Après les attentats de Maroua, les Camerounais appelés à «changer d’habitude»

Le Délégué général à la sureté nationale et le ministre de la Défense demandent aux populations de redoubler «plus que jamais» de vigilance; et de collaborer avec les forces de défense et de sécurité

Après les attentats perpétrés par deux kamikazes mercredi à Maroua, dans le chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord, c’est la mobilisation dans les différents états-majors de la police, de la gendarmerie et de l’armée, en terme de recherche de stratégie, pour parer à d’éventuels actes similaires dans d’autres villes et localités du Cameroun.

Le ministre délégué à la présidence en charge de la Défense, Edgar Alain Mebe Ngo’o, a conduit une délégation interministérielle jeudi à Maroua. Dans la déclaration faite à la presse, le Mindef a demandé aux populations de redoubler de vigilance «plus que jamais». M. Mebe Ngo’o a suggéré dans la foulée aux populations de collaborer plus étroitement avec les forces de défense et de sécurité en dénonçant tout individu suspect dans leur environnement. «Tout le monde a le devoir d’apporter sa contribution», a-t-il recommandé

Défense populaire. Le concept défendu par le ministre de la Défense depuis le début de la guerre contre Boko Haram, semble partagé par le Délégué général à la sûreté nationale. Comme nous l’avons suivi vendredi matin, dans le cadre de l’émission «Canal Police», diffusée sur la CRTV, Martin Mbarga Nguélé demande aux populations de «changer d’habitude» en étant notamment plus «vigilant» au quotidien, avec les individus suspects et les «colis douteux». Le DGSN rappelle qu’il est possible de contacter la police, sur toute l’étendue du territoire national, en composant gratuitement le 1500, le 117, ou le 120. L’anonymat sera préservé, rassure-t-il.

Vigilance tous azimuts
Les attentats perpétrés mercredi à Maroua ont fait au moins 15 morts et 32 blessés, a établi la presse publique vendredi, revoyant à la hausse le bilan de 12 morts et 32 blessés, présenté initialement par la présidence de la République.

Ils étaient le fait de deux jeunes filles «âgés de moins de 15 ans», a indiqué le ministre de la Défense aux médias.

A Maroua, on envisage de dégager les rues en remettant les enfants abandonnés aux services du ministère des Affaires sociales.

Le gouverneur de la région de l’Extrême Nord, Midjiyawa Bakary, a annoncé au lendemain des attentats que les mesures sécuritaires allaient être renforcées à Maroua. La région était déjà sous un certain nombre de mesures avant le drame du 22 juillet: couvre-feu à 18h, interdiction de port du voile intégral, interdiction de circulation des motos dès 18h dans tous les six départements de l’Extrême-Nord, entre autres. En sus de ces mesures, le gouverneur a demandé aux forces de défense et de sécurité de mettre «plus de rigueur» dans les contrôles. Il a également indiqué que des ceintures de sécurité seront établies autour des principaux marchés du chef-lieu, et les rassemblements proscrits dans certains endroits comme les débits de boisson.

A l’Est, région qui partage des frontières avec la République centrafricaine – pays en crise depuis décembre 2013 et d’où viennent souvent des groupes armés pour mener des enlèvements en territoire camerounais – l’alerte est montée d’un cran avec les attentats de Maroua. Le gouverneur de cette région, Samuel Dieudonné Ivaha Diboua a prescrit un certain nombre de mesures: Contrôle systématique à tous les postes de contrôle et de gendarmerie; interdiction de surcharge dans les cars de transport en commun, obligation pour chaque citoyen d’avoir toujours avec soi une carte nationale d’identité, escorte par les forces de défense et de sécurité de tous les véhicules de transport en commun qui quittent la ville la nuit.

Une scène de la vie quotidienne à Maroua
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Boko Haram n’a pas enregistré 300 désertions au Cameroun

Le porte-parole du ministère de la Défense contredit les médias qui lui attribuent la paternité de la nouvelle

Depuis le début du mois de septembre, «près de 300 personnes qui déclarent appartenir à Boko Haram ont déserté les rangs de la secte Boko Haram et ont demandé à se réfugier au Cameroun», a révélé, mardi à Anadolu, le Lieutenant-Colonel Didier Badjeck, responsable au ministère de la défense camerounais. Cette «information», publiée le 30 septembre 2014 par l’agence de presse Anadolu Agency et reprise sur de nombreux sites en ligne est sujette à polémique. Elle n’émanerait pas du ministère de la Défense, encore moins du chef de la division de la Communication au ministère de la Défense, le Lieutenant-colonel Didier Badjeck, qui a déclaré à Journalducameroun.com n’avoir jamais tenu ce genre de propos.

De nombreuses personnes continuent de diffuser des nouvelles parfois fantaisistes sur l’armée camerounaise dans le cadre de la guerre contre Boko Haram. Dans certains médias orientés vers le Cameroun, ou dans les médias internationaux, les intox sont devenues légion. Le 28 juillet dernier, c’est RFI qui avait créé le tollé en annonçant la libération de l’épouse du vice-premier ministre Amadou Ali, enlevée la veille. A ce jour, elle est pourtant toujours aux mains de ses ravisseurs.


