Journée de l’intégration Cémac: Le conflit d’agendas à Yaoundé

Le Cameroun a déroulé le tapis rouge au Président turc, Abdullah Gül. Au détriment d’un rendez-vous annuel d’envergure sous-régional connu d’avance

Le choix n’est pas cornélien en ce mardi 16 mars 2010 à Yaoundé. La visite officielle du Président turc ravit – de fort belle manière – la vedette à la deuxième édition de la journée de l’intégration instituée par la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale. Les faits parlent d’eux-mêmes.

La délocalisation inopinée de l’activité phare de la célébration
L’hôtel Hilton de Yaoundé, site initial réservé pour une conférence de haut niveau sur les réformes institutionnelles de la Cémac, ne peut pas accueillir les invités et autres personnalités attendues. Et pour cause, le Président turc, Abdullah Gül, y a pris ses quartiers. Et les contraintes sécuritaires de son séjour au Hilton ne plaident pas en faveur de la conférence sur la Cémac. Que faire? Où aller? Une solution de rechange est trouvée au lieu-dit Cercle municipal de Yaoundé. Le lieu est de loin moins prestigieux et peu préparé à accueillir une telle conférence. Mais, il faut faire avec. La conférence se tient avec une salle moitié vide. Le changement impromptu de site et les difficultés à circuler dans le centre ville de la capitale camerounaise pendant une visite de chef d’Etat expliquent en partie les rangs clairsemés du public participant à la conférence du Cercle municipale. La conférence se tient malgré tout.

En toute indifférence gouvernementale.
Le programme de la journée de l’intégration annonce des activités (notamment la conférence sur les réformes institutionnelles de la Cémac) présidées par le ministre de l’économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat). Le lancement de la journée de l’intégration est ramené à 8h 30 mn. Certainement pour donner plus de flexibilité au ministre Motaze, par ailleurs attendu vers midi à l’aéroport international Yaoundé – Nsimalen, où le président turc sera accueilli par le Président Biya. Ces aménagements ne déplacent pas M. Motaze, ministre camerounais assurant la tutelle des questions d’intégration.

L’indifférence des autorités camerounaises a-t-elle inspiré les ambassadeurs et autres chefs de mission diplomatiques ? Les médias ne sont pas en reste. Au final, la journée du 16 mars ne laisse pas de souvenirs impérissables au Cameroun. Malgré l’avis contraire de l’émissaire spécial dépêché du siège de la Cémac à Bangui. C’est quand même un élément important au niveau du Cameroun, le fait que les responsables se sont appropriés la journée de l’intégration Cémac. Pour nous, c’est une marque que le Cameroun est bien partie pour l’intégration.

Concurrence sur fond de confusion
La Cémac célèbre la deuxième journée de l’intégration sous le thème Les réformes institutionnelles de la Cémac. L’institution régionale entend ainsi valoriser son opérationnalité, en se montrant plus impliquée dans le quotidien des populations de la Cémac, avec l’objectif avoué de construire un espace économique réellement intégré en Afrique centrale. Du côté du Minepat, la direction de l’intégration sous – régionale a plutôt orienté ses communications sur les actions de ce ministère et ses réalisations depuis la création de la Cémac. Les échanges étaient axés sur la libre circulation, les efforts du gouvernement dans le domaine de la facilitation des transports, lit on dans le quotidien gouvernemental Cameroon-Tribune, qui rend compte d’une conférence tenue à Douala dans le cadre des festivités de la deuxième édition de la Cémac. On peut constater la dispersion entretenue respectivement par chaque partie. Ce qui n’est pas pour faciliter la tâche aux destinataires -populations- des campagnes de sensibilisation. L’harmonisation de la thématique profiterait aux initiateurs et organisateurs de la journée de l’intégration. De fait, l’exploitation d’un seul thème donne un effet de redondance du message et partant un matraquage médiatique de nature à marquer même les esprits retors.

