Pierre Barbier: «Je n’ai pas spécialement de regrets sur la saison écoulée»

Directeur de l’Alliance Française de Garoua, il fait le bilan et nous livre quelques orientations sur la prochaine saison culturelle

Mr Barbier, quel bilan faites-vous de cette 30è édition de la fête de la musique célébrée avec faste par l’Alliance française de Garoua cette année?
Pour cette trentième édition, l’Alliance de Garoua a voulu marquer le coup en mettant en place trois scènes dans la ville. L’objectif était de répondre aux attentes du public et en avoir pour tous les goûts. Cet objectif est atteint. Le public a semblé être comblé et a répondu massivement. Je tiens à remercier les différents partenaires de l’Alliance tant administratifs que commerciaux sans qui une telle opération n’aurait été possible. Je suis très content aussi de l’état d’esprit de cette fête qui a été complètement préservé, à savoir : gratuité de tous les sites, grande variété dans les styles musicaux proposés, grande place laissée aux groupes de musiques locaux qui ont pu tous s’exprimer (en particulier sur la scène de Yelwa où 40 groupes se sont succédés).

Avez-vous déjà penser à quelques innovations pour l’année prochaine?
J’aimerai l’année prochaine renforcer la valorisation des musiciens amateurs. En effet, l’esprit de cette fête est de s’adresser à tous les musiciens. Or, pour l’instant, ne se produisent que des groupes professionnels ou semi professionnels. Il est temps donc de penser à ces amateurs et mélomanes. L’année prochaine, une scène leur sera dédiée.

Bientôt c’est la fin de la saison culturelle à l’Alliance. Quel bilan faites-vous des activités de votre structure tout au long de cette saison culturelle?
Nous avons eu encore une riche saison culturelle, ponctuée par des spectacles très variés tant dans le théâtre, que la danse, la musique et le cinéma. L’offre proposée se voulait variée et de qualité. Je pense que nous avons atteint notre objectif. Le public qui s’est rendu à ces spectacles était satisfait. Nous avons aussi un gros effort dans la réhabilitation de notre matériel. De ce fait, les conditions d’accueil des prestations artistiques sont parmi les meilleures du pays.

Quelles sont les difficultés auxquels vous avez dû faire face?
Deux difficultés majeures sont apparues cette année. Tout d’abord, une baisse importante de nos moyens du fait de la baisse de la subvention de l’Ambassade de France. Cela nous oblige à revoir notre politique culturelle de telle sorte que nous privilégions la qualité à la quantité. La deuxième difficulté rencontrée, est le manque de spectateurs à certain spectacle. Il faut savoir que chaque spectacle a un coût. Si nous devons avoir des dépenses seulement pour 10 spectateurs, c’est délicat de les assumer. Je souhaiterai avoir un public plus ouvert et plus curieux à Garoua. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Nous réfléchissons sur les stratégies futures pouvant attirer plus de monde.

André Marie Talla comme cadeau de fin de saison, votre impression?
On va dire que c’est la « cerise sur le gâteau » pour finir cette fête de la Musique en beauté. L’artiste est d’un grand professionnalisme. Lorsque nous nous sommes contactés pour organiser ces concerts, il était tellement motivé pour venir à Garoua après 20 ans d’absence, que les choses étaient faciles à réaliser. Et je tiens à rassurer le public, l’Alliance frappera encore plus fort d’ici la fin de l’année.

L’alliance gardera t-elle la même orientation pour la saison culturelle prochaine ou l’on doit s’attendre à des bouleversements?
Il n’y aura pas de bouleversements pour la saison culturelle prochaine, nous allons rester dans la même dynamique et essayer de proposer de la qualité malgré nos manques de moyens. De nombreux projets devraient voir le jour en plus des programmations culturelles : une centre de ressources de l’audiovisuel du Grand Nord Cameroun, une école d’artistes de culture traditionnelle, des soirées cabarets mensuelles, des conférences entretiens avec des grandes personnalités locales, un bibliothèque itinérante pour la Région Nord, un partenariat accru avec les établissements scolaires pour y développer des activités culturelles, etc. Les idées ne manquent pas, à nous de les réaliser.

Acteur majeur du secteur culturel dans le Grand Nord, comment appréciez-vous l’évolution et même l’état de santé de la culture au Nord Cameroun?
Le Nord Cameroun est une des régions du pays où la culture est la plus développée. Malheureusement, cette culture est mal structurée et la plupart des artistes sont livrés à eux même et doivent se débrouiller pour trouver des endroits où prester. Nous manquons de salles. Le public n’est pas assez ouvert et curieux en général, du fait de ce manque de représentativité certainement. Il faut donc travailler dans ce sens avec les pouvoirs publics pour que non seulement les artistes aient des lieux où faire leurs manifestations mais aussi les moyens de vivre de leur art. Il paraît en effet urgent que des moyens soient mobilisés pour subventionner la création artistique.

Avez-vous des regrets?
Je n’ai pas spécialement de regrets sur la saison écoulée, hormis le manque de public dans certaines représentations.

Quel message aux artistes (musiciens, peintres, vidéastes.) qui souhaitent des collaborations ou l’appui de l’Alliance pour d’éventuels projets?
Mon message est très simple par le fait que l’Alliance sera toujours à leurs côtés pour les aider à développer leurs projets, dans la limite de ses moyens bien sûr, car malheureusement c’est ce qui nous freine la plupart du temps. En tout cas, la porte de mon bureau est toujours ouverte pour dialoguer avec eux. Je tiens aussi à les féliciter pour leur persévérance dans ce qu’ils font. Ils font vivre la culture dans ce pays grâce aux nombreux efforts qu’ils font. Je reçois tous les jours des propositions de spectacles venant de tout le Cameroun, ça montre la richesse créatrice des artistes de ce pays. Enfin, je tiens à remercier tous les musiciens de Garoua qui ont participé à la fête de la Musique, sans forcément d’aides, ils ont fait preuve d’un état d’esprit exemplaire.

Pierre Barbier, directeur de l’Alliance Française de Garoua
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