Les assises dont la problématique porte sur le contentieux historique et le périlleux chemin du Cameroun vers l’indépendance devrait se tenir en 2017 au Cameroun
Un colloque international France-Cameroun dont la problématique porte sur «le contentieux historique» et le «périlleux chemin du Cameroun vers l’indépendance» pourrait se tenir en 2017 au Cameroun, a-t-on appris mardi, 10 janvier 2017, auprès du comité d’organisation.
Ladite rencontre dont les principaux thèmes seront la Paix, la Vérité historique et la Réconciliation des c urs et des mémoires devrait permettre une meilleure compréhension de cette période «sombre» du Cameroun, et dont diverses sources demandent notamment une déclassification des archives françaises.
Dans les notes préparatoires, le comité d’organisation représenté par l’ancien ministre de la Recherche scientifique et Technique (Minresi), Henri Hogbe Nlend, par ailleurs ancien leader du parti nationaliste l’Union des populations du Cameroun (UPC), citant l’ex-Haut-commissaire Pierre Messmer, renseigne qu’il sera question de mieux appréhender la complexité juridique de ce pays.
Et pour cause, «en trois quarts de siècle, de 1885 à 1960, trois colonisateurs : Allemands jusqu’en 1914, puis Français et Anglais, soumis au contrôle de la Société des Nations, entre les deux guerres, et de l’Organisation des Nations Unies, après la Seconde Guerre mondiale».
A n’en point douter «c’est une situation exceptionnelle. Et la décolonisation du Cameroun sera aussi atypique que sa colonisation : la France accordera l’indépendance à ceux qui la réclamaient le moins, après avoir éliminé politiquement et militairement ceux qui la réclamaient avec le plus d’intransigeance ; dans les régions bassa et bamiléké, l’ordre n’est pas encore complètement rétabli le 1er Janvier 1960, lorsque le Cameroun, sous administration française, devient indépendant.»
A l’occasion de son déplacement au Cameroun le 3 Juillet 2015, le Président de la République française, François Hollande, a rappelé :«la répression particulièrement violente qui a eu lieu au moment de l’indépendance du Cameroun et insisté, dans ce contexte, sur la lucidité avec laquelle les pages les plus tragiques de notre histoire commune doivent être regardées».
L’objet du présent colloque est de lancer le premier grand débat historique de vérité sur tous les sujets ayant trait à cette période difficile de la relation historique Cameroun-France en vue de créer «les conditions permettant de tourner cette page noire et d’ouvrir la voie à la réconciliation des c urs et des mémoires entre le peuple camerounais et le peuple français».
Des participants attendus se recrutent dans les différents secteurs d’activités, en l’occurrence, parmi les historiens, les chercheurs, les responsables politiques, diplomatiques, militaires…camerounais, français, étrangers, internationaux…
Entre 1955 et jusqu’après «l’indépendance octroyée par la France» le 1er janvier 1960, plusieurs régions du Cameroun ont été pilonnées à l’arme lourde par l’armée française, avec des villages entièrement rasés, sans oublier la traque des leaders, militants et sympathisants de l’UPC la partie nationaliste qui militait d’abord pour la réunification des Cameroun de culture anglophone et francophone, avant d’obtenir une indépendance unifiée, ce qui n’était pas au goût de l’administration française qui entendait plutôt installer ses suppôts au pouvoir.
Cet ouvrage de 174 pages est comme un testament que le professeur Kum’a Ndumbe, du haut de sa science et de sa notoriété, laisse à la jeunesse africaine
En 2011, Prince Kum’a Ndumbe III, a publié un ouvrage prophétique au titre interpellant, « 50 Ans déjà ! Quand cessera enfin votre indépendance-là ??? ». Universitaire et militant panafricaniste de renommée internationale, Prince Kum’a Ndumbe III est un homme multiple. Ecrivain prolifique, héritier légitime du trône de Lock Priso (Kum’a Mbape), professeur émérite des universités de rang magistral, éditeur, fondateur de la Fondation AfricAvenir International, orateur de talent, lauréat de plusieurs prix dont celui du Savant 2013 en Culture et Héritage de la A.D. King Foundation et la African Diaspora World Tourism Awards. C’est un digne fils de l’Afrique impériale.
Cet ouvrage de 174 pages est comme un testament que le professeur Kum’a Ndumbe, du haut de sa science et de sa notoriété, laisse à la jeunesse africaine, mais surtout une question pertinente à l’élite africaine. Qu’avez-vous fait de l’Afrique depuis que vous avez pris le pouvoir des mains des Blancs? Quel est votre bilan en cinquante de pouvoir continu ? « Nous n’avons pas piétiné, dit Prince Kum’a Ndumbe III, nous avons reculé dans notre capacité de promouvoir les économies de nos pays. L’Afrique est étranglée, prise en otage, esclave d’une économie extravertie, tournée vers l’extérieur. Les indépendances en Afrique ont été une défaite face à une stratégie bien pensée à long terme des colonisateurs ». Le professeur Kum’a Ndumbe affirme non sans peine que l’Afrique a bel et bien perdu la bataille des indépendances. Nous assistons à un cuisant échec dans la libération des pays africains. Les colonisateurs ont repris la main au point de transformer les dirigeants africains en bourreaux de leurs peuples. Le constat est là. « Si tu veux être l’ami des Européens et Américains d’origine européenne, tu dois être contre les intérêts de l’Afrique et des Africains, être ennemi de l’Afrique ».