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Cameroun-Turquie: Une relation récente et pourtant très dense

Abdullah Gül effectuera la première visite d’un président turc au Cameroun, une visite marquée par des perspectives économiques

Renforcer le partenariat
L’arrivée du président turc ce mardi 16 Mars 2010 à Yaoundé sera la deuxième étape d’un voyage africain commencé en RDC et, marquée par le besoin pour la Turquie de renforcer son partenariat avec le continent. La Turquie considère l’Afrique comme un partenaire stratégique, a déclaré dimanche dernier à Istanbul le président Abdullah Gül, avant d’entamer son voyage africain. D’après l’agence de presse turque Anatolie, le président turc a déclaré qu’il rencontrera ses homologues, des hauts officiels et des hommes d’affaires dans les deux pays africains. J’aurai l’occasion de discuter des relations politiques ainsi que des questions régionales et internationales, a-t-il expliqué. Nous discuterons des moyens d’accroître notre coopération, et la Turquie pourra coopérer avec les deux pays sur les secteurs miniers, énergétique, touristique et agricole, a-t-il ajouté. Le chef d’Etat turc arrive accompagné de plusieurs ministres et d’un grand groupe d’hommes d’affaires, selon les média congolais. C’est la toute première visite qu’effectue un Président turc Cameroun. Il s’agit d’une visite d’investigation, d’opportunités d’affaires, a déclaré M. Gül à son arrivée au Congo démocratique, une formule qu’il pourrait bien répéter au Cameroun.

Une ambition préparée
Le volume commercial de la Turquie avec l’Afrique n’était que de 5 milliards de dollars américains en 2003. Il est passé à 15 milliards de dollars en 2009. Des chiffres que les autorités d’Ankara veulent bien augmenter. Notre objectif est de l’élever à 30 milliards de dollars le plus rapidement possible a affirmé le président turc. La première vraie manifestation des ambitions turques en Afrique s’est révélée le 18 août 2008 à Istanbul lors du premier sommet Turquie-Afrique. Cette rencontre avait pour principaux objectifs de forger des liens économiques forts et durables entre les pays africains et la Turquie ainsi que d’explorer différentes opportunités de coopérations. Dans son discours introductif, le président Abdullah Gül, avait déjà estimé que ce sommet de coopération allait pouvoir donner une orientation aux relations bilatérales. Il a également déclaré que son pays aiderait les pays africains dans leurs efforts de développement économique et social, en particulier en coopérant dans des domaines tels que l’agriculture, la santé ou encore l’installation d’infrastructures.

Une percée qui pourrait déranger la France
Les observateurs restent très prudents sur ce partenariat gagnant pour l’Afrique. La France en occurrence sera très attentive à cette percée turque en Afrique. Depuis 2009, le Cameroun est le quatrième pays d’Afrique subsaharienne que visite le président turc. En ce qui concerne le textile par exemple, la Turquie avait noué des contacts avec des partenaires camerounais parce qu’elle visait le marché américain. Dans le cadre de l’AGOA, il est très important d’investir au Cameroun pour un pays comme la Turquie qui veut exporter aux Etats-Unis avait déclaré l’ancien conseiller du ministre turc au Commerce extérieur, Cem Topbas. De la même manière, le gaz Camerounais dont les réserves sont importantes serait aussi convoité. D’un autre côté, la Turquie n’a jamais manqué aucune occasion de rappeler que c’est justement son économie forte qui fait d’elle un partenaire économique de choix ainsi qu’un acteur majeur sur la scène internationale. Les délégations des États africains ont donc rapidement été convaincues par la possibilité de voir la Turquie parler en leur nom au Conseil de sécurité des Nations unies. En effet, le soutien de la candidature turque par les États africains au poste de membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, serait non négligeable. Ce poste vacant est convoité par Ankara qui souhaiterait avoir plus de poids sur la scène internationale, vu ses difficultés à intégrer l’Union européenne.

Cameroun-Turquie en symbiose
Sur le plan diplomatique et politique, Atilay Ersan, le chef de la représentation diplomatique, a été reçu le mardi 23 février 2010 par le premier ministre, Philémon Yang. Il est le premier chef de mission diplomatique turc avec résidence à Yaoundé. Sur le plan économique, le Cameroun exporte principalement vers la Turquie le bois, du pétrole brut, l’aluminium, et importe du ciment, du fer et des métaux, de la levure, des pneus, des équipements de boulangerie et de l’engrais. Sur le plan Culturel, le gouvernement turc a décidé de porter de quatre à six, le nombre de bourses d’enseignement supérieur mises à la disposition du Cameroun au titre de l’année académique 2008-2009. Une offre de quatre bourses pour les études islamiques a également été mise à la disposition du Cameroun, au titre de l’année académique 2008-2009. Juridiquement deux accords unissent Turquie et Cameroun. L’accord de coopération économique, technique et commerciale et l’accord de coopération scientifique et culturelle signés, le 02 mars 2004 à Ankara. Quatre projets d’accords sont en cours de négociation. La visite du président turque coïncidera avec l’ouverture ce mardi 16 mars 2010, d’une rencontre entre hommes d’affaires turcs et camerounais à Yaoundé.

Paul Biya et Abdullah Gül à New York en septembre 2008
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