La section France de l’UPC commémore les émeutes de février 2008 au Cameroun

Le président de la section France de l’Union des Populations du Cameroun, Josué Yetna a accepté de nous en parler. Interview

En quoi va consister cette cérémonie de commémoration des massacres de février 2008?
Avant de répondre à cette question, il me semble utile de rappeler brièvement les évènements de ce mois de février 2008, évènements qui ont vu de nombreux Kamerunais descendre dans la rue pour crier famine et manifester leur ras le bol contre le régime corrompu de monsieur Paul Biya. Le 31 Décembre 2007, le président de la république annonce son intention de réviser l’article 6 al. 2 de la Constitution, révision qui lui permettrait tout simplement de solliciter d’autres mandats présidentiels. Cette annonce va créer un tollé général au Kamerun et au sein de la diaspora à l’étranger, en France notamment. Monsieur Paul BIYA ne va pas hésiter à recourir à la force pour imposer sa volonté. Il va pour cela s’en prendre de manière grossière aux journalistes, ordonner la fermeture des stations Magic FM à Yaoundé, Equinoxe radio et télévision à Douala, interdire toute manifestation publique dans la province du Littoral. C’est dans ce climat délétère que commence le 25 février 2008, sur toute l’étendue du territoire national, une grève des taximen, qui s’élevaient contre l’augmentation du prix du carburant alors à 600 fcfa le litre. Ils seront rejoints par des jeunes dont la grande majorité se savait sacrifiée à cause de la mauvaise politique du gouvernement corrompu du RDPC et de ses alliés. Comment rester insensible à la légitime demande de la suppression des 50 000 cfa des droits d’inscription à l’université dans un pays rongé par la misère et la pauvreté ? De nombreuses familles parviennent difficilement à avoir un repas par jour. Elles ont oublié le chemin de l’hôpital lorsqu’elles ont un malade, faute de revenus. Et c’est pour lui demander de changer de politique que ces Kamerunais sont descendus dans la rue ce mois de février 2008. Au lieu de comprendre le malaise de la population et répondre à ses modestes et légitimes demandes, le gouvernement corrompu de monsieur Paul Biya va recourir à la répression. C’est pourquoi par exemple, la Police abat sans sommation deux jeunes à l’intérieur de l’enceinte du Lycée à Bonaberi, dans la matinée du Lundi 25 Février 2008. Des actions de ce genre vont se multiplier pendant plusieurs jours. Diverses sources s’accordent à estimer le nombre de morts entre 100 et 300. Vont suivre, des arrestations arbitraires, des procès expéditifs avec des condamnations spectaculaires, tout cela pour terroriser la population.

Samedi, quel sera le programme de votre journée d’action ?
Au moment où Tunisiens et Egyptiens manifestent pour les mêmes raisons et que leur combat passionne les Kamerunais, la section de France de l’UPC a estimé nécessaire de rendre hommage aux 300 kamerunais morts pendant ces tragiques évènements de février 2008 au Kamerun, mais aussi inviter la diaspora à ne pas seulement se passionner sur ce qui se passe en Afrique du Nord. Les raisons qui ont poussé nos compatriotes à descendre dans la rue il y a trois ans restent d’une brulante actualité. Paul Biya qui en est la principal responsable est toujours là. Après un énième tripatouillage de la constitution, le voilà une fois de trop candidat à sa propre succession. Cette situation va encore durer combien de temps ? Pourquoi en sommes-nous à ce niveau ? Que pouvons-nous faire pour changer cette scandaleuse situation ? Quelle est la place de la jeunesse dans ce combat ? Voilà quelques unes des questions qui seront abordées pendant cette réunion.

Pourquoi associez-vous à cette commémoration, la diffusion du documentaire Françafrique?
Nous saluons au passage l’excellent documentaire de Patrick BENQUET «Françafrique : 50 années sous le sceau du secret». Nous avons choisi de projeter ce documentaire parce qu’il met au grand jour toutes les magouilles qui permettent à la France et à ses suppôts locaux de continuer à maintenir l’Afrique noire dans un état de dépendance totale. Il montre avec éclat les moyens et les procédures qui sont mis en uvre à l’occasion des farces électorales qu’on appelle abusivement élections. Il éclaire sur les mécanismes politiques et économiques qui entretiennent ce système maffieux qu’est la Françafrique. De nombreux pays Africains en sont victimes. Les difficiles situations économiques, politiques et sociales que vivent ces pays y trouvent leur origine. Après avoir vu ce documentaire, nos compatriotes qui le pensent déjà, comprendront encore mieux pourquoi l’Union des Populations (UPC) dit qu’ELECAM n’est pas la solution dans le processus électoral au Kamerun.

