Gambie: malgré la situation, Adama Barrow se prépare à gouverner

Le président gambien élu annonce un plan de développement national. Il doit être investi le 19 janvier, date à laquelle expire, selon la Constitution, le mandat actuel de Yahya Jammeh

En Gambie, le président élu Adama Barrow annonce un plan de développement national. Il doit être investi le 19 janvier, date à laquelle expire, selon la Constitution, le mandat actuel de Yahya Jammeh, qui a déposé un recours devant la Cour suprême pour faire annuler le scrutin du 1er décembre. Yahya Jammeh a d’ailleurs réaffirmé la semaine dernière à la télévision gambienne qu’il ne quitterait pas le pouvoir tant que la Cour ne se serait pas prononcée, mais cela est loin de dissuader son successeur à se préparer à gouverner.

A moins d’un mois de son investiture, le président élu se prépare à entrer en fonction. Lundi, Adama Barrow a annoncé la mise en place d’un groupe d’experts pour formuler un plan de développement national, « à mon entrée en fonction », a-t-il précisé.

Un plan qui doit remplacer celui du gouvernement sortant et qui doit permettre au pays d’exploiter pleinement ses potentialités, indique le communiqué d’Adama Barrow. Objectif : formuler des plans par secteur pour le programme de développement de la période 2017-2020

Adama Barrow veut que son gouvernement soit « immédiatement opérationnel après son investiture le 19 janvier ». Il a par ailleurs appelé les Gambiens à « prier pour une transition pacifique ».

La Cour suprême doit examiner le 10 janvier le recours du parti du président Jammeh, qui demande l’annulation du scrutin.

Yahya Jammeh a assuré qu’il demeurerait au pouvoir tant que la Cour ne se serait pas prononcée. « Je ne suis pas un lâche », a-t-il lancé à la télévision nationale, alors que plusieurs pays et institutions, comme la Cédéao, le pressent de céder son fauteuil et de permettre une transition apaisée dans son pays.


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Présidentielle gambienne: le nouveau décompte des voix ne change pas le résultat

D’après la Commission électorale qui a rectifié ce mardi les résultats de l’élection, Adama Barrow reste en tête, mais l’écart avec Yahya Jammeh s’est resserré

En Gambie, la Commission électorale a rectifié ce mardi matin les résultats de l’élection présidentielle. Adama Barrow reste en tête, mais l’écart avec Yahya Jammeh s’est resserré.

Moins de 20 000 voix séparent désormais le nouveau président de l’ancien. Adama Barrow obtient 227 000 votes, Yahya Jammeh 208 000. Dans le premier décompte, vendredi, les deux adversaires avaient 50 000 voix d’écart.

Dans un communiqué publié ce mardi matin, la Commission électorale indique que des erreurs ont été faites au moment de la compilation finale à Banjul, que les résultats venus des régions ne sont pas erronés, et que les trois candidats ont vu leurs scores définitifs modifiés.

Au final, la Commission indique que ces erreurs n’ont aucun impact sur le résultat final et qu’Adama Barrow est bien élu président de la République.

Joint au téléphone, le président de la Commission, Alieu Momar Njei, précise que ces nouveaux résultats ont été validés par les trois candidats à la présidentielle. Ni Adama Barrow, ni Yahya Jammeh n’ont réagi à ce nouveau décompte.

Les recours sont néanmoins possibles. La Constitution gambienne donne dix jours aux candidats à partir de la proclamation des résultats, donc jusqu’au 12 décembre, pour déposer leurs requêtes au niveau de la Cour suprême.

Des Gambiens détachent un poster de l’ancien président Yahya Jammeh, le 4 décembre 2016.
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Gambie: victoire surprise d’Adama Barrow, défaite historique de Yahya Jammeh

Alors que l’on donnait l’élection présidentielle jouée d’avance, le candidat de l’opposition a finalement remporté le scrutin

C’est la surprise, la stupéfaction en Gambie. Alors que l’on donnait l’élection présidentielle jouée d’avance, le candidat de l’opposition a finalement remporté le scrutin. Il devance le président sortant, Yahya Jammeh au pouvoir depuis 22 ans. Une annonce célébrée par la population dans la capitale, à Banjul.

« Adama Barrow est élu président de la République », selon le président de la Commission électorale en Gambie. Une annonce surprise intervenue dans l’après-midi ce vendredi. L’opposant, candidat de la coalition de sept partis d’opposition, totalise 263 515 voix contre 212 099 pour Yahya Jammeh et 102 969 pour le troisième candidat Kandeh Mamma. Adama Barrow remporte 45,54% des suffrages, selon des résultats officiels.

C’est donc une défaite historique pour Yahya Jammeh, avec 36,6% des voix, au pouvoir depuis 1994 dont on attend une allocution dans la journée. Il devrait reconnaître les résultats, selon le président de la Commission électorale. C’est en tous les cas un séisme politique pour le pays et une issue totalement inatendue pour cette élection que l’on disait jouée d’avance. Des scènes de liesse ont d’ailleurs suivi l’annonce des résultats notamment dans la capitale Banjul.

