également révélé que la défunte mère a été atteinte d’une maladie en 2001. Elle avait perdu l’usage de certains membres de son corps. Lydia dit avoir été seule à l’avoir assisté pendant ces moments difficiles. Ce qui l’avait d ‘ailleurs contraint d’amener la malade chez elle afin de pouvoir mieux prendre soin d’elle et ce, pendant sept ans.

Malheureusement, la maladie a eu raison d’elle et Marguerite a rendu l’âme en 2008, laissant derrière elle un grand patrimoine dont elle souhaite hériter suite à cette procédure.  La plaignante soutient que ces autres frères étant décédés, elle est l’unique héritière et administratrice des biens que lui ont légué sa mère de regretté mémoire. Selon Lydia, les membres du conseil de famille n’ont trouvé aucun inconvénient à ses résolutions.

L’ignorance

Appelée à témoigner dans le cadre de cette affaire, Hermine, la veuve du fils aîné de Marguerite a confirmé le décès de son époux et a déclaré avoir eu quatre enfants avec ce dernier. Cette déclaration a suffi pour que l’affaire prenne une autre tournure. En effet, le Tribunal a fait remarquer à la plaignante que les enfants de ses frères décédés ont aussi droit à l’héritage de leur grand-mère en représentation de leurs parents.

« J’ai donné mon accord pour qu’elle hérite seulement des biens de ma belle-mère parce que je ne savais pas que mes enfants ont aussi droit de bénéficier du patrimoine de leur grand-mère », a déclaré Hermine. Pour soutenir sa demande, Lydia a présenté au Tribunal le certificat de décès de sa mère et le procès-verbal du conseil de famille.

Avant de renvoyer l’affaire au 7 juillet 2021, le juge s’est montré sensibilisateur et a expliqué à Lydia que les biens de Marguerite constituent un patrimoine familial dont doivent en bénéficier tous les ayants droits. Dans le cas d’espèces, soutient le Tribunal, la plaignante doit recenser tous les petits-fils de la défunte et les introduire dans la  succession.

Le juge a enfin demandé à la plaignante de compléter son dossier de procédure en produisant en la forme légale, les actes de décès de ses frères ainsi que les actes de naissances de tous les neveux.