Qui est invité à la manifestation que vous organiserez ce 12 février?
C’est une manifestation publique. Elle est ouverte à tous, aux Africains en général, aux Kamerunais en particulier et bien sûr à tous les Amis de l’Afrique. Je rappelle qu’elle se tient le samedi 12 février 2011 à la bourse du travail, 3 rue du Château d’eau dans le 10e arrondissement de Paris. Salle Jean Jaurès. Métro République, à partir de 13H30.

Quelles leçons politiques, l’Union des Populations du Cameroun a-t-elle réellement tirées des émeutes de février 2008?
Trois leçons. 1. La situation de notre pays reste explosive. Aucun des problèmes posés il y a trois ans, n’a été résolu. Nous avons bien entendu eu droit à des discours pompeux du président candidat avec de nombreuses annonces qui n’ont pas été suivies d’effet. Nous pouvons donc à tout moment revivre une nouvelle explosion sociale dans notre pays. 2. Mr Paul BIYA est déterminé à s’éterniser au pouvoir. La modification de l’article 6 alinéa 2 de la constitution lui permet désormais de se présenter comme candidat à l’élection présidentielle autant de fois qu’il le souhaite. Il est resté sourd face aux protestations qui se sont exprimées contre cette initiative. Pour nos compatriotes son ELECAM reste un gadget électoral dont la vocation est de truquer les élections. 3. Les forces favorables au véritable changement restent dispersées. La construction d’une opposition crédible est de plus en plus indispensable si les Kamerunais veulent débarrasser leur pays du pouvoir corrompu du RDPC et de son président qui après 29 ans de pouvoir a réussi classer le Kamerun parmi les pays les plus corrompus et les plus pauvres du monde. Pour apporter un début de réponse à ce problème, l’UPC, le MANIDEM et le PSD ont constitué un premier regroupement de ce que les Kamerunais attendent, à savoir, une véritable opposition débarrassée des transfuges du pouvoir qui ces dernières décennies ont abusé de leur crédulité.

Josué Yetna, président de la section UPC – France
Journalducameroun.com)/n

L’UPC a eu son secrétaire général, Augustin Kodock, au gouvernement pendant plus de 7 ans et dans des départements ministériels comme l’agriculture et le développement rural et aussi celui du plan et de l’Economie, quel bilan fait votre parti de ce passage gouvernemental aujourd’hui?
Votre question me surprend. Il est vrai qu’en se fabriquant des UPC clowns, le pouvoir néocolonial a dès le début des années 60 voulu faire croire que l’UPC avait renoncé à son programme politique. On a vu Monsieur Mayi Matip assumer la vice-présidence de l’assemblée nationale néocoloniale pendant des années. On a vu un célèbre professeur assumer des fonctions de ministre dans un gouvernement de Paul Biya. Monsieur Kodock Augustin a commencé cette collaboration très tôt. Après des postes divers, notamment aux affaires politiques et contentieux, il sera tour à tour nommé par Ahidjo Secrétaire d’Etat aux finances entre 1963 et 1965 dans le gouvernement dirigé par Charles Assalé. En 1962, il devient Directeur des études et du contentieux au Minat. En 1968, Ahidjo le fait nommer à la Banque Africaine de développement (BAD). Il en sera le vice-président chargé des finances entre 1977 et 1980. En 1980, Paul Biya le nomme PDG de la Camair. En février 1991, Gilbert Andze Tchoungui, à l’époque ministre de l’administration territorial donnera par décret, la direction d’une énième UPC clown légale à Mr Kodock. Aujourd’hui, Paul Biya se sert du même Kodock pour traîner le Docteur Samuel Mack-kit Président de l’UPC et le professeur MOUKOKO PRISO, Secrétaire Général de l’UPC devant les tribunaux depuis plus de dix ans. Il est difficile avec un tel parcours au service de l’UC et de l’UNC de AHIDJO ensuite du RDPC de Biya de venir prétendre représenter l’UPC des UM NYOBE, FELIX ROLAND MOUMIE, OUANDIE ERNEST qui au passage était dans le maquis en 1963 quand Mr Kodock assumait les fonctions de Secrétaire d’état aux finances, nommé par le AHIDJO. Lorsque OUANDIE est exécuté le 15 janvier 1971, sa tête tranchée et sanglante, empalée et exposée sur la place de Bafoussam, personne n’entendit un murmure de protestation de Augustin Frédéric KODOCK BAYIHA, tout occupé qu’il était à servir le régime d’Ahidjo. Les observateurs avertis et la grande majorité des Kamerunais savent aujourd’hui que Mr Augustin Kodock est tout sauf membre de l’Union des Populations du Cameroun (UPC). Plus personne de sérieux ne doute de son statut peu honorable de bras armé du pouvoir, payé pour saboter l’UPC. Il est étonnant que persiste cette confusion auprès de quelques compatriotes. l’UPC ne peut par conséquent être associée de quelque manière que ce soit au bilan catastrophique des pouvoirs successifs au Kamerun, en particulier celui de monsieur Paul Biya, responsable exclusif des émeutes de février 2008.