« C’est unique, ce n’est jamais arrivé ailleurs avant. C’est vraiment unique que quelqu’un qui a dirigé ce pays depuis si longtemps accepte sa défaite avant même que la Commission électorale ne l’annonce. C’est vraiment, vraiment, vraiment unique. C’est incroyable », pour le président de la Commission électorale gambienne, Alieu Momar Njie.

Scènes de liesse
Des scènes de liesse ont d’ailleurs suivi l’annonce des résultats notamment dans la capitale Banjul. L’histoire est en marche et des centaines de personnes célèbrent la victoire d’Adama Barrow avec des cris, des chants, des klaxons et des tambours. « Je ne vais pas pleurer aujourd’hui, confie un homme dans la foule. J’ai pleuré pendant 22 ans, durant tout le pouvoir de Yahya Jammeh. Aujourd’hui, je suis la personne la plus heureuse du monde ». « C’est une renaissance qui se déroule sous nos yeux, crie Lamine, 22 ans. Je n’aurais plus jamais peur, je suis libre, totalement libre ».

Si certains saluent Yahya Jammeh d’avoir, semble-t-il, reconnu sa défaite, les critiques sont vives, fortes, virulentes contre l’ex-président. Des voitures roulent sur une affiche géante de Yahya Jammeh, une affiche arrachée par la population. « Il y a eu trop de morts, notre vie était trop dure, explique Abdoulaye, un doyen. La Gambie doit revivre, nous ne voulons plus jamais de répression ». L’émotion est immense. Cette célébration, la fin du règne de Yahya Jammeh, était une chose impensable il y a encore quelques heures. La Gambie entre aujourd’hui dans la joie, la liesse, la vie, dans une nouvelle époque. C’est un jour historique et rien ne devrait pouvoir arrêter cette population qui respire pour la première fois depuis 22 ans l’air de la liberté.

L’opposant gambien, Adama Barrow, en campagne avant sa victoire à la présidentielle.
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Après le Burundi et l’Afrique du Sud, la Gambie annonce son retrait de la CPI

La décision constitue un revers personnel pour la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, de nationalité gambienne, qui a été ministre de la Justice du président Yahya Jammeh

Dans la foulée du Burundi et de l’Afrique du Sud, la Gambie a annoncé, mardi, son retrait de la Cour pénale internationale, accusant la juridiction de passer sous silence les « crimes de guerre » des pays occidentaux.

« À partir de ce jour, mardi 24 octobre, nous ne sommes plus membres de la CPI et avons entamé le processus prescrit par le statut fondateur » pour nous en retirer. C’est par la voix de son ministre de l’Information, Sheriff Bojang, que la Gambie a annoncé, mardi 25 octobre, son retrait de la Cour pénale internationale (CPI).

Dans une déclaration à la télévision nationale, le ministre a accusé la CPI de « persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants », alors que selon lui « au moins 30 pays occidentaux ont commis des crimes de guerre » depuis la création de cette juridiction sans être inquiétés. Sheriff Bojang a affirmé que la Gambie avait tenté en vain de convaincre la CPI de poursuivre les pays de l’Union européenne pour la mort de nombreux migrants africains en Méditerranée, précisant que son pays avait menacé de prendre des mesures s’il n’était pas entendu.

La décision constitue un revers personnel pour la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, de nationalité gambienne, qui a été ministre de la Justice du président Yahya Jammeh.

Un revirement de Yahya Jammeh ?
Deux autres pays africains, le Burundi et l’Afrique du Sud, ont déjà rompu avec la CPI. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, et le président de l’Assemblée des États parties au traité fondateur de la CPI, le ministre sénégalais de la Justice, Sidiki Kaba, ont pourtant appelé les pays qui critiquent le fonctionnement de cette juridiction à ne pas s’en retirer, mais à résoudre leurs différends par le dialogue avec les autres membres.

Rien, il y a quelques mois, ne laissait présager une telle décision de la Gambie : dans une interview accordée en mai 2016 à l’hebdomadaire Jeune Afrique, le président gambien s’était ainsi démarqué des critiques de ses pairs africains envers la CPI et sa procureure. « Son job est difficile et, contrairement à ce que j’entends, la CPI ne vise pas spécialement l’Afrique », avait-il dit au sujet de Fatou Bensouda. « Les leaders africains râlent aujourd’hui. Mais pourquoi ont-ils signé [le traité ratifiant la CPI] en sachant qu’ils pouvaient en être victimes ? », avait alors souligné Yahya Jammeh.

La Gambie, petit État anglophone d’Afrique de l’Ouest de quelque deux millions d’habitants, est dirigée d’une main de fer depuis 1994 par Yahya Jammeh. Parvenu au pouvoir par un coup d’État sans effusion de sang, il a été élu en 1996, puis constamment réélu depuis. Il briguera un cinquième mandat en décembre. Son régime est accusé par des ONG et par le département d’État américain de disparitions forcées et de harcèlement de la presse et des défenseurs des droits humains, critiques que Yahya Jammeh rejette systématiquement.

Le président gambien, Yahya Jammeh, lors d’un sommet États-Unis/Afrique à Washington en août 2014.
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