Approvisionnement en eau potable: L’expérience des communes de l’Ouest

Longtemps laissés à l’abandon, les forages sont (re)devenues les principales sources d’approvisionnement des populations qui s’impliquent désormais dans leur entretien

Quatre murs en dur encadrant un portillon fermé à l’aide d’un cadenas, c’est la protection que les populations de Bafou Centre, dans la commune de Nkongzem, arrondissement de Nkong-Ni, département de la Menoua, à l’Ouest-Cameroun, ont apporté à leur forage. Le point d’eau, réceptionné en 2011, est désormais perçu comme un trésor dans ce village ne bénéficiant pas de raccordement au réseau public de distribution d’eau potable. «Il y a quelqu’un qui ouvre et ferme. Nous avons des horaires pour puiser», explique le président du Comité de gestion de cette borne-fontaine. A Bafou Centre, tout le monde est astreint à une certaine discipline: le point d’eau est ouvert de 15h à 19h de lundi et vendredi ; et toute la journée le week-end. Chaque famille doit par ailleurs contribuer à hauteur de 500 F CFA mensuellement pour l’entretien et la maintenance du point d’eau. Et pour dissuader ceux qui voudraient contourner les règles pour puiser l’eau à la nuit tombée, les responsables du village ont fait poser des tessons de bouteille sur la clôture du point d’eau.

Cette prise de conscience n’est pourtant pas venue naturellement. «Avant il y avait les projets Scan-Water. On ne nous avait pas dit qu’on devait participer et les appareils sont tous tombés en panne. Avec les séminaires du Paddl, on a pu mettre sur pied des comités de gestion des points d’eau. Nous avons retenu de la formation que nous sommes les bénéficiaires de l’eau et que nous devons entretenir les points d’eau», affirme le président du comité de gestion du point d’eau de Mbeng.

Le Programme d’appui à la décentralisation et au développement local (Paddl), mis en uvre au Cameroun par l’agence technique de la coopération allemande (GIZ) depuis 2003, s’est donné pour principal objectif de favoriser le développement local ainsi que les structures décentralisées pour leur permettre de jouer pleinement leur rôle en matière de transfert de compétences. L’approvisionnement en eau potable est emblématique du travail mené par le Paddl dans des communes qui ne sont pas raccordées au réseau hydraulique public.

Gouvernance
«Le problème de l’eau au Cameroun et en Afrique est un problème de gouvernance», relève Emmanuel Mvé, délégué régional du ministère de l’Eau et de l’Energie pour l’Ouest.

L’Etat, les élites de certaines communes et certains organismes ont construit des forages pour permettre aux populations d’avoir accès à une eau saine. Mais la plupart sont tombés en désuétude du fait du manque d’entretien. Illustration à Nkongzem, commune du département de la Menoua, située à 42 Km de Bafoussam, chef-lieu de la région de l’Ouest.

La localité de 225 Km2 disposait en début d’année dernière de 153 ouvrages hydrauliques, avec seulement 67 opérationnels. Le Paddl, l’ayant retenu pour y apporter un appui dans le domaine, a suggéré à la mairie de mettre plus d’accent sur la réparation des forages et beaucoup moins sur la construction de nouveaux, la construction d’un forage coûtant 8 millions de F CFA en moyenne, alors que la réhabilitation d’une borne-fontaine dépend parfois du remplacement d’une pièce qui coûte 5000 F CFA.

«Avant on naviguait à vue», reconnait le maire de Nkongzem. «La plus grande partie des points d’eau qui existaient ne fonctionnaient pas. Les autorités locales passaient leur temps à créer de nouveaux points d’eau sans passer à la maintenance. Nous nous sommes rendus compte, grâce à la coopération avec le Paddl-GIZ, qu’en mettant l’accent sur la maintenance des points d’eau existants, on pouvait satisfaire une partie non négligeable de la demande locale», indique-t-il. La localité a bénéficié d’une série de séminaires et de formations d’artisans réparateurs dans la commune. Ces derniers travaillent de concert avec les comités de gestion de point d’eau (des personnes choisies par les populations d’un village donné pour gérer l’infrastructure hydraulique existante) en cas de panne.

A Leskachoun Foghap, l’un des villages de la commune de Nkongzem., le comité de gestion du point d’eau a décidé que chaque famille devrait cotiser 500 F CFA mensuellement, d’après les explications de son président, Joseph Guedia. «Les cotisations sont régulières», assure-t-il. Lorsqu’une panne survient, les fonds collectés au profit de la caisse communautaire permettent de faire appel aux artisans-réparateurs. Si le dépannage de la panne ne peut être réglé avec la seule caisse de la commune, le comité de gestion saisit la mairie qui peut soutenir financièrement la réparation du point d’eau.