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Boko-Haram: Après l’attaque de Kolofata, l’armée se veut sereine

Le chef de la division de la Communication au ministère de la Défense estime qu’il faut laisser le temps aux forces de défense de réagir et de donner une riposte proportionnelle

L’armée camerounaise réévalue son dispositif après l’attaque survenue dimanche aux premières heures de la matinée dans la localité de Kolofata dans l’Extrême Nord. Attaque attribuée à des Islamistes de Boko Haram à l’issue de laquelle 14 Camerounais sont morts et 17 personnes enlevées dont l’épouse du Vice-Premier ministre Amadou Ali et le maire de la Commune de Kolofata: Le Sultan Seini Boukar Lamine. «Qu’on laisse aux forces de défense le temps d’analyser, de comprendre et de réagir de façon proportionnelle», s’est exprimé ce mardi dans la presse publique le chef de la division de la Communication au ministère de la Défense, le lieutenant-colonel Didier-Badjeck.

Réfutant l’effet de surprise, le lieutenant-colonel Didier Badjeck estime que «la secte est montée en puissance. Le dispositif déployé a été efficace jusqu’ici.A chaque nouvelle situation sur le terrain, nous avons une conduite qui est telle que nous donnons une riposte proportionnelle. Nous ne parlons plus de riposte appropriée». Pour encourager les troupes sur le terrain, le chef de la division de la Communication au ministère de la Défense rappelle des victoires passées. «Nous irons au bout de notre mission comme cela a été fait sur la côte Atlantique avec le terrorisme qui y a été réduit à sa plus simple expression.Nous sommes en train de trouver le temps de traitement de la menace et dans un avenir proche, Boko Haram ne sera qu’un mauvais souvenir, comme ce fut le cas à la frontière de l’Est», a-t-il rappelé.

Au cours de l’attaque survenue dimanche à Kolofata, les assaillants ont saccagé et mis le feu à la maison du vice-Premier ministre Amadou Ali, incendie qui a causé la mort de deux personnes. Avant cet incendie, selon le reporter du quotidien gouvernemental, ils auraient tué le frère cadet du vice-Pm et six autres personnes, emmenant une dizaine d’otages dont l’épouse du vice-PM et son garde du corps. Amadou Ali se trouvait à Maroua au moment des faits. Chez le maire de la Commune de Kolofata, le propriétaire des lieux va être kidnappé ainsi que neuf membres de sa famille. Quatre personnes seront tuées. Après ces deux forfaits, ils auraient encore abattu un infirmier de garde et un homme sur le chemin. Toujours selon le décompte fait par Cameroon Tribune, sept militaires auraient été blessés et six véhicules emportés de chez le vice-PM.

Le président Biya lors de la fête de l’armée, à Bamenda, en décembre 2010
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Selon le ministère de la Défense, la menace Boko Haram est «difficile à juguler»

En cause, la facilité des membres de Boko Haram à se fondre au sein de la population

Moins de deux semaines après le Sommet de Paris sur la sécurité au Nigéria, au cours duquel le chef de l’Etat camerounais avait déclaré « la guerre » à la secte Boko Haram, l’armée reconnait avoir déployé d’importants moyens humains et matériels dans la partie septentrionale du pays. Dans une interview accordée à la presse publique de ce 30 mai 2014, le chef de la division de la Communication au ministère de la Défense, le lieutenant-colonel Didier Badjeck, explique: « Le chef de l’Etat a pris une décision à un niveau stratégico-politique avec ses pairs. Ceci est pour nous une instruction et nous la traduisons au niveau stratégico-militaire [.] Vous savez aujourd’hui que Boko-Haram a des moyens importants, c’est la raison pour laquelle nous n’allons pas rentrer dans le détail de notre déploiement sur le terrain ». Détail apporté pour démontrer l’engagement de l’Etat, l’installation des commandants des 31e et 32e Brigades d’infanterie motorisée (BRIM) à Ngaoundéré et à Maroua ainsi que la création d’une 11ème BRIM à l’Est.

Malgré la logistique, le ministère de la Défense reconnait toutefois qu’il s’agit d’un combat difficile à mener à terme. « Dans le cas actuel, vous avez des adversaires qui n’ont pas de base, vous ne savez pas d’où ils viennent. Il leur suffit d’un simple renseignement sur nos positions et ils attaquent en fonction des éléments de notre présence. Cette menace est difficile à juguler. Il est important ici que la collaboration soit efficace entre les forces de défense et la population. Parce que ces éléments de Boko Haram vivent parmi nous. Il est très difficile de faire la différence entre un élément de ce mouvement et un compatriote vivant dans cette partie du pays », reconnaît-le Lieutenant-colonel Didier Badjeck.

Au cours de cet entretien, le porte-parole du ministère de la Défense a reconnu qu’il n’y a pas encore à ce jour de mutualisation des moyens avec le Nigéria voisin. « Chaque pays défend son territoire », a-t-il affirmé. Néanmoins, des projets existent dans ce sens avec la République du Tchad dont le président s’est rendu au Cameroun du 22 au 23 mai dernier. De source militaire, à l’occasion de cette visite, le ministre camerounais de la Défense et son homologue tchadien ainsi que les experts des deux pays, se sont rencontrés afin de voir dans quelle mesure il pourrait y avoir une mutualisation des forces. « Il y aura une bonne coordination dans ce sens », confirme-t-il.


A propos du moral des troupes qui ont déjà vu une dizaine des leurs tomber sur le front ces derniers mois, le porte-parole du ministère de la Défense assène : « Nous sommes en guerre et nos forces sont préparées à cela. Des moyens conséquents sont mis en place. Il peut y avoir des risques, nous y sommes préparés [.] A travers cette guerre, tout le monde doit prendre conscience des vertus de la paix », recommande le lieutenant-colonel Didier Badjeck.

Le ministre de la Défense du Cameroun, Edgar Alain Mebe Ngo’o
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