Un dossier pour parler des maladies rares (III): Le Naevus géant congénital

Le Naevus géant congénital (NGC) est une malformation congénitale de la peau présente dès la naissance

Quoique les naevi communément appelés grains de beauté, apparaissent au cours des premiers mois de la grossesse, ils sont généralement indécelables à l’échographie. Les nappes de cellules pigmentées peuvent couvrir parfois jusqu’à 99 % du corps du nouveau-né sous la surface de la peau et peuvent s’étendre aussi profondément que le système nerveux central. La peau touchée par le NGC est généralement recouverte d’un système pileux plus abondant que sur les autres parties du corps. Les NGC sont géants quand ils recouvrent une grande partie du corps, de la face ou du cuir chevelu, avec un diamètre dépassant 20 cm. Ils peuvent avoir, selon la localisation, une forme symétrique qualifiée par le corps médical de caleçon, pèlerine, ou maillot de bain. Le dos est la région la plus fréquemment touchée. Cette maladie rare ou orpheline reste encore peu connue des médecins et encore moins du grand public. Le NGC est une pathologie ni héréditaire, ni transmissible. Parfois spectaculaires, souvent avec excroissances ou poils, ces taches risquent de dégénérer en cancer de la peau. Pour cette raison, les naevi sont soignés quand c’est possible par des exérèses chirurgicales et sont surveillés de très près par une équipe médicale pluridisciplinaire.

Quels sont les risques liés au NGC?
Le premier concerne le risque de dégénérescence en mélanome, d’autant plus important que la surface du naevus est grande. Le mélanome est un des cancers les plus mortels de l’enfant et son incidence augmente. Toutefois, il peut être soigné s’il est dépisté tôt, même chez les enfants et adolescents. Ce dépistage précoce est très difficile chez les personnes avec un NGC. Naître avec un naevus géant congénital (toute taille confondue d’ailleurs) multiplie par 465, par rapport au reste de la population, le risque de développer un mélanome pendant l’enfance ou l’adolescence. Selon la même étude, chez 636 patients atteints d’un NGC, 3 % ont contracté un mélanome dont les deux tiers au sein du NGC principal. Ce chiffre pourrait être plus élevé en l’absence de traitements préventifs. Les complications neurologiques graves semblent survenir principalement (mais pas exclusivement) avant l’âge de 5 ans. Les cellules qui pigmentent la peau jouent normalement un rôle critique de protection. Leur accumulation anormale dans les méninges peut mener à l’hydrocéphalie, une rétention du liquide céphalorachidien dans les cavités du cerveau qui mène par pression à des convulsions et peut être mortel. Les traitements de l’hydrocéphalie soignent les symptômes uniquement. Il n’existe aucun traitement préventif ni d’indication prédictive expliquant pourquoi certains enfants atteints de NGC touchant aux méninges ont des complications neurologiques et d’autres non. Un dernier problème, non négligeable, relève du domaine social et psychologique: un enfant victime de malformations visibles de son corps peut développer une image de soi négative. Une étude sur la question démontre que même des approches médicales et cosmétiques qui s’avèrent physiquement inutiles pour soigner un NGC, ont un effet bénéfique sur la psyché du patient.

Mata, petite camerounaise de 3 ans atteinte de naevus géant congénital
Almoha Association)/n

Les thérapies actuelles
*Excisions par chirurgie réparatrice et reconstructive: Aujourd’hui, la chirurgie réparatrice et reconstructive est préconisée dès les premiers mois qui suivent la naissance. Ceci afin de limiter le risque de dégénérescence et d’éviter les répercussions psychologiques que l’enfant pourrait ressentir tout au long de sa vie (le regard des autres, honte, peur de se montrer, exclusion, etc). De plus, les nourrissons possédant un excédent de peau et celle-ci étant très souple dans les deux premiers mois de sa vie, une intervention rapide permet de réduire le nombre des interventions ultérieures.

*Expansion cutanée: Cette technique est la plus couramment utilisée pour l’exérèse du Nævus Géant Congénital, elle consiste à accroître la surface de peau saine pour recouvrir la peau malade qui sera enlevée. Cette technique n’est pas utilisable sur les membres. Expansion préalable par ballonnets gonflables placés, lors d’une première opération, sous la peau saine située dans le voisinage du nævus à enlever. Ces ballonnets sont peu à peu remplis de sérum physiologique, soit plusieurs litres. Le ballonnet, peu a peu gonflé, permet de distendre la peau. Cette technique, à raison d’un gonflage par semaine, dure entre 3 et 6 mois. Cela permet d’avoir une grande quantité de peau saine qui recouvrira la plaie laissée par l’exérèse du nævus géant. Précision non négligeable dans la lourdeur de cette thérapie: une vingtaine d’intervention chirurgicales sont parfois nécessaires pour venir à bout des grands naevi.

*Les greffes de peau totale: Cette technique s’utilise dans le cas d’une localisation sur les membres ou le visage, le résultat esthétique est moins bon qu’avec la technique précédente mais cela permet l’ablation du nævus géant. Le but de la chirurgie des naevi géants est de supprimer entièrement la lésion cutanée, pour des raisons thérapeutiques, préventives etr réparatrices. La peau saine est prélevée sur une autre partie du corps, laissant des cicatrices importantes.