Le forage de Bafou Centre, dans la commune de Nkongzem, arrondissement de Nkong-Ni, département de la Menoua, à l’Ouest-Cameroun
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Le maire de Nkongzem., Thomas Ndzouebeng, se félicite du vote par le conseil municipal d’une enveloppe de 10 millions de F CFA sur l’exercice 2015 pour la maintenance des points d’eau. «Nous avons dû sacrifier certaines lignes au profit de l’eau», confie-t-il. La mairie a réparé depuis le début de l’année 2015 six forages ce qui porte le nombre de points d’eau fonctionnels dans cette commune à 73, sur les 153 existants. «Pour la fin 2015, nous devrons être au moins à 100, 110 points d’eau réhabilités», projette-t-il.

Si tous les forages sont réhabilités, il faudra peut-être envisager la construction de points d’eau dans les localités qui ne disposent d’aucune infrastructure, déplore cependant le maire de Nkongsem. «Il peut arriver que dans un rayon de 5km, vous vous trouvez avec trois points d’eau ; et dans un autre rayon de 5km, vous ne trouvez rien. La répartition n’est pas judicieuse», explique M. Ndzouebeng. «Nous nous sommes engagés à promouvoir une gestion intégrée de l’eau», assure-t-il.

Koutaba
Reconnaissance envers le GIZ, c’est le mot qui revient constamment dans la bouche des exécutifs municipaux des différentes communes pilotes choisies par le Paddl.

A Koutaba, commune située dans le département du Noun, toujours dans la région de l’Ouest, il y avait été recensé 58 points d’eau, avant le partenariat avec le Programme, initié en 2014. «Ils ont été diagnostiqués et les problèmes sont connus», affirme le maire, Ibrahim Koutaptou. Le diagnostic a permis de constater que la commune dispose de 16 forages dont 10 en panne ; 33 puits dont 18 en panne et 15 en service ; et de neuf adductions d’eau portable.

Des agents réparateurs ont été formés dans la mairie et au mois de mai 2015, après leurs descentes sur le terrain, on identifiait seulement quatre forages et huit puits en panne. «La Commune a prévu une ligne budgétaire pour le dépannage de l’ensemble des ouvrages», promet le maire. «Quand c’est une petite panne, les populations s’en chargent. Si c’est compliqué et si les coûts sont élevés, la mairie intervient», précise-t-il.

A Bafoussam II, la mairie est allée plus loin dans le développement participatif. Les comités de gestion de points d’eau de village ou de quartier sont tenus de reverser 1000 F CFA mensuellement à la commune contre quittance, sans considération de l’organisation de chaque village ou quartier. Pour ceux qui choisissent de cotiser 50 F, 500 F ou 5000 F, la commune attend ses 1000 F chaque fin de mois. «Si une pompe tombe en panne, et qu’elle nécessite par exemple 350.000 F CFA, nous pré-finançons et le comité de gestion rembourse», explique le maire de Bafoussam II, Emmanuel Tagne Ngeko. «Pour un comité qui n’est pas en règle dans ses cotisations, nous n’intervenons pas en cas de panne», confie le maire. Ici, on demande également aux comités de gestion d’ouvrir un compte pour reverser les cotisations des populations.

«Nous sommes passés de 200 cas de choléra, avant l’accompagnement du Paddl, à 0 aujourd’hui. Avec la sensibilisation, les populations comprennent qu’il faut consommer de l’eau potable», affirme Pierre-Paul Tchoupong, le chef service de développement communal à la mairie de Bafoussam II.

«Pour que les populations s’approprient la nécessité de consommer une eau potable, il faut qu’ils prennent en charge la gestion du point d’eau», constate le maire de Koutaba pour saluer la part financière demandée aux populations.

Cependant, à Koutaba comme dans plusieurs autres communes où le développement participatif commence à devenir une réalité, la maintenance de tous les points d’eau existants ne suffirait pas à assurer un accès à l’eau potable pour tous.

La commune de Koutaba compte en 2015, d’après les chiffres de la commune, à peu près 72.000 âmes pour 58 points d’eau ; soit en moyenne un point d’eau pour 1200 personnes. «Les 58 points d’eau ne sont pas suffisants. Aujourd’hui, il y a encore des gens qui s’approvisionnent dans les marigots», indique Ibrahim Koutaptou. D’après les calculs du maire, la solution serait trouvée si chacun des 144 quartiers de Koutaba disposait au moins d’un forage.

