Une opération des forces de l’ordre en vue de déguerpir des commerçants occupant la voie publique, a viré à l’affrontement de rue
Samedi 16 juin 2012 dernier, trois personnes ont trouvé la mort et de nombreuses autres ont été blessées à la suite d’un affrontement avec des forces de l’ordre et d’intervention spéciale au marché Mokolo à Yaoundé la capitale camerounaise. J’entends tout le monde dire qu’il y a eu trois morts, je pense qu’on aura plus de morts. J’ai vu une femme qui braisait le poisson tomber, il y a eu la dame du PMUC aussi qui est tombée, il y a cette petite fille qui est morte asphyxiée par du gaz lacrymogène, sans compter de nombreuses autres personnes qui sont tombées et ont été piétinées par les autres qui fuyaient les forces de l’ordre, affirme un témoin de la scène. Ce lundi matin encore, plusieurs d’entre ces personnes sont détenues dans des commissariats de la ville, à la suite d’arrestations massives. Ma tante était au marché pour faire ses courses et les troubles ont commencé. On l’a arrêtée et emmené et là je ne sais pas ce qu’on lui reproche j’essaye de voir comment faire pour la libérer, affirme Nadège F, parente d’une personne en détention au commissariat du 2ème arrondissement. Au sein des forces de l’ordre, on se refuse à tout commentaire. Nous n’avons pas le droit de rendre compte à la presse. Ce qui s’est passé à Mokolo est très grave et les coupables seront punis conformément à la loi, lance néanmoins un élément des forces de police dudit commissariat. Parmi les blessés, se compterait un policier qui aurait été poignardé par la foule. La police fait aussi savoir que des jeunes ont été les premiers à jeter des pierres et autres objets sur les policiers.
Sur les causes de l’émeute, les versions varient selon les parties. Ils savent qu’ils ne doivent pas vendre en bordure des routes, c’est une occupation de la voie publique, et ils empêchent les autres commerçants qui eux ont acheté ou loué des espaces et qui paient la taxe, de pouvoir exercer normalement leur activité. Nous avions un peu marre de ce jeu du chat et de la souris et nous avons décidé de marquer un coup important pour qu’ils comprennent qu’ils sont dans le tort, explique notre source policière.
Chez les commerçants objets de l’opération d’assainissement, on relève que la police y a mis un zèle qui finalement a excédé les foules. Généralement, on chasse ceux qui vendent sur le trottoir et occupent par la même occasion la chaussée. Mais ce jour-là, on a cru suivre, que l’opération devait aussi permettre de traquer les boutiques qui conservent les marchandises de ces gens-là. Vous connaissez le marché Mokolo, c’était une erreur. Il était devenu difficile de faire le tri entre les boutiques sérieuses et celle qui hébergeaient des marchandises clandestines. Fort logiquement cela a viré à l’émeute. Vous savez il y a des gens dont la vie ne tient parfois qu’à cette boutique. On a donc assisté à une bataille pour la survie raconte un commerçant.
Comme la plupart des marchés du Cameroun, de nombreuses personnes au motif de se débrouiller, envahissent la chaussée et les trottoirs forçant des sentiments mitigés. C’est dommage qu’on ait eu des morts, mais ce qu’il faut espérer c’est que ces gens-là comprennent qu’ils n’ont pas le droit de se trouver là. On peut ouvrir des discussions pour régler le problème, mais cela n’est pas faisable s’ils ne sont pas organisés explique Eric M, propriétaire d’une boutique au marché Mokolo. Les vendeurs à la sauvette avancent d’autres types d’arguments: Ils veulent que nous allions où?. Si c’est pour mourir on va mourir. On fréquente, il n’y a pas de travail on est obligé de se débrouiller. Ils disent que nous sommes illégaux, mais les mêmes agents de la mairie viennent prendre des taxes chez nous tous les jours, il faut donc savoir explique pour sa part Germain K, un vendeur à la sauvette.
La réaction du gouvernement reste attendue dans cette affaire.