*Curetages et dermabrasion (traitements de surface): Ils consistent à retirer le plus tôt possible la partie superficielle du nævus à l’aide d’une spatule chirurgicale en grattant la peau. En effet, pendant les 2 premières semaines qui suivent la naissance, les cellules naeviques sont situées en surface, elles formeront ensuite toute l’épaisseur de la peau. Le principal inconvénient de cette technique, c’est qu’il reste des mélanocytes (cellules qui constituent le Nævus Géant Congénital), de ce fait, une repigmentation est possible et surtout le risque de dégénérescence persiste. Ce traitement est indiqué, pour les très grands nævi géants, lorsque l’on ne dispose pas d’assez de peau saine.

*La destruction par laser (traitement de surface): Elle consiste à détruire la peau sur toute son épaisseur. Pour être efficace, il faudrait infliger une brûlure de 3ème degré. Actuellement, les essais menés sur les enfants montrent une recoloration rapide, donc l’inefficacité de cette technique à détruire toutes les cellules malades.

Logo association Naevus
Flac-anticorrida.org)/n

Actions: Nadine Abondo, une camerounaise au service des maladies rares et orphelines

L’association de lutte contre les maladies rares et orphelines lance ses activités ce 10 juillet à Paris

C’est quoi une maladie rare et orpheline?
Rares ou orphelines, ces termes désignent en réalité les mêmes pathologies. Selon les critères de l’OMS, une maladie est dite rare lorsqu’elle touche moins d’une personne sur 2000. Ce qui signifie qu’à l’échelle de la population française, plus de 3 millions de personnes sont concernées, 50 millions en Afrique 1 million au Cameroun. On recense entre 7et 8000 maladies rares et orphelines à travers le monde et 5 nouvelles sont découvertes chaque semaine grâce aux avancées de la Recherche. Le nombre de personnes atteintes, à un degré ou un autre, par une maladie rare est évalué, par les instances européennes, de 6 à 8% de la population. En Amérique du Nord, on retient un taux de 8 à 10%). L’appellation « maladies orphelines » expriment les difficultés très particulières que rencontrent les personnes atteintes de ces maladies, sont à savoir: l’isolement, l’errance diagnostique, le manque de reconnaissance, le manque de traitements, l’inadéquation de la prise en charge, l’absence ou l’insuffisance de la recherche

Quels sont les plus courantes en Afrique?
La drépanocytose va en être la plus fréquente. On va aussi retrouver l’albinisme, mais ces maladies étant d’origine génétique pour la plupart(80%), elles concernent toutes les catégories sociales et touchent aussi bien les populations dans les pays développés que celles dans les pays en développement. D’où la nécessité d’une prise en charge mondiale de toutes les instances en charge des questions de santé. Dans tous les cas, l’absence de données épidémiologiques sur ces maladies en Afrique ne permet pas de rendre compte aujourd’hui de l’impact réel et de l’incidence dans la population africaine.

Vous avez mis en place une association Association de Lutte contre les Maladies Orphelines et le Handicap en Afrique. Parlez nous en?
En effet, j’ai travaillé pendant 8 ans au service d’aide aux malades de la Fédération des maladies orphelines en France. Et c’est en voyant arriver de plus en plus de cas d’Afrique que j’ai décidé de créer cette association pour mettre à la disposition des « miens » mes compétences et mon expérience. Car si ces maladies orphelines commencent à être reconnues et mieux prises en charge en Occident, en Afrique, elles restent relayées au rang de la « sorcellerie, de la malchance ou du mauvais sort ». Les personnes qui en sont atteintes sont fortement stigmatisées et font l’objet d’abandon, de rejet et de discrimination. C’est le cas notamment des enfants albinos stigmatisés et tués dans certaines cultures africaines. Face à cette stigmatisation, certaines familles font alors le choix de cacher les enfants. La conséquence étant que ces derniers ne bénéficieront ni d’un suivi médical, ni d’une prise en charge de leur handicap et d’une éducation spécialisée.

Qui est Nadine Abondo?
J’ai travaillé pendant 8 ans à la FMO en y faisant de l’écoute de l’accompagnement des malades et de leurs familles. J’ai ainsi eu un cursus très varié et riche. Experte en politique sociale et en intervention médico-sociale. Un diplôme d’Etat d’ingénierie sociale, une maitrise en Sciences de l’éducation et un diplôme Universitaire en génétique etc. Toutes ces formations ont permis de mieux cerner les problématiques générales en intervention médico-sociale.

Comment vous êtes vous retrouvée à être impliquée dans cette lutte?
Des souvenirs d’enfants abandonnés ou qu’on laisse mourir dans un coin parce qu’ils sont hermaphrodites donc « monstres » des enfants albinos stigmatisés alors qu’ils sont justes malades, la maltraitance envers les enfants en situation de handicap, je ne supporte pas toute cette injustice. C’est une injustice sociale que se rajoute à l’injustice de la naissance de naitre avec une maladie génétique.

Vous avez commencé par le Cameroun? L’état des lieux, un bilan de votre action au Cameroun?
Oui en effet, étant d’origine camerounaise, j’ai commencé par là. Une Plateforme maladies rares, maladies orphelines a déjà été mise en place. Elle accueille déjà et accompagne les malades et leurs familles dans le système de soins. Nous avons déjà des médecins référents sur place qui prennent en charge les malades. Je retourne au Cameroun en Aout pour une journée de solidarité et j’emmène du matériel pour personnes en situation de handicap.

Quels son vos soutiens? Notamment au Cameroun
Pour l’instant, étant tout au début, notre partenaire est aujourd’hui l’INSERM à travers Orphanet. La directrice étant la présidente de notre Conseil Médical et Scientifique.

Nadine Abondo
Journalducameroun.com)/n