Quelle est la position de l’UPC sur Elecam et sur les élections présidentielles, que Paul Biya a confirmées pour cette année 2011?
Pendant longtemps, l’UPC a été seule à se battre pour demander un code électoral juste dans notre pays. En 2000, l’UPC a proposé la mise sur pied d’une CENI (commission électorale nationale indépendante) pour assurer le déroulement des élections au Kamerun. En 2003, l’UPC a proposé la satisfaction de six préalables pour les élections au Kamerun, cessent d’être une farce. Nous proposions : Une Commission Electorale Nationale indépendante (CENI), des élections au scrutin majoritaire à deux tours, au moins 8 millions d’électeurs inscrits sur les listes électorales, chacun recevant sa carte d’électeur à l’inscription même, la majorité civile et le droit de vote à 18 ans, le droit pour tout Camerounais de se porter candidat à toute élection sans obligation d’être membre d’un parti politique, le droit de vote effectif pour les Camerounais vivant à l’étranger. Il a fallu attendre que les pays occidentaux fassent des remarques sur le déroulement des élections au Cameroun, pour que Monsieur Biya s’en émeuve. Il va dans un premier temps servir aux Kamerunais un gadget appelé ONEL. Ce dernier ne durera pas. Il et sera vite remplacé par ELECAM. Il n’y a eu aucun débat, aucune consultation nationale avant la promulgation de la loi portant création d’ELECAM. C’est par conséquent une initiative personnelle du président de la république. Les structures de ce nouveau gadget électoral ainsi que les personnalités qui l’animent ont été choisies par le premier ministre, membre du bureau politique du RDPC. L’Article 8 (alinéa 3) est très claire à ce propos. Il dispose: « Le Président, le Vice-président et les membres du Conseil Electoral sont nommés par décret du Président de la République après consultation des partis politiques représentés à l’Assemblée Nationale et de la Société Civile. (Alinéa 4) : Le Président et le Vice-président du Conseil Electoral assurent les fonctions de Président et Vice-président d’Elections Cameroon ». Tous les membres de ce « gadget » sont donc nommés par Monsieur Paul Biya, président du RDPC. Il s’agit donc d’une loi conçue par le RDPC seul et pour le candidat du RDPC. C’est pour cela que l’UPC, ELECAM n’est pas la solution. Elle assure à coup sûr la « victoire » du candidat RDPC à toutes les consultations électorales. L’UPC la dénonce ELECAM avec force et renouvelle sa proposition faite il y a onze ans et qui garde toute son pertinence.

Qui sera le candidat de la diaspora de l’UPC pour les élections à venir, si jamais ce parti acceptait d’y prendre part?
Il est clair pour notre parti que participer aux élections avec le code électoral actuel, revient tout simplement à apporter sa caution à une farce électorale de très mauvais goût dont les résultats sont connus à l’avance. L’UPC a fait des propositions qui relèvent du bon sens. L’accélération des évènements en Afrique du nord, l’attitude de nombreux pays hier parrains et aujourd’hui prompts à dénoncer les dictatures avec lesquelles ils collaboraient et enfin le sort qui est réservé aux dictateurs déchus, voila des paramètres qui devraient inspirer Monsieur Paul Biya et ses stratèges pour qu’ils comprennent la nécessité de revoir rapidement leur loi sur les élections. Quant au candidat de la diaspora de l’UPC, il sera celui que le parti désignera. La diaspora de l’UPC n’est pas une entité à part. Elle fait partie du PARTI UPC.

Un dernier mot pour nos lecteurs?
Nous souhaitons pour eux que l’année 2011 soit meilleure que la précédente. Notre continent va connaître de nombreuses élections présidentielles. Celle du Kamerun est normalement prévue au deuxième semestre de cette année. Nous nous battons pour qu’elle se déroule dans les meilleures conditions. Nous les invitons à consulter notre site internet upc-cameroon.com pour prendre les nouvelles des activités de l’UPC dans le monde. Leurs critiques mais leurs propositions y seront les bienvenues.

Emeutes dites « de la faim », février 2008
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