A Bafoussam II, face à ce défi de la couverture géographique, on explore déjà d’autres pistes à l’instar du système gravitaire qui permet de recueillir directement l’eau des roches et d’installer des canalisations qui la conduisent en aval pour la rendre plus accessible aux populations.

«La plupart des outils techniques validés par le ministère de l’Eau et de l’Energie ont été testés à Bafoussam II», se flatte-t-on dans cette commune.

Après les séminaires du Paddl, les communes ont décidé de mettre sur pied des comités de gestion de point d’eau (CGPE). Ici, les membres du CGPE de Koupakagnan Nitikwet, commune de Koutaba
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Mairies et services déconcentrés de l’Etat
S’il a permis une meilleure gouvernance de l’eau, le Paddl a surtout favorisé une meilleure collaboration entre les mairies et les services déconcentrés de l’Etat dans le cadre du processus de décentralisation. «A l’époque, les maires se méfiaient des sectoriels. Ces incompréhensions se sont aujourd’hui estompées», assure Emmanuel Mve, le délégué régional du Minee à l’Ouest.

«Les communes assurent la programmation des travaux en tant que maîtres d’ouvrage ; les travaux sont suivis par le délégué départemental du ministère», illustre le maire de Nkongzem., Thomas Ndzouebeng.

«Un enfant qui ne marche pas encore a besoin d’être élevé. La décentralisation n’est pas encore debout au Cameroun, il faut continuer à l’élever et pour cela il faut des interlocuteurs neutres pour permettre à toutes les parties prenantes de se mettre ensemble», estime pour sa part le maire de Koutaba.

«La GIZ nous a expliqué de fond en comble que le transfert de compétences en matière d’eau potable n’était pas un vain mot et qu’il était d’abord de la responsabilité des mairies», souligne-t-il.

Le Paddl arrive à terme en fin d’année 2015, après avoir été expérimenté dans quatre régions du Cameroun depuis 2003: Centre, Est, Extrême-Nord, Ouest. A l’Ouest en particulier, en matière d’eau potable, l’identification des points d’eau existants, la formation des comités de gestion et des artisans réparateurs, la réhabilitation des infrastructures en panne, etc. ont été menés par Hydrosanté, une organisation de la société civile, partenaire de la GIZ. Hydrosanté estime à cet égard qu’il faut un «suivi citoyen de la mise en uvre des ouvrages hydrauliques» dans les communes.

«On a intégré une stratégie pour pérenniser nos expériences. Hydrosanté aura son expérience documentée, qui pourra être partagée dans d’autres régions du Cameroun», explique Eni Tembon, chef d’antenne Paddl-Ouest.

La GIZ a produit un manuel portant sur les outils de gestion de l’eau, issus de ses expériences et déjà validés techniquement par le ministère de l’Eau et de l’Energie. Ceci afin de mettre à la disposition d’autres communes et régions, où le service public d’approvisionnement en eau potable fait encore défaut, les bonnes pratiques du Paddl.

Le maire de Nkongzem, Thomas Ndzouebeng, se félicite du vote par le conseil municipal d’une enveloppe de 10 millions de F CFA sur l’exercice 2015 pour la maintenance des points d’eau
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Honneur à Jean Batcha!

L’hommage de la diaspora Batcha à un talent. Le symbole d’un peuple de l’Ouest Cameroun.

A nos contrées, leurs héros. A notre pays, ses grands hommes. Certains au lustre reluisant des heures exaltantes de l’Histoire. D’autres, dans l’évolution de nos villages, groupements et terroirs. Si Douala Manga Bell, martyr et héros national, incarne à la fois la résistance et le symbole d’une grande ethnie de la côte du Cameroun, Jean Batcha se pare d’un inaltérable aura posthume.

Samuel Ndjonkou de son vrai nom, commerçant modèle, a été arraché à la vie par les travers de l’intolérance, les torrents de l’extrémisme et la furie de la déraison. Il a été lâchement assassiné, aux premières heures du samedi 14 novembre 2014, par de belliqueux voisins du groupement Batchingou. Un sacrilège ; la tradition du vivre-ensemble bamiléké et les vertus de l’intégration nationale foulées au pied.