Depuis les années 1960 le colonisateur a renforcé la corruption qui est devenue le moyen essentiel de sa politique contre les colonisés. Celui qui ne l’accepte pas est écarté, démis de ses fonctions, exilé ou assassiné. La corruption gangrène les institutions de l’Etat post-colonial en Afrique à tel point que même les pays occidentaux qui l’ont introduite s’en offusquent et sonnent l’alarme. Mais ce ne sont que des larmes de crocodile. Car le mal est déjà fait et bien fait. Le nouveau dirigeant africain installé au pouvoir par le colonisateur a pour fonction de traquer tous ceux dont le c ur bat résolument pour le pays. Il s’accommode pour régner chez soi en délégué régional d’une puissance étrangère ou d’une multinationale. Car on ne vit qu’une seule fois, se dit-il. L’objectif de la politique se résume désormais en la prise de pouvoir, avec éventuellement un changement d’hommes dont le but essentiel est l’accumulation des avantages personnels. Entre temps l’Afrique agonise. Ses enfants meurent, par milliers, tous les jours, dans des villes, dans des campagnes, de faim, de malnutrition, de sida, de paludisme, de violences tribales, de luttes pour une prise de pouvoir, pour l’enrichissement personnel. Elle détient la palme d’or du nombre de réfugiés dans le monde. Plusieurs hauts cadres et technocrates qui ont été formés depuis quarante ans ont déserté leurs pays pour fuir la misère économique, l’insécurité due aux systèmes politiques, pour fuir des systèmes qui tuent dans l’ uf tout grand génie créateur. La question du pouvoir reste donc centrale dans la descente aux enfers des pays africains.
Qu’est-ce qui peut expliquer une pareille hécatombe? Pour le professeur Kum’a Ndumbe III, l’Afrique a failli parce que ses élites ont rejeté en bloc la tradition de leurs ancêtres. « Nous avons relayé notre propre culture au rang de folklore, nous avons dévalué nos propres langues en les qualifiant de dialectes, en les excluant de nos écoles, nous interdisons leur utilisation à nos propres enfants! » L’apport religieux de l’Africain qui date depuis plus de 150.000 ans a été délaissé au profit des croyances étrangères plus récentes. Et cela ne fait que s’amplifier. Comment s’étonner qu’avec un tel degré d’aliénation les élites n’aient pas pérennisé le système colonial?
Cinquante ans après les indépendances l’aliénation des élites s’est confortée et l’Afrique n’a fait que reculer. Le constat est là. Et c’est le mérite de cet ouvrage de l’avoir si bien épinglé. L’auteur lance un appel vibrant à la jeunesse africaine particulièrement. Aujourd’hui, dit-il, nous devons résolument reprendre la lutte de nos parents pour l’indépendance et instaurer des sociétés africaines modernes, dignes, de paix et de tolérance, des sociétés de richesses partagées. À une condition. D’abord s’accepter soi-même, s’accepter en tant qu’Africain. C’est-à-dire se réapproprier notre héritage culturel dans tous les domaines, scientifiques, politiques, économiques, religieux, culturels, linguistiques. L’Afrique est le berceau de l’humanité, berceau des mathématiques, berceau de la religion, berceau de la culture. Puisons donc dans nous-mêmes, dans notre fort intérieur, recherchons nos racines profondes qui puisent leur suc dans la terre de nos ancêtres. Le préalable à tout cela c’est la revalorisation de nos langues maternelles africaines. « Car en maîtrisant sa langue maternelle grâce aux textes qui parlent de la société ancienne et du monde moderne, l’apprenant africain devient un être capable d’une plus grande synthèse pour gérer les contradictions actuelles de la vie en Afrique ».
L’apprentissage de nos langues, leur utilisation dans le système scolaire et universitaire nous réconcilie avec nos ancêtres et avec nous-mêmes. L’auteur demande à la jeunesse africaine de mettre fin désormais aux luttes partisanes, tribales et ethniques dont leurs ainés, dirigeants actuels, se sont fait les tristes et honteux champions, car les défis à relever sont immenses et les potentialités énormes. Le professeur Kum’a Ndumbe III lance aussi un appel à la diaspora africaine pour qu’elle s’investisse davantage dans la libération de l’Afrique. Il cite en exemple l’extraordinaire travail accompli par le Conseil Mondial de la Diaspora Panafricaine qui, agissant à titre de plaignant au tribunal, a déposé plainte pour crime contre l’humanité à l’encontre des puissances européennes qui se sont partagé l’Afrique sans prise en considération aucune des lois, de la culture, de la souveraineté et des institutions africaines à la conférence Africaine de Berlin/Conférence du Congo de 1884/1885. La diaspora africaine devra agir ainsi, faire pression à l’extérieur et à l’intérieur pour la libération définitive de notre Afrique.
La jeunesse africaine et sa diaspora dispersée à travers le monde ont du pain sur la planche. A savoir: « l’introduction de l’histoire africaine et des personnes d’origine africaine dans les curricula scolaires ; le soutien des Africains qui ont été déracinés de leurs pays et chassés de leurs lieux d’habitation; la restitution des terres et autres ressources volées; la reconnaissance du colonialisme et du crime colonial comme étant des crimes contre l’humanité; la restitution des artefacts volés; la mise à disposition des ressources pour la recherche et la documentation en vue de la réhabilitation de l’histoire africaine, de l’appréciation du colonialisme et de ses conséquences ». Ils doivent le faire car il n’y a pas d’autre choix. Ils n’ont plus droit à l’erreur et ils ne peuvent plus se permettre d’échouer comme leurs aînés.