La cause: un conflit absurde entre Batchingou et Batcha, exarcerbé par l’organisation d’un festival culturel Batchingou Nga’Nchu. Les premiers contestent l’appellation Mont Batcha attribuée à une chaîne montagneuse emblématique, inscrite dans les ouvrages scolaires, les atlas de géographie et divers documents officiels

Chaque année à l’occasion du Festival Batchingou, une excursion du Mont est prévue, attisant le courroux des Batcha. Ils ont au fil du temps constitué des groupes de vigilance, chargés d’empêcher des manifestations sans concertation sur la montagne. Face à la multiplication des altercations, le raidissement des esprits et les tensions répétées, les autorités administratives du Ndé et du Haut Nkam ont assuré les bons offices, tentant l’apaisement, avant de se concerter et prendre un arrêté, le 4 novembre 2014, d’interdiction de toute manifestation sur le site.

En bravant la décision administrative, des hommes enragés, postes avancés de colonnes du groupement Batchingou, en treillis, armés jusqu’aux dents, équipés de couteaux et machettes, déboulent. Ils ouvrent le feu, assènent des coups et brandissent leurs outils contondants. Plusieurs blessés mordent la poussière.

Jean Batcha, lui, essuie une balle. Il s’effondre le thorax touché, la respiration obstruée et le souffle lent. Quelques amis s’affairent aux premiers secours ; rien n’y fait. L’instant fatal! La figure montante de la culture Batcha, fierté locale geint de douleurs. Il s’accroche, telle une panthère des temps anciens, maître des pans de forêt des terres du pays Bamiléké. Son regard s’évanouit dans l’horizon, surplombant les hautes terres convoitées. Ses bras perdent de leur vigueur. Ils effleurent pour une dernière fois la terre de ses ancêtres, cet ocre qui a nimbé son enfance, coloré son imaginaire, mis du sel dans son existence.

Il y succombe. Au mitan de son existence, en plein décollage d’une carrière cinématographique et artistique prometteuse. Jean Batcha, à coté de son activité de commerçant, a franchi le pas du petit écran. De Sam Mambo, son premier nom de comédien, il fait le choix d’un symbole: «Je commence raconte t-il alors au site Batcha.org, comme Sam Mambo, et en 2004, lorsque je suis convié par les Déballeurs de Douala à jouer le rôle de Tagne dans la série Foyer Polygamique à Bazou, j’ai proposé au réalisateur de m’appeler Jean Batcha mais il a initialement refusé. Alors j’ai dit je ne jouerai pas ce rôle tant que je ne m’appelle pas Jean Batcha. Ceci pour donner une image à mon village.»

Il fait son chemin, enchaîne les séries. Ennemi Intime, Foyer Polygamique.les succès sont au rendez-vous. Sa visibilité s’accroit et son talent s’affirme. Il fait la fierté d’une contrée et conçoit des projets. Jusqu’au voyage de Batcha. Le dernier. Celui du départ vers les ancêtres.

Il avait des modèles notamment Mekep Sop Njui Malandjou Kondjo Norbert qui a favorisé l’intégration des Batcha à la fonction publique, construit l’école publique de Batcha, et contribué à l’aménagement de la chefferie.

Ce drame a brisé son rêve le plus cher: «créer un centre de formation culturel à Batcha pour former les jeunes qui veulent faire carrière dans l’art». Des élites sont engagées à le matérialiser. La meilleure manière d’honorer sa mémoire!

Jean Batcha, fierté du peuple Batcha
Abdelaziz Mounde)/n

Bagangté prépare le festival Medumba

La 12ème édition du Festival des arts et de la culture Medumba se tient dans le chef-lieu du département du Nde à l’Ouest du 02 au 20 juillet 2014

Comme cela est désormais devenu de coutume, chaque deux ans, les chefs supérieurs du département du Nde à l’ouest du Cameroun remettent en selle le Festival des arts et de la culture Medumba (Festac) que l’arrondissement de Bagangté a l’honneur d’abriter pour sa 13ème édition. Du 02 au 20 juillet 2014, les fils et filles de cette région sont appelés à communier autour d’un ensemble d’activités culturelles et recréatrices visant à valoriser la culture Medumba.

Y sont conviés: associations culturelles, opérateurs économiques, entreprises, artistes, amoureux de la culture, de l’art et de l’économie, élites intérieures et extérieures et autres personnalités. Le Festac Medumba 2014, ce sera : une dizaine de pavillons pour des expositions agrémentés d’une caravane du festival dans les villages ; un concours de la langue Medumba ; un concours de la Miss Medumba ; une soirée de Gala ; Une Journée des Chefs Supérieurs ; une Cérémonie de pose de la première pierre du Complexe Culturel Medumba ainsi que le Musée des Arts et de la Cuture Medumba, promettent, entre autres, les organisateurs. Rendez-vous est donc donné à Bagangté du 02 au 20 juillet 2014.


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